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L’armée allemande veut recruter plus de femmes

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Une armée qui change

L’armée allemande est en pleine mutation. Ce qui était autrefois un bastion masculin commence peu à peu à prendre une teinte plus féminine, et un peu moins d’un soldat sur dix est une femme.

Maintenant, l’institution militaire, ou Bundeswehr, veut voir encore plus de femmes dans ses rangs. « Actuellement, environ 9% des soldats allemands sont des femmes », explique le chef d’état-major Volker Wieker, « notre objectif est d’atteindre les 15% ».

Pour y parvenir, l’armée a l’intention de se montrer sous un visage plus attrayant aux recrues de sexe féminin. Et cela passe par l’amélioration des structures favorables à la famille. Pourtant, des problèmes persistent.

Premièrement, la Bundeswehr ne s’est ouverte aux femmes il y a seulement une décennie. Alors qu’elles pouvaient rejoindre l’armée dès 1975, elles étaient pour la plupart cantonnées à servir dans le domaine médical.

L’idée d’une femme soldat, servant dans le combat actif, était encore taboue. Il existait même une interdiction à ce sujet, écrite dans la Constitution, qui fut très controversé. Certaines féministes voulaient naturellement l’égalité des droits des femmes étendue au domaine de l’armée. D’autres ont rejeté l’armée pour sa structure trop patriarcale, et les partisans de gauche se sont simplement désintéressés du domaine militaire.

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Un long combat pour l’égalité

Les conservateurs, en revanche étaient clairement contre la notion de femmes combattantes. L’ancien ministre de la Défense, Volker Ruhe, un membre des conservateurs chrétiens démocrates avait déclaré : « Je vois mal une femme dans un tank ».

Malgré tout, cette interdiction a été levée en 2000. Pas à l’aide de l’intervention de politiciens allemands, mais grâce à une jeune électricienne du nom de Tanja Kreil, qui porta l’affaire à la Cour Européenne de Justice. Elle a simplement fait valoir que sa demande d’entrée à l’armée avait été rejetée à cause de son sexe, et pas de ses qualifications. Le tribunal a jugé en sa faveur, en déclarant que l’Allemagne ne respectait pas la législation de l’Union Européenne.

En conséquence, l’article 12 bis de la Constitution allemande, connu sous le nom de « Loi Fondamentale », a dû être changé. Au lieu de stipuler que les femmes ne peuvent « pas porter des armes », la loi explique que les femmes ne sont « pas obligées d’en porter ». Une fois cette obstacle levé, beaucoup plus de femmes se sont mises à rejoindre l’armée.

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Un nombre de femmes soldats de plus en plus important

Alors qu’il avait environ 4500 femmes dans l’armée en 2000, il y en a maintenant un peu plus de 18 000, sur un total de 197 000 soldats actifs. On les trouve à tout type de poste, de policier militaire à technicienne sur les sous-marins. Ulrike Flender, la première femme pilote de chasse a d’ailleurs été nommé première sur le classement des « 100 plus grandes femmes d’Allemagne », dressé par le très populaire magazine Bild.

Pourtant l’ouverture de l’armée à la gent féminine s’est toujours fait sur une base volontariste. Ce n’était pas le cas des hommes il y a peu. Ils ont dû soit faire un service militaire d’un an, soit opter pour une alternative, comme le travail en hôpital.

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La fin du service militaire allemand

En 2011, la conscription a été supprimée dans le cadre d’une refonte des forces armées allemandes. Une nouvelle armée professionnelle devait être créé, plus en accord avec le rôle militaire de l’Allemagne dans le monde. Avec des déplacements à l’étranger dans des endroits comme le Kosovo ou l’Afghanistan, les recrues qui restaient une année ne pouvaient assurer un usage militaire, et leur formation coûtait très chère. En enlevant le service militaire, l’armée devrait économiser 8,3 milliards d’euros.

Pourtant, l’évolution démographique du pays, couplée à un chômage faible, et même à une pénurie de compétences n’aide pas le recrutement de l’armée. La Bundeswehr a donc du sortir le grand jeu pour attirer des futurs soldats professionnels. Par ailleurs l’armée met beaucoup l’accent sur les femmes, une source au potentiel relativement inexploité.

Allier famille et carrière

Le chef d’état-major Wolker Wieker insiste sur le fait que la Bundeswehr doit faire un effort pour attirer plus de recrues féminines. « Nous avons déjà construit des garderies dans une des chambres de la plus grande caserne », a-t-il déclaré, ajoutant que son intention était d’étendre ces services : « Il est clair pour nous que nous devons améliorer la compatibilité de la famille avec la carrière ».

Depuis 2005, il existe une sorte de loi d’égalité entre les soldats, supposée simplifier la combinaison vie de famille et carrière militaire, et qui inclut des horaires de travail flexibles. Cette loi essaye aussi d’éliminer la discrimination des rangs de l’armée. Des responsables pour l’égalité sont affectés à des unités pour s’assurer que cette égalité soit respectée.

Cependant, le dernier rapport annuel de Hellmut Konigshaus, le commissaire parlementaire aux forces armées,  a constaté que la Bundeswehr ne réussit pas à livrer des mesures véritablement favorables aux familles, comme la fourniture de chambres parents-enfants ou des garderies. Le rapport spécifiait qu’il manquait encore au moins mille de ces garderies. Mais un autre problème concerne les femmes soldats.[image:4,l]

Une discrimination bien visible

Dans un livre écrit à l’occasion du 10e anniversaire de l’ouverture de l’armée aux femmes, Bärbel Reichardt, elle-même officier, a relaté les expériences de ces nouveaux soldats féminins et a révélé la discrimination dont elles peuvent parfois être les victimes. « D’une façon ou d’un autre, on est toujours dans une situation un peu particulière. Au cours de la formation d’officier à la Bundeswehr, on est soit traitée avec beaucoup d’attention par les agents de sexe masculin, soit rejetée. »

Ces conclusions sont reprises dans un rapport de l’Institut des Sciences Sociales du Bundeswehr, datant de 2008, qui fait valoir que le processus d’intégration des femmes dans l’armée « ne peut pas être décrit comme accomplie ».

On y apprend que de nombreux soldats masculins ne sont pas heureux de la présence des femmes, et qu’ils évaluent les compétences des femmes comme inférieures. On découvre aussi que les soldats masculins perçoivent les femmes comme des compétitrices quand il s’agit de possibilités de promotions.

Un autre problème dont l’armée aimerait se passer

De plus, beaucoup de femmes font face à un sérieux problème : le harcèlement sexuel et même les agressions.

Les recherches menées par l’institut ont révélé que 58% des femmes soldats avaient été l’objet de commentaires sexistes ou salaces, et que 19% d’entre elles ont dû faire face à un contact physique non désiré. Enfin 4,6% ont déclaré qu’elles étaient au courant d’une agression sexuelle, et même d’un viol (ou d’une tentative) dans leurs unités.

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Néanmoins, dans son dernier rapport annuel, Konighaus était optimiste au sujet des développements au sein de la Bundeswehr. « Les cas individuels de comportements misogynes, y compris les commentaires des camarades et des supérieurs, ou même de harcèlements sexuels ont été signalé », a-t-il écrit. « Lorsque cela a été prouvé, les coupables ont été puni, soit par des mesures disciplinaires, soit par des poursuites judiciaires ».

Pourtant, dans l’ensemble, la situation s’améliore : « En dehors de ces cas-là, dans des endroit où l’on observe un pourcentage élevé de soldats féminins, le ton est devenu beaucoup plus respectueux ».

Global Post / Adaptation Henri Lahera pour JOL Press

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