Site icon La Revue Internationale

Ce qui pourrait faire échouer Barack Obama le 6 novembre

[image:1,l]

La conjoncture économique est très difficile et le Président n’est pas parvenu à incarner l’espoir qu’il avait représenté. En raison de sa volonté de compromis, de son respect de l’adversaire républicain, même quand celui-ci ne cherche qu’à provoquer sa perte, il a déçu beaucoup d’électeurs qui l’avaient alors suivi. Il a tenu nombre de ses promesses et remporté des succès internationaux, mais ces réalisations ne pèsent pas assez lourd par rapport à ces doutes grandissants

Il faudra à Barack Obama et aux démocrates une puissante détermination et une solide organisation pour mobiliser. Sans doute, le concurrent républicain ne sera pas d’une grande envergure, mais le Président devra sortir le grand jeu pour effectuer un second mandat.

Extraits de Obama, vers un deuxième mandat ? de Jacques Portes :

Les États-Unis, comme d’autres anciens pays démocratiques, ont besoin pour rebondir d’une réelle communauté nationale qui puisse se rassembler autour de nouveaux projets. L’impasse d’une société fragmentée en multiples sous-groupes fait apparaître comme intolérable l’inégalité croissante et explique l’individualisme dominant qui se manifeste dans le refus de nombreux Américains de la notion même d’impôt, pourtant nécessaire à la consolidation d’une réelle nation.

Les analyses de Pierre Rosanvallon sur le principe d’égalité s’appliquent tout à fait à la situation actuelle des États-Unis :

« L’État redistributeur est en crise. Mais il ne pourra pas être revitalisé sans que préalablement, on « refasse société ». Sinon ce seront les thèmes démagogiques de la dénonciation de l’’assistanat » ou de la suspicion envers les immigrés… qui tiendront le haut du pavé. D’où pour cela encore la nécessité de refonder une culture de l’égalité. Sinon, plus qu’une explosion sociale, ce sera un processus de décomposition et de pourrissement des sociétés qui s’accélérera… On ne peut pas se contenter de réduire les inégalités monétaires. Ou disons plus précisément que, pour y arriver, il faut d’abord refaire un monde commun. Si c’est le but, il est par exemple prioritaire de développer les espaces publics pour “déghettoïser” la société. Il faut aussi donner chair à une nouvelle culture de l’égalité, dans laquelle tous puissent se reconnaître. Avec les inégalités, les gens vivent de plus en plus dans leurs petits univers segmentés. »[1]

Pour mettre en perspective une telle vision, dont il approche dans certains de ses discours, il faudra à Obama une force de caractère et une détermination qui ont été prises en défaut depuis son entrée à la Maison-Blanche. En tout cas, il a devant lui la preuve qu’il lui est impossible de parvenir à un quelconque compromis avec ses adversaires républicains et du Tea Party qui mettent en cause la règle du jeu ; il a cherché en vain un tel arrangement depuis 2010.

S’il veut l’emporter de belle manière en novembre 2012, il est temps pour lui de rompre avec ces pratiques et d’être nettement plus offensif afin de définir rapidement ce nouveau et puissant dessein qui puisse entraîner le plus grand nombre de ses concitoyens derrière lui.

En effet, l’élection de 2012 n’est pas gagnée d’avance, alors qu’après celle de 2008 nombreux ont été les analystes à promettre à Barack Obama un deuxième mandat dans un fauteuil. Sans doute la conjoncture économique est-elle très difficile, mais le Président n’est pas parvenu à incarner l’espoir qu’il avait représenté ; en raison de sa volonté de compromis, de son respect de l’adversaire républicain, même quand celui-ci ne cherche qu’à provoquer sa perte, il a déçu beaucoup d’électeurs qui l’avaient suivi quatre ans plus tôt. Toutes les enquêtes montrent que les indépendants et les jeunes qui avaient rallié cet homme extraordinaire lui reprochent désormais sa faiblesse à l’égard des banques, son refus d’attaquer de front les plus radicaux des Républicains et sa renonciation à certains de ses engagements écologiques et sociaux. La réalisation de certaines de ses promesses et ses succès internationaux (contre Ben Laden, en Libye et dans l’annonce du retrait total des troupes d’Irak avant la fin 2011), ne pèsent pas assez lourd par rapport à ces doutes grandissants.

Si cette défection se confirme, l’abstention électorale augmentera et les groupes d’électeurs les plus déterminés pourront mieux se faire entendre ; ce qui est le cas des Tea Party. Il faudra à Barack Obama et aux Démocrates une puissante détermination et une solide organisation pour que les citoyens qui croient encore en eux aillent voter et se mobilisent. Le concurrent républicain ne sera sans doute pas d’une grande envergure, mais le Président devra sortir le grand jeu pour effectuer un second mandat.


[1] Pierre Rosanvallon, « Pour une société des égaux », Les débats de l’Obs, Le Nouvel Observateur, 1er septembre 2011, p. 85. Voir aussi son livre au Seuil.

Quitter la version mobile