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Pakistan: 11 ans, handicapée et menacée de peine de mort

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La communauté internationale est sous le choc devant la triste histoire de Rimsha Masih. Cette jeune Pakistanaise de 11 ans est actuellement emprisonnée pour avoir brûlé quelques pages d’un manuel d’initiation au Coran, « Noorani Qaida ».

Peine de mort pour une fillette trisomique

Illettrée et atteinte de trisomie 21, la jeune fille, originaire d’un quartier pauvre d’Islamabad risque désormais la peine de mort pour blasphème.

L’affaire se déroule le 16 août dernier, dans un contexte politico-religieux très tendu au Pakistan. Dans le quartier de Mehrabad, dans la capitale, chrétiens et musulmans ont cohabité dans la paix jusqu’à ce que des tensions apparaissent entre les deux communautés.

Ayant eu connaissance du geste de Rimsha Masih, la communauté musulmane, emmenée par les imams du quartier, se sont immédiatement soulevés contre la fillette et toute la communauté chrétienne.

Averti par des Chrétiens du quartier, le ministre des Minorités se met immédiatement en contact avec les autorités religieuses d’Islamabad pour les convaincre de ne pas appeler à la violence. Mission accomplie pour le ministre, bien que de nombreuses familles chrétiennes n’aient pas attendu un éventuel retour au calme pour fuir leur quartier.

L’affaire est désormais devant la Justice et la petite Rimsha Masih, malgré son âge et son handicap, doit faire face à la loi du blasphème. Une loi pakistanaise antique qui condamne tout blasphème par la peine de mort.

La communauté internationale s’indigne

Alors que le verdict approche, la communauté internationale se mobilise en faveur de la libération de la fillette. Depuis Washington, la Conseil des relations américano-islamiques a condamné « l’arrestation d’une personne si jeune, surtout si elle est handicapée mentale, » qui « constitue une violation grave des principes fondamentaux de l’islam ».

La France s’est également prononcée sur le sujet, par l’intermédiaire du ministère des Affaires étrangères qui exhorte le Pakistan à respecter le Pacte international relatif aux droits civils et politiques qu’il a ratifié en 2010. « L’existence même du délit de blasphème porte atteinte aux libertés fondamentales, que sont la liberté de religion ou de conviction, ainsi que la liberté d’expression. »

Pour l’ONG Amnesty International, l’affaire Rimsha Masih constitue une véritable aggravation de « l’érosion de l’état de droit ».

Une commission devrait étudier l’âge exact de la fillette

Lundi 27 août, par l’intermédiaire de son avocat Tahrir Naveed Chaudhry, la All Pakistan Minorities Alliance (APMA), a fait une demande de remise en liberté de la fillette devant le tribunal de première instance d’Islamabad.

L’audience est fixée pour le mardi 28 août et l’affaire risque de soulever les passions.

Pour commencer, une commission médicale a été créée afin d’établir l’âge exact de la fillette. Si son entourage affirme que Rimsha Masih est âgée de 11 ans, de nombreux islamistes radicaux affirment qu’elle serait âgée de 16 ans.

La commission sera également chargée de déterminer si la jeune fille est vraiment atteinte de trisomie 21.

La loi sur le blasphème crée la polémique

La loi sur le blasphème est très décriée au Pakistan. Si les dirigeants politiques et la population sont de plus en plus nombreux à la condamner et à vouloir son abolition pure et simple, le gouvernement craint de provoquer une véritable vague de contestation parmi la population islamiste du pays.

Le contexte politique ne porte pas à la réforme. Dans six mois, des élections législatives doivent être organisées et aucun dirigeant politique n’oserait aborder un sujet si sensible en pleine période électorale.

Rimsha Masih, incarcérée dans un institut de peine pour mineurs à Islamabad, est désormais dans l’attente de son jugement. Elle rejoint déjà la longue liste des chrétiens persécutés au Pakistan.

L’affaire de Rimsha Masih rappelle l’histoire d’Asia Bibi, cette mère chrétienne de cinq enfants, condamnée à mort pour avoir bu un verre d’eau dans un puits réservé aux musulmans. Incarcérée dans la prison de Sheikhupura, dans la province du Penjab, elle attend désormais son procès en appel qui devrait se tenir d’ici à deux ans.

Dixième pays le plus anti-chrétien du monde

Le Pakistan, peuplé par 5 300 000 chrétiens (près de 3% de la population) est classé au dixième rang de l’Index mondial de persécution de l’ONG Portes Ouvertes.

Selon les constats de l’ONG, « des groupes d’extrémistes continuent d’inciter la population à la haine envers les chrétiens, notamment par le biais des enseignements dispensés dans les mosquées, […] Les chrétiens sont discriminés dans tous les domaines de leur vie quotidienne. »

L’ONG affirme encore dans son rapport, « 30 chrétiens ont été assassinés pour leur foi entre novembre 2009 et octobre 2010. Quatre ont été condamnés pour blasphème. Au moins 21 ont été jetés en prison, 58 ont été enlevés et plus de cent ont été agressés. Il y a eu 14 cas de destruction d’églises et autres biens. »

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