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Entre la Chine et le Japon, un siècle d’affrontements

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Ces petites îles coincées entre Taiwan, la Chine et le Japon, attisent bien des tensions depuis que le Japon a créé un coup d’éclat en les achetant à des particuliers.

Pourquoi vouloir les îles Senkaku/Diaoyu ?

La tension monte et certains craignent même que les deux pays en viennent aux armes. Ces petits îlots, appelés Senkaku par les Japonais et Diaoyu par les Chinois, n’ont pourtant pas une valeur si importante.

Certes, leurs eaux sont très poissonneuses et il se pourrait que leur sous-sol soit riche en hydrocarbures, mais l’enjeu vaut-il vraiment ces milliers de manifestants chinois dans les rues, ces ambassadeurs rappelés et ces Japonais molestés ?

C’est que l’enjeu n’est justement pas uniquement économique ni uniquement territorial. Sur ces petits bouts de terre perdus dans le Pacifique, c’est l’orgueil de chaque nation qui est en jeu. Un orgueil chinois mis à mal par de nombreuses années de guerre au XXème siècle et un orgueil japonais qui endure une Chine dont la montée en puissance ne fait que donner de plus en plus d’ombre au Japon.

Tout commence en 1894

Il faut dire que le passé à rebondissements des relations sino-japonaises a laissé le temps aux deux peuples de cultiver un orgueil patriotique qui n’attendait qu’un prétexte pour se réveiller. Le prétexte attendu est arrivé, et plus d’un siècle après le début de la première guerre sino-japonaise, en 1894, les deux pays seraient-ils en train de reprendre le chemin des armes ?

Comme aujourd’hui, le conflit qui a opposé la Chine au Japon en 1894 durant deux ans a démarré en territoire étranger. À l’époque, la Chine exerce un protectorat sur la Corée. Face à cet état de fait, le Japon accuse les Chinois de profiter de leur situation et quelques conflits éclatent. En 1885, parvenus à un consensus, Chinois et Japonais signent la convention de Tien-Tsin par laquelle ils s’engagent à ne plus mener de politique d’ingérence en Corée.

Mais neuf ans plus tard, les Chinois sont appelés à l’aide par la Corée qui souhaite régler un malheureux problème de révolte paysanne sur son territoire. La Chine intervient, et le Japon, qui n’a pourtant pas été appelé, envoie également 18 000 hommes. Le conflit éclate alors, il durera deux ans et se terminera par la victoire du Japon et le traité de Shimonoseki, signé le 17 avril 1895.

La politique expansionniste du Japon au détriment de la Chine

Les années passent, les tensions demeurent, les orgueils persistent. Près de quarante ans plus tard, nous sommes en 1931, le Japon rêve d’une politique expansionniste. Le 18 septembre de cette année-là, une explosion détruit une ligne de chemin de fer appartenant à la société japonaise Chemins de fer de Mandchourie. L’incident, dont les auteurs, Chinois ou Japonais, n’ont jamais été clairement identifiés, sert de prétexte au Japon pour envahir la Mandchourie. Le gouvernement japonais s’approprie le territoire et fonde l’État Mandchoukouo.

Pendant six ans, la Mandchourie reste japonaise, mais un nouvel incident vient changer le cours des évènements. Le 7 juillet 1937, des troupes japonaises s’entrainent près de Pékin, lorsqu’un soldat, selon la version japonaise des faits, est enlevé. Le soldat en question reviendra deux heures après, mais en attendant, un nouveau prétexte est né.

Explosion d’orgueils patriotiques

À la suite de cet évènement, le Japon envahit la Chine avec l’espoir de s’approprier le territoire en trois mois. La guerre durera pourtant huit ans. Huit années qui mettront temporairement fin à la guerre civile chinoise et qui seront entrecoupées par la Seconde Guerre mondiale.

En 1945, lorsque le Japon signe sa reddition, les deux pays sont affaiblis, fatigués. Ils mettront plusieurs années à se remettre de ces évènements. La Chine, en concluant une révolution industrielle fulgurante, le Japon en devenant un îlot de richesse.

Pourtant, l’argent n’a pas effacé les frustrations et l’histoire des deux pays est toujours brûlante dans les cœurs patriotes des Chinois et des Japonais. Les contraintes contemporaines des deux pays ne font qu’ajouter à la volonté de ne pas céder de part et d’autre les îles polémiques.

Aucune des deux parties n’est prête à céder

Les provocations chinoises comme japonaises sont toutes motivées par des raisons beaucoup plus économiques et politiques que purement historiques.

La Chine, dont la croissance miraculeuse, bien qu’en perte de vitesse, fait pâlir de jalousie de nombreux vieux pays du monde, est en quête d’une reconnaissance toujours plus grande : les volontés chinoises en mers de Chine méridionale et orientale en sont le témoin.

La Japon, affaibli et en pleine reconversion énergétique voit d’un mauvais œil la puissance de son voisin chinois. D’autant plus que, si l’Armée populaire de Chine est la plus nombreuse du monde, les Japonais sont, en termes militaires, sous la coupe des États-Unis. Il est désormais petit, ce riche Japon, face à une Chine superpuissante. Et pour cette raison, l’orgueil japonais ne pourra pas céder sur la question des îles. Si personne, ni en Chine ni au Japon, n’a intérêt à en venir aux armes, personne ne pourra lâcher les îles Senkaku/Diaoyu sans avoir d’abord montré de quoi chacun était capable. Dans ce contexte, il y a fort à parier que la situation durera longtemps. 

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