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Avec François Hollande, les jours de la Françafrique sont-ils comptés?

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La Françafrique survivra-t-elle au mandat de François Hollande ? Le président français entame une nouvelle étape de son mandat, vendredi 12 octobre, en se rendant à Dakar, sur les traces de son prédécesseur Nicolas Sarkozy.

La Françafrique ou le néo-colonialisme déguisé

Pendant sa campagne, le candidat socialiste l’avait promis, s’il était élu, il ferait tout pour « rompre avec la Françafrique » et avec une « certaine vision paternaliste et ethnocentrée ».

Devant les parlementaires réunis à l’Assemblée nationale du Sénégal, les mots de François Hollande seront épiés et son message décrypté pour deviner les axes politiques que le nouveau gouvernement français comptera mener sur ce continent.

Plus de cinquante ans avant la fin de la colonisation française, la France entretient toujours de nombreuses relations privilégiées avec certains pays africains. Des relations qui déchaînent les passions tant les secteurs d’intervention de la France sur le continent africain sont nombreux et les enjeux de taille.

Qui sera François Hollande sur la scène africaine ?

Qu’il s’agisse d’enjeux financiers, militaires, économiques, si le président français est resté, jusqu’à présent, discret – jusqu’à hésiter à se déplacer pour le XIVème Sommet de la Francophonie qui se tiendra du 12 au 14 octobre à Kinshasa, en République démocratique du Congo – il n’en reste pas moins que la politique « françafricaine », empreinte d’un interventionnisme qui n’a cessé de se maintenir depuis l’ère du Général de Gaulle, poursuit son cours dans les bureaux de l’administration française.

En termes de diplomatie, d’économie ou de stratégie, la politique privilégiée de la France envers certains États africains a suivi les mandats présidentiels depuis la fin de la colonisation. Inspirée par la politique post-décolonisation du Général de Gaulle, la « Françafrique » s’est poursuivie sous François Mitterrand, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy.

Récemment, la France a affirmé son soutien à une intervention militaire au Nord du Mali. Dans cette région investie par trois mouvements islamistes, le gouvernement malien a demandé une intervention armée sous l’égide de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Pour préserver ses nombreux intérêts dans la région – qu’il s’agisse des ressources minières du triangle d’or (extrême Nord Mali, Nord de la Mauritanie et Sud de l’Algérie) ou de l’uranium des montagnes de l’Adrar -, la France est prête à soutenir une intervention. Elle aurait d’ailleurs été prête à intervenir directement si le gouvernement malien n’avait pas fait de la non-intervention d’une puissance non-africaine sur son territoire, une condition de son acceptation d’une action militaire.

Fin du néo-colonialisme sous François Hollande ?

Pourtant, le président français semble déterminer à incarner une rupture. Face à un Nicolas Sarkozy qui déclarait, en 2007, à Dakar, que « l’homme africain » n’était « pas assez entré dans l’histoire », François Hollande se veut novateur.

Le ministère de la Coopération a ainsi été transformé en ministère du Développement. À sa tête, un écologiste non-spécialiste des questions africaines, Pascal Canfin. Ensuite, c’est le ministère des Affaires étrangères, Laurent Fabius à sa tête, qui est chargé des questions africaines. Ainsi, les questions africaines, qui ont longtemps été l’apanage de l’Élysée, (une cellule spéciale avait la charge de travailler directement pour le président de la République avant d’être remplacée par un unique conseiller sous le mandat de Nicolas Sarkozy) sont désormais entre les mains de la diplomatie générale.

Autre signe de changement, la tête pensante des relations avec l’Afrique, au Quai d’Orsay, s’est féminisée. Désormais sous l’égide d’Hélène Le Gal et des conseillères Elisabeth Barbier et Sophie Makamé, les affaire franco-africaines devraient emprunter une nouvelle voie.

Le discours de Dakar déterminera la chute ou la survie de la Françafrique

Pourtant, sur place, la realpolitik a de grandes chances de rattraper François Hollande. Accueilli par le président sénégalais Macky Sall, à Dakar, qui a récemment succédé à Abdoulaye Wade, à l’occasion d’une transition politique sans accroc majeur, le président français pourra être tenté de miser sur une politique droit-de-l’hommiste qui, si elle félicitera la nouvelle administration sénégalaise, pourrait légèrement froisser les délégations présidentielles qui l’attendent ensuite à Kinshasa.

François Hollande pourrait ainsi imiter son prédécesseur socialiste, François Mitterrand, qui avait durement attaqué les fausses démocraties africaines lors d’un discours historique à La Baule, à l’occasion d’une réunion interprésidentielle entre les chefs d‘État africains.

Lors de ce premier voyage africain, François Hollande, qui a été durement attaqué pour son manque d’expérience sur la scène internationale durant de la campagne présidentielle, sera confronté à certains inébranlables de la scène politique africaine dont les pays ne sont pas prêts à cette transition démocratique qui a fait ses preuves au Sénégal. Un accrochage brutal ne serait pas le bienvenu.

Ainsi, la Françafrique, si elle doit disparaître du langage courant, passera par le discours de Dakar du président Hollande et par une action diplomatique concertée et délicate lors du XIVème Sommet de la Francophonie. Si « l’homme africain » n’était « pas entré dans l’histoire » pour Nicolas Sarkozy, une nouvelle page de cette histoire s’écrira-t-elle avec François Hollande ?

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