Site icon La Revue Internationale

Pour le Financial Times, les Français vont choisir l’exil

[image:1,l]

Le Financial Times s’inquiète du chemin que prend la France pour répondre au défi de la crise. Dans son édition du mercredi 4 juin, le quotidien britannique estime d’ailleurs que les dernières mesures fiscales, annoncées par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, pourraient bien conduire les riches et les grandes entreprises surtaxés à fouler ce « tapis rouge » déroulé il y a quelques semaines par le Premier ministre britannique David Cameron.

Réduire le déficit, mais à quel prix ?

Taxer les gros revenus au moment où la France a un besoin urgent de croissance et de compétitivité ? Une erreur fondamentale pour le quotidien qui estime que si François Hollande a fait de la réduction de la dette publique une priorité, les moyens employés pour y remédier sont contre-productifs.

Ce n’est « pas la bonne solution », indique le journal dans son éditorial du 4 juillet. « Le gouffre des finances publiques ne peut pas être comblé uniquement par des hausses d’impôts. […] François Hollande devra aussi puiser dans les services publics comme la santé et la fonction publique. »

Car selon l’analyse du Financial Times, la seule conséquence de la politique de taxation maximum de François Hollande sera de participer à une fuite massive des cerveaux et des capitaux vers l’étranger.

Dans une enquête publiée jeudi 5 juillet, sous le titre, « France, prêts à quitter le navire », le Financial Times s’est intéressé à ces riches Français, chefs d’entreprises, qui participent à la croissance du pays et qui pourraient bien choisir l’exil dans les mois à venir si leur propre pays ne les encourage pas à participer à la création de la richesse nationale.

« Paris doit rester compétitif »

Henri de Castries, président du groupe Axa, interrogé par le quotidien, ne comprend pas la stratégie du Président : « J’ai écouté François Hollande. Il veut plus de croissance et moins de chômage. […] La question est de savoir comment atteindre ces buts ? » s’inquiète-t-il. « Il n’y a pas d’exemple, dans l’histoire économique moderne, d’un pays qui a réussi à réduire son déficit en augmentant les taxes à un niveau confiscatoire. »

Pour le Financial Times, tout l’enjeu est de savoir « si cette approche risque d’aliéner la communauté commerciale au moment même où le pays a un besoin désespéré d’investissements et de croissance pour remettre à flot une économie sérieusement affaiblie. »

Interrogé par le quotidien, Guillaume Poitrinal, directeur exécutif d’Unibail-Rodamco, basé à Paris, estime que « la France n’est pas isolée du reste du monde et Paris doit être compétitif. » Selon lui, cette compétitivité n’est pas envisageable sans l’économie que génèrent les grands groupes auprès des petites et moyennes entreprises qui « sont le meilleur atout de la France ».

Le Royaume-Uni se prépare à accueillir les Français

Mais s’il n’y avait que les Français… Pour Hugh Carnegy et Scherazade Daneshkhu, auteurs de l’enquête du Financial Times, la politique du Président Hollande pourrait également décourager les étrangers installés en France.

Roger, expatrié britannique fera sans doute partie des voyageurs du prochain Eurostar pour Londres. « Je suis très heureux à Paris. Ma femme et moi adorons Paris. Nous sommes venus ici par choix. Mais je suis en train de reconsidérer notre situation étant donné les changements qui sont en cours », explique-t-il. « Le discours anti-riche n’est pas encourageant. Je préfèrerais être dans un pays où je n’ai pas à vivre avec ça. »

Roger, qui n’a pas voulu témoigner sous son vrai nom, va plus loin. Selon lui, c’est toute une génération d’expatriés qui risque de quitter la France, ou pire, de ne jamais s’y installer. « Durant ces dix dernières années, les entreprises françaises ont attiré plus de talents étrangers. Mais qui voudrait encore venir à Paris pour créer une entreprise dans cet environnement ? »

Les expatriations ont commencées

Partir au Royaume-Uni ? Les riches Français savent qu’ils seront accueillis à bras ouvert par le Premier ministre David Cameron. Mais les capitaux n’auront pas forcément à traverser la Manche pour trouver du réconfort.

Philippe Kenel, dirigeant d’un cabinet d’avocat basé en Suisse et interviewé par le Financial Times avoue avoir expatrié douze Français, à la fin du mois d’avril, juste avant l’élection de François Hollande. « J’ai fait en quatre mois ce que je fais habituellement en un an », affirme-t-il.

Le gouvernement s’attaque à la dette publique

Mercredi 4 juillet, le gouvernement a annoncé des hausses d’impôts qui devraient rapporter 7,2 milliards d’euros en 2012 et 6,1 milliards en 2013. 53% de ces hausses seront supportées par les ménages français, les 47% restant par les entreprises.

Ces 53% seront, à 73% prélevés sur le patrimoine des Français les plus riches.

Parmi les principales mesures annoncées, l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) sera relevé et devrait rapporter 2,3 milliards d’euros. Une hausse de deux points des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine ou de placement entrera en vigueur et devrait rapporter 800 millions en 2012 et 2,6 milliards en 2013.

Les taxes sur les banques seront doublées et rapporteront, selon les prévisions du gouvernement, 550 millions d’euros supplémentaires en 2012. La taxe de risque systémique, entrée en vigueur en 2010 et calculée en appliquant un taux de 0,25% au montant de fonds propres minimum des banques par le régulateur devrait rapporter également 1,1 milliard d’euros à l’Etat.

Concernant les entreprises, le relèvement de 8% à 20% du forfait social sur l’épargne salariale rapportera 550 millions d’euros cette année. Une anticipation du versement de la contribution exceptionnelle de 5% de l’impôt sur les sociétés rapportera quant à elle 800 millions d’euros.

Finalement, les actionnaires seront aussi visés et une taxe, à hauteur de 3%, devrait être prélevée sur leurs dividendes. Le taux de la taxe sur les transactions financières sera doublé, à 0,2% et la taxation des stock-options et des distributions d’actions gratuites sera renforcée, passant de 14% à 30% pour les entreprises et de 8% à 10% pour les bénéficiaires.

Quitter la version mobile