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Alain Fouché: «Mieux vaut des emplois aidés que financer l’oisiveté»

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[image:1,l] À l’occasion de la rentrée parlementaire, mardi 11 septembre, JOL Press a souhaité donner la parole au sénateur de la Vienne, Alain Fouché. Membre du groupe UMP, il évoque le programme des travaux du Sénat dans les semaines à venir. Entretien.

JOL Press : Monsieur le Sénateur, dans quel état d’esprit abordez-vous cette rentrée parlementaire ?

Alain Fouché, sénateur UMP de la Vienne : J’aborde cette rentrée sénatoriale et, d’abord, la session extraordinaire, avec quelques craintes. Il me semble que les Français ont ressenti un espoir, l’espoir que l’emploi reparte. Et, désormais, je ressens chez eux une inquiétude croissante et réelle.

JOL Press : Comment avez-vous jugé la prestation du président de la République, interrogé par Claire Chazal dans le journal de 20 heures de TF1 dimanche soir ?

Alain Fouché : Je l’ai trouvée moyenne, un peu floue. Certes, il s’est efforcé d’être rassurant. Oui, il a été ferme sur une ou deux positions. Mais, à la fin de l’émission, on ne sait pas véritablement comment il entend procéder concrètement pour éviter à la France une dégradation de sa situation et établir les conditions d’une sortie de crise, ce « redressement » qu’il a martelé pendant trente minutes.

La formation, une priorité pour l’emploi

JOL Press : Y a-t-il un point que vous jugiez prioritaire et que François Hollande n’a pas abordé ?

Alain Fouché : Il y a effectivement une question qui est, à mes yeux, prioritaire, c’est celle de la formation. Notre pays, notre économie souffrent d’une inadéquation entre les besoins des entreprises et les compétences des demandeurs d’emploi. La politique de formation – initiale et professionnelle – est trop mal adaptée pour permettre de pourvoir les emplois disponibles. Avec un effort en la matière, il y a au moins 100 000 emplois en France qui pourraient ainsi être créés. Et je le vois, personnellement, dans mon département de la Vienne.

De l’importance de la mixité sociale

JOL Press : Deux textes à l’ordre du jour du Sénat en cette session extraordinaire, et d’abord, celui sur le logement social et la mobilisation du foncier public. Qu’en pensez-vous ?

Alain Fouché : Je déterminerai mon vote en fonction des réponses que le gouvernement, par la voix de Madame la ministre du Logement, Cécile Duflot, nous aura apportées…

Certaines communes ne respectent pas volontairement les quotas de logements sociaux, il faut les sanctionner. Si leur position est volontaire et assumée, si ces élus préfèrent payer, ils doivent payer plus…    

En revanche, il y a des maires qui ont été récemment élus – et ont hérité de situations difficiles – ou encore des maires qui ne disposent sur leurs communes des ressources foncières nécessaires à un rattrapage, permettant le respect des quotas, alors ils ne méritent pas d’être punis, et à travers eux, leurs concitoyens.

Ensuite, il faut veiller à la mixité sociale – assurer la meilleure ventilation entre les différents types de logement. Et puis, nous devons permettre à des locataires des offices HLM d’accéder à la propriété. Ce texte doit le permettre.

JOL Press : Et sur la définition du foncier public ?

 Alain Fouché : La dotation de terrains par les entreprises publiques soulève un certain nombre de questions techniques. Il faut veiller aux conséquences sur l’endettement de ces entreprises.

Ensuite, il ne faut pas limiter cette possibilité aux entreprises publiques mais l’élargir à l’État lui-même, et notamment aux ministères régaliens. Trop de maires ont des casernes sur leur territoire et éprouvent bien des difficultés lors de la transmission de ces richesses foncières.

Emplois d’avenir : « Mieux vaut payer les jeunes à travailler »

JOL Press : Deuxième projet à l’ordre du jour de la session extraordinaire, les « emplois d’avenir ». Vous venez de rendre publique votre position sur ce texte…

Alain Fouché : Je voterai ce texte car j’estime que, s’il ne résout pas tous les problèmes d’emploi auxquels sont confrontés les jeunes, s’il ne règle pas tout, il va dans la bonne direction. Certes, ces contrats arriveront à échéance au bout de trois ans – et seule une partie d’entre eux seront pérennisés. Mais c’est tout de même bon à prendre. Ce texte et ses dispositions peuvent permettre d’encourager l’insertion ou la réinsertion sur le marché du travail. Mieux vaut payer les jeunes à travailler que de subventionner l’oisiveté.

« Si une disposition va dans le bon sens, je la voterai »

JOL Press : Au Sénat, le gouvernement a une majorité étroite et pourrait se retrouver minoritaire sur certains textes. Envisageriez-vous de voler à son secours le cas échéant, lors du vote sur le Pacte budgétaire européen, par exemple, au cours de la session ordinaire en octobre ?

Alain Fouché : Ma démarche n’est pas strictement partisane. Sur le traité européen, mon opinion n’est pas encore définitivement faite. Ce n’est pas une question de contribuer à une majorité ou pas. J’ai encore un certain nombre d’interrogations, notamment sur les transferts de souveraineté induits par cet accord. Je me déterminerai en fonction des arguments qui seront avancés par les uns et les autres.

Je siège dans les rangs de l’opposition – depuis septembre 2011 – mais, si j’estime qu’une disposition va dans le bon sens, je ne m’interdis pas de la voter.

JOL Press : C’est un état d’esprit répandu au sein du groupe UMP au Sénat ?

Alain Fouché : Mes collègues ne sont pas forcément dans le même état d’esprit. Il n’y a pas encore en France de tradition de recherche du consensus sur des questions d’intérêt supérieur.

« Le gouvernement doit veiller à respecter le Parlement »

JOL Press : Au-delà, aux termes de cette première journée de séance, quelle est l’atmosphère au Sénat en ce retour de vacances ?

Alain Fouché : Les relations avec le président du Sénat, Jean-Pierre Bel, sont bonnes. C’est un homme de consensus, apaisé.

Aujourd’hui, la séance a été un peu houleuse, les échanges ont été un peu virulents. C’est la faute du gouvernement qui s’est un peu exonéré des procédures parlementaires habituelles. Le texte sur les emplois d’avenir n’a été adopté qu’il y a quelques jours en Conseil des ministres et les commissions n’ont pu se réunir que ce mardi matin. Nous n’avons eu le compte-rendu des travaux en commission qu’en début d’après-midi quelques instants avant la séance. Ce n’est pas acceptable.

On peut comprendre que le gouvernement souhaite aller vite et bouscule un peu les coutumes – cela s’est déjà produit –, mais il doit toujours respecter le Parlement, toujours. Cela ne se discute pas.

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Alain Fouché est devenu sénateur du département de la Vienne le 7 juin 2002, en remplacement de Jean-Pierre Raffarin. Réélu en septembre 2004, il siège sur les bancs de l’Union pour un mouvement populaire (UMP). Ancien président du Conseil général de la Vienne, il en reste aujourd’hui un des vice-présidents. De profession, il est avocat à la Cour d’appel.

Propos recueillis par Franck Guillory pour JOL Press

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