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Mohamed Merah sur TF1: la polémique enfle

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« Le droit au respect »

Quelles sont les limites de la liberté de presse ? Peut-on prendre le risque d’offenser, voire de blesser, le public au nom du droit à l’information ? Ce sont des questions qu’a soulevé la chaîne de télévision TF1 en diffusant, lors de son émission « Sept à huit », dimanche 8 juillet, les extraits d’un enregistrement des discussions entre Mohamed Merah et les forces de police, datés des 21 et 22 mars. Jacques Camus, éditorialiste, invoque dans La République du Centre : « Le droit au respect ». Il souligne le peu de valeur qu’ont les informations révélées par l’enregistrement audio et s’interroge sur la nécessité de « ressusciter le tueur narcissique auprès des familles des victimes ».

Un travail journalistique pour Catherine Nayl

Catherine Nayl, directrice de l’Information du groupe, conteste cette analyse. Elle affirme que les journalistes de TF1 comprennent « parfaitement le choc et la violence pour les familles des victimes d’entendre la voix de celui qui a assassiné un des leurs », mais elle nie l’approche « sensationnaliste » que l’on reproche à la chaîne. Pour la journaliste, le travail « a été fait de manière journalistique, pierre après pierre » et  met en lumière « des informations très importantes sur la façon dont les hommes du Raid ont négocié », jugeant que « ce document prouve que, jusqu’au bout de l’assaut, les négociateurs ont essayé d’arrêter Mohamed Merah, et de l’arrêter vivant ». Une déclaration qui trouve son écho dans les journaux régionaux. Le Courrier Picard, l’Ardennais et l’Alsace soutiennent l’utilité de la diffusion de l’enregistrement.

Une remise en cause des services secrets français

L’Alsace va plus loin, affirmant que cette décision de TF1 met un terme à « une malodorante campagne de désinformation partie d’Algérie, où la famille de Merah prétend détenir la preuve qu’il était innocent et qu’il a été abattu pour qu’il ne puisse pas se défendre en mettant en cause les services secrets français ». D’autres part pour le quotidien, les extraits d’enregistrements confirmeraient la théorie selon laquelle « le contre-espionnage français serait passé à côté d’un danger public » qu’il aurait pu stopper avant qu’il ne passe à l’acte.

Pour Reporters sans frontières, l’État porte atteinte à la protection des sources

Une vision des choses très contestée. Michel Boyon président du CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel), interrogé sur le plateau d’Europe 1, s’est lui-même dit « profondément choqué ». Pour lui, il n’est « pas acceptable qu’on puisse se moquer ainsi de la douleur des familles », ajoutant que « s’il y a matière pour le CSA à intervenir, notamment par la voie de sanctions », il le ferait. Démarche qui, si elle aboutissait, pourrait être lourde de conséquences pour la chaîne, mais aussi pour la position de l’Etat sur la scène internationale. Classée seulement 38e en matière de liberté de la Presse par Reporter Sans Frontières, la France a été accusée par l’ONG de porter atteinte à la protection des sources en cherchant à retrouver l’auteur de la fuite.

Un problème déontologique, mais surtout légal

Mais au-delà du problème déontologique, c’est un problème légal qui se pose. Les journalistes de TF1 n’auraient pas dû entrer en possession de l’enregistrement en question. Pour le journal La Croix « il ne faut pas se leurrer : quelqu’un – et l’enquête ouverte par la police des polices a pour charge de le déterminer – les a remis entre les mains des journalistes ». 

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