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Dilma Rousseff face au procès de la corruption sous Lula

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Jeudi 2 août. Dans le box des accusés de la Cour suprême de Brasilia, 38 accusés. L’accusation est lourde : malversations, corruption passive et active, blanchiment d’argent au Brésil et à l’étranger. Pour le procureur, le « chef de l’organisation criminelle » n’est autre que l’ancien Ministre et Chef de cabinet du président Lula, José Dirceu. A ses côtés, des figures du Parti des travailleurs. Ce procès pourrait devenir le procès d’un système et jeter un voile sur une présidence pourtant tant célébrée au Brésil, comme à l’étranger.

Retour sur les faits

Nous sommes en juin 2005. Roberto Jefferson est député et président du Parti travailliste brésilien, mouvement centriste allié à Lula au sein de la coalition gouvernementale. Excédé par des manœuvres qu’il attribue à José Dirceu, il dénonce les pots-de-vin versés par le PT à des élus de la majorité, du Parti libéral du vice-président José Alencar ou du Parti progressiste, contre leur soutien au Congrès. L’expression qu’il utilise est sibylline pour décrire ces versements répétés : « mensalao » ou grosse mensualité.

S’en suit une véritable tempête. Les médias se déchaînent, aux anges de prendre en faute les « chevaliers blancs » – ou rouges -, les donneurs de leçons du PT. Une enquête est ouverte par la police fédérale et le Congrès s’en mêle. Des mois durant, les révélations font la « Une » de la presse et des journaux télévisés.

Double comptabilité et comptes de campagne

Le président Lula commence par nier. Il tente ensuite de minimiser l’affaire, assurant que tous les partis font de même, obligés d’avoir une double comptabilité pour financer leurs campagnes – et, en particulier, la campagne victorieuse de 2002.

Pour accéder au pouvoir, le PT et ses alliés avaient accumulé des dettes considérables. Pour trouver les fonds, les entreprises publiques et les budgets de communication de l’Etat avaient été mis à contribution. Un opérateur se charge des transactions. L’argent transite par la Banque rurale pour échapper au contrôle de la Banque centrale et un responsable du PT, Duda Mendonça, se fait rembourser sur des comptes offshore.

Un tournant pour Lula et le PT

Le président Lula avait fini par accepter de limoger José Dirceu, remplacé à la tête du gouvernement par Dilma Rousseff, alors inconnue du grand public. Pour éviter d’avoir leur mandat de député cassé, plusieurs élus démissionnent. Roberto Jefferson et José Dirceu subissent la sanction de la Chambre et resteront privés de droits politiques jusqu’en 2015, en attendant le verdict de la justice.

Le PT est ébranlé. Ses bases religieuses, catholiques comme protestantes, supportent mal le scandale. Les plus militants tombent des nues en réalisant que le PT est devenu un parti comme les autres, prêt à toutes les combines pour accéder au pouvoir et le conserver. Le « mensalao » – comme est connu ce scandale – reste un tournant dans l’histoire du PT.

Un bouc-émissaire tout trouvé

La stratégie de défense du PT consiste à faire tout reposer sur le trésorier Delubio Soares, un homme sans envergure politique, qui a accepté de porter le chapeau par loyauté envers ses camarades. Il sillonne le pays, sa défense écrite sous le bras, qu’il dédicace à des auditoires réduits mais inconditionnels.

L’habile stratégie de Dilma Rousseff

Dilma Rousseff doit au « mensalao » sa fulgurante ascension politique. Maintenant encore, elle gère très bien cette situation potentiellement dommageable pour sa propre présidence. Si certains syndicalistes du PT n’hésitent pas à appeler les Brésiliens à descendre dans la rue pour soutenir les accusés, la présidente Dilma Rousseff n’a pas hésité à trancher dans le vif à chaque indélicatesse. Elle s’est déjà séparée de six ministres depuis son investiture, en janvier 2011.

Une leçon pourtant qui n’a pas été apprise par la gauche au pouvoir… Lula comme Dilma Rousseff n’ont pas hésité à s’allier à des partis sans foi ni loi, sans identité ni programme pour se garantir des majorités au Congrès. A l’approche des élections municipales d’octobre, l’opportunisme a, de nouveau, le vent en poupe.

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