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Pourquoi la France s’obstine à toujours plus d’interventionnisme?

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Fustigeant notre modèle national (mais peut-on seulement parler de « modèle » français), Hans-Peter Keitel, le patron de l’industrie allemande et l’homme à la tête de la BDI, affirme qu’il est « urgent que la France change son modèle où l’interventionnisme de l’Etat reste trop important ».

L’interventionnisme français

Cette affirmation est-elle vraie ? Objectivement oui. En France, désormais, tout est attendu de l’Etat. Dernier exemple en date, pas plus tard qu’aujourd’hui, le tarif social de l’énergie qui devrait profiter à 7 fois plus de personnes. Peu importe la justice sociale. En France, force est de constater qu’il existe des aides pour tout, à tous les niveaux, bénéficiant à de plus en plus de monde au fur et à mesure des extensions et dont (et c’est le problème) le financement repose sur de moins en moins de contributeurs

Pour quels résultats ?

Résultat, des déficits chroniques à tous les niveaux, une augmentation sans fin des fiscalités et à l’arrivée moins de croissance, pas vraiment moins de misère et pas plus de justice sociale qu’ailleurs, mais une grande illusion entretenue par nos politiques de tous bords. Hans-Peter Keitel continue en disant craindre une « détérioration de ses conditions de financement, qui signifierait la fin de l’euro »

Ces derniers temps la pression commence à monter sur la France. C’est encore presque imperceptible. Nous empruntons encore à taux négatifs, mais cela ne va pas durer longtemps. De plus en plus de voix s’élèvent pour critiquer la situation financière française. Oui c’est une véritable attaque qui se profile. Oui elle sera douloureuse. Et oui elle est hélas justifiée. 

La politique du nouveau gouvernement

Je dois vous avouer que je n’aimais pas particulièrement le pouvoir précédent, ses manières et ses méthodes. J’ai donc regardé avec une certaine bienveillance les premiers pas de la nouvelle équipe. Laissons-leur un peu de temps. Observons. J’ai laissé du temps. J’ai regardé. Je n’ai rien vu venir si ce n’est qu’une succession d’augmentations d’impôts (majoritairement pour ceux qui votent à droite), une tripotée d’augmentations d’aides sociales (majoritairement pour ceux qui votent à gauche), et une envolée sans précédent du nombre de commissions d’enquête destinées à remettre à plus tard le temps d’une « concertation globale » les sujets épineux qui nécessitent des réponses. 

Maintenant. Pas demain. Maintenant. Pour le moment aucune réduction de dépenses. Si encore une fois l’austérité ne peut et ne doit pas constituer l’alpha et l’oméga d’une politique économique, les augmentations de recettes non plus. D’ailleurs augmenter les recettes, donc les impôts, est déflationniste à terme. Pourquoi investir dans l’immobilier qui sera taxé à tous les niveaux ? Les propriétaires vont bientôt devoir payer la facture énergétique de leurs locataires ? Pourquoi épargner ? Pourquoi placer son argent et prendre des risques si 50% des gains éventuels partent sous forme d’impôts forfaitaires sur les plus-values ? 

Encore une fois je suis attaché au fait de ne laisser personne au bord du chemin. Mais cela ne peut être fait que si nous sommes collectivement capables de créer de la richesse et de la croissance. Ce n’est plus le cas depuis trop longtemps. 

Continuons à être objectif

Les marchés comme les agences de notation ont eu cette même attitude de retenue. C’est bien et suffisamment rare pour être souligné. Souvenez-vous juste après les élections. Beaucoup pensaient que ce serait la catastrophe sur les taux de la dette française. En réalité quelques jours après l’arrivée du président Hollande, les taux n’ont pas explosés à la hausse, ils se sont effondrés. C’était un signe positif

Mais attention, la déception sera au niveau des espoirs déçus. La catastrophe nous guette. Ce mouvement risque d’être, non, sera de courte durée si nos politiques ne prennent pas les choses sérieusement en main. Ce n’est pas tout de dire que nous traversons une crise très grave. Encore faut-il le traduire en actes. Pour le moment rien. 

Pour Hans-Peter Keitel, « dans le modèle allemand, la croissance est obtenue dans les entreprises, tandis que demeure en France un modèle où l’on va organiser la croissance à partir de l’interventionnisme de l’Etat « et de rajouter » qu’il faut que la France change très vite d’orientation »

Si la France lâche le peloton de tête alors l’euro ne pourra survivre

Enfin pour conclure, il est impératif que la « France empêche les marchés financiers de mettre en doute la solvabilité de l’Etat français »

Car si c’était le cas, pour lui « ce serait la fin de l’euro système si la France était mise sous tension et parvenait à des conditions de refinancement comparables à ce que connaissent aujourd’hui l’Espagne et l’Italie »

Voilà l’essentiel du message de nos camarades d’outre Rhin. Si la France lâche le peloton de tête alors l’euro ne pourra survivre (et on est en droit de poser la question de savoir si d’ailleurs l’euro doit survivre). Il ne peut y avoir de projet de monnaie unique en Europe sans une France qui adhère un tant soit peu à l’approche pragmatique économique allemande. 

Un gouvernement incapable de choisir réellement une stratégie claire

Nous devons abandonner et vite le dogmatisme français dont je trouve le retour assez saisissant. Je pense que la paralysie quasiment palpable qui touche le gouvernement et notre nouveau Président est liée à un problème de fond. L’incapacité de choisir réellement une stratégie claire. Le problème est simple et ses implications énormes. Effrayantes. 

Soit la France s’aligne sur l’Allemagne et la rigueur menée par les socialistes français devra être saignante. Soit la France fait une politique socialiste. Mais cela implique de sortir de l’euro, de retrouver nos prérogatives monétaires et notre indépendance et de monétiser comme nous le souhaitons en faisant marcher notre propre planche à billets. Le gouvernement temporise pour ne pas avoir à choisir. Mais au bout il devra faire un choix. C’est aussi cela que nos amis allemands essaient de nous expliquer. 

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