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«En 2008, les Américains ont cru qu’ils élisaient un prophète»

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Obama n’a réalisé son programme que partiellement. Il n’a pas mis un terme à la crise économique, financière et sociale. Les États-Unis n’ont toujours pas retrouvé le chemin de la croissance et du plein-emploi. La réforme du système de santé, votée après d’interminables débats, n’est pas encore appliquée et ne le sera peut-être jamais. L’opinion publique est profondément divisée. Dans le domaine de la politique étrangère, quelques succès spectaculaires, comme l’exécution d’Oussama Ben Laden, dissimulent bien des échecs, complets ou partiels.

En Irak comme en Afghanistan, face à l’Iran ou dans le conflit israélo-palestinien, les États-Unis n’ont pas obtenu les succès qu’ils espéraient. En Asie, la Chine est à la fois un rival coriace et un partenaire inévitable. Dans le monde d’aujourd’hui, les États-Unis ne sont pas plus forts ni plus influents.

Les explications ne manquent pas. La conjoncture a-t-elle été trop défavorable ? L’Amérique est-elle inexorablement confrontée à son déclin ? Les promesses étaient-elles inconsidérées ? La personnalité d’Obama, si difficile à cerner, est-elle, tout compte fait, moins exceptionnelle qu’on l’a cru ?

Les électeurs américains trancheront en novembre 2012. Ils compareront les promesses du candidat républicain avec le bilan du président sortant. En toute sérénité, en connaissance de cause, ils accorderont ou refuseront un second mandat à Barack Obama.

Extraits de « Barack Obama, la grande désillusion », d’André Kaspi

Bien des Américains ont cru qu’ils élisaient un prophète et découvrent que Barack Obama est un homme normal, avec ses qualités et ses défauts, encore qu’il soit impossible d’être à la fois le président des États-Unis et un homme normal. Il hésite, tombe dans les contradictions, ne parvient pas toujours à mettre en valeur ses réussites ni à dissimuler ses échecs. Lorsque l’inexpérience cède la place à une meilleure connaissance des milieux et des procédures, le Président devient encore plus prudent – certains diront : plus timoré. Il croyait rassembler et constate que les divisions sont toujours profondes. Il souhaitait créer un consensus qui unirait républicains et démocrates. C’est l’inverse qui s’est produit. Le rassemblement et le consensus sont des mirages. Celui que l’on prenait pour un magicien ne fait pas de miracles. Il est pragmatique, tâche de se placer au-delà des idéologies partisanes, tente de rejeter dans le passé le racisme et les divisions de la société américaine.

Il nourrit l’ambition d’être le conciliateur, le médecin des âmes et des cœurs – une ambition excessive. Il ne peut pas éviter d’assumer l’héritage de son prédécesseur.

Il lui revient de mettre un terme à deux guerres dont les États-Unis ne savent pas comment sortir, à des problèmes internationaux souvent insolubles, à des déficits qui donnent le tournis, à une crise immobilière, financière, économique et sociale. Que de handicaps à surmonter ! Et sa liberté de manœuvre est limitée. Quelle politique fiscale choisir ? La réduction des déficits est prioritaire, mais encore faut-il décider si ce sera en limitant les dépenses sociales ou en augmentant les impôts sur les plus riches.

Comment réduire le chômage ? Quelle sera la vigueur de la reprise économique ? Dépend-elle des seuls États-Unis ou bien de la bonne santé des économies européennes et asiatiques ? Un jour ou l’autre, il faudra choisir. L’indécision ne peut pas servir de fondement à une politique, qu’elle soit fiscale, économique ou étrangère. Lorsqu’elle se prolonge, elle contribue à susciter la désillusion, le mécontentement, voire la protestation. Il arrive que les esprits bienveillants ne se contentent plus du pragmatisme.

Dans quelques semaines, les Américains désigneront leur Président. Ils accorderont ou non un second mandat à Barack Obama. Son adversaire républicain, Mitt Romney, n’est pas dépourvu de faiblesses et de contradictions. En outre, il s’appuie sur un parti républicain divisé, affaibli par l’influence du Tea Party. À la différence de 2008, les Américains savent en 2012 qui est Obama, ce qu’il est capable de faire, ce que sont ses méthodes de travail. Ils trancheront en connaissance de cause. Le temps des incertitudes et des illusions est passé.

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