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Usine PSA Rennes: l’avis de Grégoire Le Blond, maire de Chantepie

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« Nous sommes des lions, pas des moutons » : c’est un des nombreux slogans qui ont émaillé la manifestation des salariés du groupe PSA de La Janais, près de Rennes. Depuis l’annonce, cet été, de 1400 suppressions d’emplois – un quart des effectifs de l’usine bretonne -, syndicats et employés sont mobilisés. Derrière eux, c’est toute une région qui entend sauver un des fleurons de son industrie. Grégoire Le Blond est élu local. Maire de Chantepie – 11 000 habitants – et vice-président de Rennes Métropole, il est directement confronté aux conséquences sociales de cette réduction des effectifs. Secrétaire général de Force Européenne Démocrate (FED), il porte aussi un regard plus distancé sur la crise de l’industrie automobile française. Il a répondu aux questions de JOL Press.

JOL Press : 1400 emplois sont menacés à l’usine PSA de Rennes-La Janais. Comment en est-on arrivé là ?

Grégoire Le Blond, maire de Chantepie : C’est l’avenir même de l’usine qui est en jeu. Il est à craindre que les salariés de l’usine de La Janais ne fassent les frais de mauvais choix stratégiques de la part de la direction de PSA . C’est un constat très largement partagé.

La production et la vente de véhicules produits à Rennes n’a cessé de diminuer. Aujourd’hui, la production s’élève à 140 000 véhicules par an contre 400 000 dans l’usine espagnole de Vigo. En 2005, il y avait 12 500 salariés sur le site, ils ne sont plus que 5 800.

JOL Press : De quels handicaps souffre le site de Rennes pour être si peu favorisé ?

Grégoire Le Blond : Les experts ne tarissent pas d’éloges sur l’usine rennaise. La compétence des agents est largement reconnue. Le climat social y est bon. Si les salariés ont manifesté ce samedi 15 septembre, c’est qu’ils sont inquiets pour le devenir de leurs emplois.

Une des critiques le plus souvent reprise est celle de la localisation géographique. Rennes serait trop à l’ouest et donc trop éloigné du cœur de l’Europe. L’argument ne tient pas : à ma connaissance, Vigo en Galice est encore plus à l’ouest et excentrée.

JOL Press : Quel jugement portez-vous sur les conclusions du rapport Sartorius ?

Grégoire Le Blond : Ce rapport enfonce des portes-ouvertes et tout cela avait été énoncé dès le début de l’été.

Personne n’est dupe. À Aulnay, la situation est difficilement retournable. PSA a commis des erreurs en matière de compétitivité. Mais, c’est ambigu… Renault obtient de bien meilleurs résultats en termes de compétitivité mais ne produit plus que 440 000 véhicules en France – contre 1 230 000 pour Peugeot. Il y a bien une prime à la délocalisation. Ce n’est pas juste.

JOL Press : En tant que maire de Chantepie et vice-président de Rennes Métropole, vous ressentez l’inquiétude de vos administrés ?

Grégoire Le Blond : Oui, absolument. On ressent une véritable inquiétude, une angoisse forte chez les salariés mais aussi chez leurs conjoints et leurs enfants. Les gens sont désemparés.

N’oubliez pas que pour un emploi chez PSA, ce sont dix emplois sur le bassin rennais – tous ceux dont les emplois sont corrélés à PSA et qui profitent de la présence de PSA.

JOL Press : Concrètement, comment pouvez-vous intervenir en tant qu’élu local ?

Grégoire Le Blond : Je suis vice-président d’un point accueil-emploi. On observe que les gens viennent par anticipation se renseigner sur les modalités d’appui, les formalités à entreprendre, les formations possibles.

Mais il y a aussi, au niveau de la métropole, à tirer profit des atouts que constitue la présence de cette usine. Je suggère que nous créions un pôle d’excellence automobile qui inclurait tous les métiers du secteur, pas seulement des emplois d’ingénieur mais aussi les fonctions plus basiques pour que tous les profils en profitent.

Nous devons sensibiliser nos jeunes aux opportunités qu’offre ce secteur à travers des programmes de sensibilisation dans l’enseignement secondaire, technique et général. Le grand public doit aussi être sensibilisé par une valorisation forte sous forme d’actions de communication.

Et puis, il faut cesser de culpabiliser l’usager automobile. Au niveau de la métropole rennaise, nous devons signifier notre attachement au développement durable tout en acceptant que l’automobile ait toute sa place dans une vision urbaine plus ouverte sur ce point.

JOL Press : Vous restez optimiste ?

Grégoire Le Blond : Je ne considère pas que les jeux sont faits et les élus locaux doivent accompagner les familles concernées.

Et puis, il en va de notre responsabilité d’élus locaux bretons. N’oublions pas les circonstances dans lesquelles Peugeot est arrivé en Bretagne. C’était un projet de Citroën, appuyé par le CELIB, soutenu et inauguré par le Général de Gaulle en 1961. L’ambition était forte, il s’agissait de sortir la Bretagne de sa ruralité. Et l’usine PSA de Rennes-La Janais se voulait le symbôle du développement breton. Elle participe pleinement de l’identité du territoire. 

Propos recueillis par Franck Guillory pour JOL Press

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