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Les 32 heures, outil indispensable contre le chômage

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Selon le ministre du Travail, Michel Sapin, le seuil symbolique des 3 millions de demandeurs d’emploi sans activité était désormais franchi, ainsi que le taux de 10 % de chômeurs. Rappelons que le nombre de demandeurs d’emploi sans activité en France métropolitaine avait augmenté pour le quinzième mois consécutif en juillet dernier, de 41 300 personnes[1]. Avec l’outre-mer, 4,733 millions de demandeurs d’emploi étaient recensés pendant la même période, dont 3,232 millions sans aucune activité (catégorie A). Pour Michel Sapin, « il faut de la croissance pour pouvoir créer des emplois et ainsi lutter véritablement contre le chômage ». Le gouvernement français transmettra le 10 septembre aux partenaires sociaux un document d’orientation qui lancera la négociation sur la sécurisation de l’emploi, laquelle s’annonce difficile.

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Un objectif déterminé

Il n’y a pas de règles strictes à mettre en œuvre de la part de l’État français, pour faire de la bonne économie. Face à l’activité économique, des hommes, des individus vivants[2], il n’y a que des décisions à prendre qui ne soient en aucun cas à contre-courant à la fois de la confiance populaire et des phénomènes économiques qui secouent l’environnement extérieur. Les techniques de la pratique gouvernementale et la politique mise en œuvre n’ont pas de rationalité en soi. Elles doivent se développer avec un objectif déterminé à court ou moyen terme, c’est-à-dire la croissance dont la logique ne suit pas de lois immuables et prédéterminées. Il s’agit de savoir gouverner dans toute la logique de l’évolution cyclique de la conjoncture, de la récession et de la crise, suivie de périodes de croissance dont il faut savoir au bon moment tirer profit avec souplesse, en les accompagnant, pour mieux contrôler les fluctuations économiques.

Combattre et résorber la crise

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Combattre la crise, c’est avant tout s’en prendre au chômage et, en cette matière, des mesures draconiennes sur le temps de travail doivent d’abord être prises. Ceci est d’autant plus nécessaire qu’il est par ailleurs juste et normal, dans ces temps de modernisation technique, que les salariés profitent à leur tour des avancées de la productivité – dues à l’automatisation, à la robotisation ainsi qu’à l’informatisation – et puissent bénéficier d’un temps libre important.

La loi Aubry sur les 35 heures, initiée par le gouvernement de Lionel Jospin, avait rencontré une opposition militante de la part du patronat[3] et des partis d’opposition[4]. Ainsi, l’accord signé avec l’Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM) par trois syndicats de la métallurgie avait privilégié les heures supplémentaires contre la réduction du temps de travail. La loi sur les 35 heures aurait dû être complétée par une limitation des heures supplémentaires. Cependant, n’en déplaise aux libéraux de l’UMP, la réduction du temps de travail à 32 heures serait plus profitable à l’emploi. Les négociations branche par branche, ou par entreprise, pourraient le permettre. Les études menées depuis longtemps à l’institut Max Plank, à Dortmund en Allemagne, ont montré que la productivité s’améliore avec la réduction de la durée journalière du temps de travail.

En effet, pour Maurice Rustant, « une réduction de la durée hebdomadaire se traduisant par une réduction journalière du temps de travail n’entraînerait pas une réduction proportionnelle de la production, en raison de la meilleure productivité des heures effectuées, d’une réduction de la fatigue et d’une diminution de l’absentéisme ». La réduction du temps de travail en 1983 de 40 à 39 heures par le gouvernement socialiste n’avait généré aucune création d’emploi sensible. De plus, l’ensemble des salariés s’était contenté de travailler mieux en 39 heures, afin de faire le travail de 40 heures. La réduction de la production engendrée par celle du temps de travail n’étant donc pas proportionnelle à la réduction des horaires, une certaine compensation ne peut que s’opérer. Cette compensation est estimée aujourd’hui à près de 50 % à 32 heures, c’est-à-dire que pour une diminution d’un point de la durée du travail, la baisse de la production n’est que de 0,5 point, en raison de l’amélioration de la productivité des heures effectuées, et des efforts parallèles de la rationalisation et de l’organisation qui en découlent.

La réduction du temps de travail global

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Mais, selon Maurice Rustant, « en cas de réduction de la durée du travail, la perte de production est plus forte pour les petites entreprises que pour les grandes, parce que celles-ci peuvent plus facilement embaucher du personnel, mettre en service des équipements nouveaux et réorganiser ». Au lieu de licencier les travailleurs par dizaines de milliers, il est nécessaire que les moyennes et grandes entreprises apprennent à réduire leur temps de travail global, au fur et à mesure qu’elles améliorent leur productivité. Cette réduction du temps de travail doit-elle s’accompagner d’une réduction proportionnelle des salaires ? Il est évident que non. C’est en effet l’augmentation de la productivité qui permet de réduire les effectifs dans les entreprises. En conséquence, la réorganisation de la production par une rotation des équipements tournant plus longtemps que le temps de travail légal du personnel doit permettre non seulement de produire plus, mais de faire face au surcoût dû au maintien des salaires, tout en embauchant. En tout cas, les spécialistes sont unanimes sur le fait que la loi sur les 35 heures était presque trois fois inefficace. En revanche, une loi sur les 32 heures devra être soit négociée tout de suite, si les syndicats sont assez forts pour atteindre cet objectif, soit officialisée par une loi malgré l’hostilité du patronat.

Une croissance forte

La réduction du temps de travail par l’adoption de la semaine de 4 jours pour le personnel des moyennes et grandes entreprises reste l’un des meilleurs moyens immédiats de réduire le chômage, tout en améliorant la productivité. Mais il faut une croissance forte pour éradiquer le chômage. Une croissance régulière dans l’avenir ne sera tirée en France que par la consommation, les investissements et les exportations, surtout dans l’Union européenne. Ainsi, la production industrielle pourrait redémarrer, plus précisément dans les biens intermédiaires. De plus, les entreprises qui, grâce aux gouvernements libéraux antérieurs, disposent désormais de capacités de financement jamais vues, devraient reconstituer leurs stocks. Si on la dope réellement, la croissance peut devenir importante dans les années qui viennent. Et, bien sûr, si elle redémarre autant, les revendications salariales pourront repartir aussi, une plus grande augmentation du SMIC pourra être prévue.

Documentation

La synergie franco-européenne face à la crise ;

La mission « historique » des socialistes.


[1] La plus forte hausse depuis plus de trois ans, pour atteindre 2,987 millions de personnes.

[2] Dont l’économie n’est finalement, à un certain moment, qu’une image, un reflet.

[3] En l’occurrence le Conseil national du patronat français (CNPF).

[4] Notamment l’UDF et l’UMP.

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