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La rentrée décidera-t-elle du sort de la Grèce?

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Un mois de torpeur des marchés ont donné un peu de répit aux dirigeants européens, bien cachés dans les résidences d’été des Alpes ou de Méditerranée. Mais les vacances sont bel et bien finies et la crise de la zone euro reprend son assaut.

Valses diplomatiques pour sauver l’euro

Les semaines qui vont suivre s’avéreront cruciales pour la survie de la monnaie unique. De nombreuses réunions sont organisées et le spectre de la sortie de la Grèce de la zone euro, et de ses conséquences catastrophiques pour toute l’Union européenne, se rapprochent dangereusement.

Le président François Hollande est à Berlin, jeudi 23 août. Il est attendu par la chancelière Angela Merkel où il devrait plaider en faveur d’un adoucissement des conditions de sauvetage de la Grèce afin de promouvoir une relance de la croissance.

François Hollande est très impliqué dans ces discussions désormais connues sous le nom de Grexit. Il fait partie de ces nombreux dirigeants politiques qui redoutent un effet domino parmi les autres membres en difficultés de la zone euro, ce qui saperait tout le travail effectué pour une plus grande unité politique de l’Europe. Les officiels français affirment en ce sens que l’économie allemande serait la plus durement touchée si la zone euro venait à se dissoudre.

Les négociations de la dernière chance de la Grèce

Le Premier ministre grec Antonis Samaras est attendu à Berlin vendredi 24 août. Il devrait tenter de convaincre Angela Merkel de la capacité de son gouvernement à réaliser plus de 13 milliards de dollars de réductions de dépenses au cours des deux prochaines années. En retour, il devrait demander un allongement de deux années supplémentaires pour le remboursement de sa dette ainsi qu’un assouplissement des taux d’intérêts qui lui sont imposés. Immédiatement après, Antonis Samaras devrait s’envoler pour Paris afin de rencontrer François Hollande.

Antonis Samaras a déjà rencontré le président de l’Eurogroupe Jean-Claude Juncker, mercredi 22 août. Après cet entretien, le Premier ministre grec s’est exprimé pour le journal allemand Bild et a affirmé que la Grèce avait besoin de plus de « marge de manœuvre » pour réduire ses dépenses, affirmant également que le pays ne demanderait pas de fonds supplémentaires.

La question immédiate est de savoir si la Grèce en a assez fait pour recevoir sa prochaine tranche de prêt de 39 milliards d’euros, sans laquelle le pays pourrait faire faillite. Antonis Samaras devrait soutenir que les élections du mois de juin dernier, qui l’ont porté au pouvoir, ont forcé le gouvernement à perdre du temps sur les réformes à mettre en œuvre.

La BCE doit-elle intervenir ?

D’autres réunions devraient être organisées la semaine prochaine. Le Premier ministre italien Mario Monti rencontrera individuellement les dirigeants français et allemands avant que la chancelière allemande s’entretienne avec le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy, qui doit également décider s’il demandera, ou non, une aide d’urgence pour maintenir son économie à flot.

Malgré l’importante pression qui pèse sur eux, les dirigeants européens s’accordent pour maintenir un front uni. « L’Euro est l’élément central de l’intégration européenne, » a estimé Mario Monti lors d’un discours. « Ce serait une tragédie si, à cause de notre incapacité en tant que chefs d’Etat, cela devenait un facteur de perturbation qui ravive les préjugés du nord contre le sud et vice versa. »

Cette chorégraphie diplomatique devrait se terminer le 6 septembre prochain à l’occasion d’une réunion de la Banque centrale européenne, qui devrait décider des moyens de mobiliser ses vastes ressources pour acheter la dette des pays en difficultés sur les marchés obligataires secondaires.

Une intervention massive de la BCE est largement considérée comme le seul moyen de garder l’Espagne et éventuellement l’Italie si les investisseurs continuent d’exiger des taux d’intérêts toujours plus importants sur leurs obligations. Les espoirs d’une action rapide de la Banque ont permis un abaissement des coûts d’emprunt de la Banque depuis ces derniers jours.

