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La dette japonaise divise le parti au pouvoir

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Le Premier ministre japonais, Yoshihiko Noda, a décidé d’augmenter des impôts pour réduire la dette nationale, véritable pierre angulaire de la politique économique.

Il a obtenu cette semaine le soutien du Parlement  pour l’augmentation les taxes sur la valeur ajoutée. Pourtant, ces mesures pourraient faire chuter son gouvernement, et font peser doutes quant à la détermination du Japon à restaurer l’équilibre de ses comptes publics et à procéder à un véritable nettoyage fiscal.

Yoshihiko Noda n’était d’ailleurs pas dans son meilleur jour lorsqu’il est apparu, mardi 26 juin télévision, juste après un vote décisif pour l’avenir de son parti, désormais très divisé.

Quelques heures plus tôt, 57 dissidents du Parti Democratique du Japon (PDJ) votaient contre le projet de loi qui permettait de doubler les taxes d’un montant de 10% dans les trois années à venir.

Une augmentation qui passe mal

Le projet a été adopté par la chambre basse du Parlement – 363 voix contre 96 -, grâce à la principale formation d’opposition du Parti Libéral Démocrate (PLD) qui a exigé une élection anticipée en échange de leur coopération.

Si plus de 54 dissidents, conduit par le principal opposant de Noda, Ichiro Ozawa, décident de quitter le parti, le PDJ perdra sa majorité à la chambre basse. Le Premier ministre serait alors à la merci d’un vote de défiance. Un vote de défiance qui entrainerait de nouvelles élections, que le PDJ aurait de grande chance de perdre.

Il est probable que des sympathisants du clan Ozawa quittent le navire. Ce dernier a déclaré qu’il continuerait à faire pression sur le gouvernement afin d’enrayer la hausse des impôts, avant même d’envisager son avenir et celui de dizaines de législateurs du PDJ – pour la plupart élu en 2009.[image:2,l]

Un pays qui vieillit

De son côté Yoshihiko Noda continue d’affirmer que cette hausse est essentielle si le Japon veut réduire son énorme déficit public. Ces hausse d’impôts doivent permettent de préserver le niveau de vie, dans un pays où près d’un quart de la population est âgée de plus de 65 ans. Dans moins de 50 ans, 40% des japonais seront à la retraite.

Si le gouvernement japonais n’arrivait pas à endiguer le problème de ses finances publiques, la troisième économie mondiale risquerait, elle aussi, d’être confrontée à une crise de la dette, comparable à celles que connaissent les économies européennes.

« Je veux poursuivre une politique qui prennent des mesures décisives lorsque c’est nécessaire, » a déclaré Noda dans son intervention télévisée. « Le passage par la chambre basse est une étape importante dans la bonne direction, » a t-il ajouté.[image:3,l]

Une dette publique abyssale

Approchant les 200% du PIB – pour une économie estimée à 5 milliards de dollars –, la dette japonaise est la plus importante de toutes les nations industrialisées.

Alors que plus de 90% de cette dette est détenue au niveau national, certains analystes s’inquiètent que le Japon puisse devenir l’équivalent de la Grèce dans la région Asie-Pacifique.

Avec l’augmentation des impôts qui devrait être adoptée par la chambre haute, Yoshihiko Noda gagnera peut-être la bataille économique, mais se trouve bien mal en point pour la bataille politique à venir.
Ichiro Ozawa explique de son côté que l’augmentation des impôts va affaiblir la consommation, et représente un « trahison » du manifeste sur lequel le parti a été élu lors de la dernière élection. « Il s’agit d’une trahison contre le peuple, qui aurait raison de nous qualifier de menteurs, » a déclaré Ozawa après le vote, en promettant de tout faire pour contrecarrer l’adoption du projet de loi par la chambre haute.

Une discipline difficile à faire respecter

Yoshihiko Noda doit donc réfléchir à la manière de traiter avec les opposants au sein de son parti. Une réprimande ne serait pas bien vue par ceux qui lui sont restés loyaux, et des expulsions accélèrerait considérablement le déclin du PDJ.

Koichi Nakano, professeur de sciences politiques à l’Université Sophia à Tokyo, explique que les menaces d’Ozawa devraient être prises au sérieux : « Je pense qu’il est très probable qu’Ichiro Ozawa quitte le parti, et entraine avec lui plus de 40 députés. Noda devra soit démissionner, soit convoquer de nouvelles élections et il sera évincé. Dans les deux cas de figure, il est peu probable qu’Yoshihiko Noda soit  encore Premier ministre à la fin de l’année. »[image:4,l]

Le Japon doit rassurer

Le Japon va très certainement traverser une nouvelle période d’instabilité politique, à un moment où il espère rassurer sur sa capacité à prendre en main son déficit. L’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) prédit que ce déficit atteindra 223% du PIB dès l’année prochaine.

Plus tôt ce mois-ci, le Fonds Monétaire International (FMI) a exhorté le Japon à augmenter les taxes sur la valeur ajoutée pour prouver son attachement à une réforme fiscale.

« L’adoption de la loi permettant de doubler le taux des taxes à l’achat d’ici 2015 est crucial pour démontrer l’engagement à la réforme fiscale, et maintenir la confiance des investisseurs, » a expliqué le FMI dans un communiqué à la suite de son examen annuel de l’économie japonaise.

Un problème loin d’être résolu

Les réformes fiscales ne suffiront pas à résoudre le problème du déficit japonais. Selon les prévisions du gouvernement, doubler la taxe sur la consommation augmentera les recettes de 13500 milliards de yens (170 milliards de dollars) par an d’ici à 2015. Le déficit du Japon est actuellement estimé à 564 milliards de dollars par an.

Le ministre des Finances, Jun Azumi, a expliqué que le vote de mardi démontre que le Japon s’occupait de ses problèmes économiques : « Je pense que cela montre à la communauté internationale que nous prenons des mesures, » a t-il dit.

Selon un sondage réalisé par Kyoda News, le soutien du public envers le cabinet du Premier ministre est tombé en dessous des 30%.

Même s’ils punissent le PDJ dans les urnes, les électeurs japonais auront du mal à trouver une alternative viable, souligne Koichi Nakano : « Le scénario le plus probable est que le PDJ s’écroule et perde le pouvoir » dit-il. « Le PLD n’a pas retrouvé la confiance du public depuis sa défaite en 2009. Il n’a même pas essayé, alors il ne risque pas non plus d’apporter des réponses aux problèmes économiques et sociaux du Japon. »

Global Post/ Adaptation Henri Lahera pour JOL Press

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