La Grèce sera le sacrifice donné en exemple pour la zone euro

Cependant, de nombreux Allemands restent encore opposés à un soutien de la BCE, même si les pays qui bénéficieraient d’une aide devraient se soumettre à des conditions très strictes, notamment l’examen approfondi de leur budget à Bruxelles.

Certaines personnalités influentes en Allemagne, notamment les dirigeants de la Banque centrale et les politiciens de la coalition du gouvernement d’Angela Merkel voient la perspective des dépenses illimitées de la Banque centrale comme une menace pour la stabilité monétaire et un sauvetage injuste des dépensiers pays du sud par les vertueuses économies du nord.

Ces idées ont d’ailleurs soulevé de nombreuses peurs inverses, celles d’un éventuel sacrifice de la Grèce qui viserait à apaiser les plus durs des Allemands, et leurs alliés autrichiens, finlandais et néerlandais, dans une tentative de sauvetage du reste de la zone euro.

« La Grèce devrait partir avant la fin de l’année, » estime Markus Soeder, le ministre des Finances de la Bavière, le deuxième plus grand Etat d’Allemagne, pour le journal Bild. « Toute nouvelle mesure d’exonération, tout assouplissement des restrictions serait une erreur. Athènes doit servir d’exemple. »

Tous les pays se préparent dans le secret

Alors que la sortie de la Grèce de la zone euro était un sujet tabou pour les hommes politiques, il est désormais devenu un sujet de conversation ordinaire.

Le Premier ministre luxembourgeois et un haut responsable allemand de la BCE ont récemment affirmé qu’une sortie de la Grèce serait « gérable, » et le ministre allemand de l’Economie a expliqué le mois dernier que la menace grecque avait « perdu de son horreur ».

Lundi 20 août, le ministre finlandais des Finances a admis lors d’une interview pour la BBC ce qu’ils étaient de nombreux à suspecter : les pays de la zone euro préparent tous des plans d’urgence informels en cas de sortie grecque.

Bien que les ministres du gouvernement fédéral d’Angela Merkel aient tenté de calmer ces polémiques, eux aussi, sont inquiets au sujet de la réelle utilité de l’argent envoyé en Grèce.

Toutefois, les partenaires de l’Allemagne vont chercher à persuader Berlin lors des prochaines réunions, que garder l’euro intact n’est pas un acte de charité mais bel et bien un intérêt vital.

Si l’Allemagne ne survivait pas à l’éclatement de la zone euro

Les pertes allemandes, conséquences d’un éclatement de la zone euro pourraient s’élever à plusieurs milliards d’euro, près de 35% du PIB national, selon une analyse publiée la semaine dernière par la banque ING intitulée « La réparation est beaucoup moins chère que la chute ».

Cet éclatement pourrait également compromettre très gravement les exportations de l’Allemagne, un élément qui effraie l’Allemagne.

Les ventes de l’Allemagne aux pays de la zone euro représentent 40% des exportations du pays.

France et Italie ont toutes deux acheté pour près de 200 milliards de dollars de produits allemands l’an dernier, plus que les Etats-Unis et la Chine réunis. Si la zone euro s’effondre, l’Allemagne serait emprisonnée dans une monnaie trop forte par rapport à celle de ses partenaires commerciaux européens, rendant ses produits trop chers et pas assez compétitifs.

Un rapport plus ancien de la banque ING a estimé que la fin de la zone euro pèserait sur 7% de la production économique de l’Allemagne pendant la première année.

Bien que le bras de fer entre les deux principaux côtés du débat semblent insoluble, les Allemands ont déjà eu de nombreuses discussions et fait de grandes concessions avant d’entamer ces cruciales réunions. Le sort de l’Euro pourrait bien être joué lors de ces prochains rounds.

Global Post / Adaptation Sybille de Larocque – JOL Press

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