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Comment blanchir 40 millions d’euros en cinq mois?

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La police enquêtait sur cette affaire depuis février dernier. En cause, une famille qui faisait venir du cannabis du Maroc, via l’Espagne, pour le revendre en France. L’argent était ensuite confié à des Français qui avaient des comptes en Suisse, puis remise à une société financière qui payait les trafiquants espagnols et réinjectait le reste dans un réseau de blanchiment. Huit tonnes de drogue auraient ainsi été vendues au cours des cinq derniers mois pour un bénéfice de 40 millions d’euros au total. Il s’agirait de la plus importante affaire de blanchiment d’argent de la drogue réalisée par la police française.

Comment fonctionne le blanchiment d’argent ?

Le blanchiment d’argent est un mécanisme très sophistiqué qui permet de faire circuler de l’argent liquide. Il s’agit d’écouler les sommes très importantes, générées la plupart du temps par le trafic de stupéfiants, sans se faire remarquer. Le blanchiment, c’est le bénéfice du trafic de drogue, il représente 15% du chiffre d’affaires du trafic.

Dans l’affaire qui nous intéresse, une société financière genevoise est soupçonnée d’avoir blanchi l’argent du trafic par un mécanisme qui permettait de camoufler tout lien entre le trafic de drogue en France et le recyclage de son produit en Suisse.

Qui sont les acteurs de ce blanchiment ?

Les policiers de l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF) ont saisi cette semaine, environ 20 millions d’euros sous forme d’argent liquide, de lingots d’or, de montres de luxe et de propriétés immobilières. Ces biens ont été trouvés chez des clients parisiens, dont l’élue écologiste Florence Lamblin.

Dans les faits, trois frères, les El-Maleh, sont accusés d’avoir recyclé des dizaines de millions d’euros. D’origine marocaine, deux d’entre eux sont installés en Suisse : l’un est administrateur délégué d’une société financière à Genève, GPF, l’autre travaille pour la banque HSBC où la société possède un compte. Quant au troisième, installé à en région parisienne, il aurait collecté l’argent auprès des trafiquants.

Comment s’est déroulé le blanchiment ?

Ce dernier aurait aussi distribué de l’argent liquide à des Français (commerçants habitués à brasser des sommes en espèces, des entrepreneurs, des avocats, des architectes…) qui avaient des comptes non déclarés en Suisse. Grâce à de fausses factures, ils ont pu déposer ces sommes sur des comptes en France.

Une fois l’argent remis à ces personnes, la société financière GPF aurait débité le montant donné à chacun de leur compte en Suisse et placé cet argent sur un compte HSBC. Une fois cette opération accomplie, GPF aurait pu ensuite reverser l’argent aux trafiquants sous forme de biens immobiliers ou de parts dans des sociétés. Les trois frères ont été mis en examen et écroués.

Comment ignorer que ces liquidités étaient de l’argent sale ?

L’avocat de Florence Lamblin, Me Boursican, a assuré ce lundi 15 octobre sur Canal+ que sa cliente « n’était pas coupable de blanchiment d’argent » et qu’elle était « parfaitement innocente des faits qui lui sont reprochés ».

Serait-ce possible que les clients français qui ont touché des sommes importantes en liquide ignorent tout du trafic ? Pour une source judiciaire suisse, c’est en effet possible : « Quand un client demande des fonds à sa banque à Genève, ce n’est pas son argent qu’on lui apporte, mais celui de la drogue et il ne le sait pas. Son compte est ensuite débité puis l’argent passe par des comptes intermédiaires et se retrouve à Londres, d’où il est reventilé ».

Florence Lamblin aurait reçu en effet reçu de l’argent en liquide par un intermédiaire « qu’elle ne connaissait pas », mais qui lui avait été recommandé par un proche, selon une source proche du dossier. Elle a ensuite « placé cette somme dans son coffre à la banque », où elle a été retrouvée par les enquêteurs.

Me Boursican affirme que sa cliente compte rester conseillère du XIIIe arrondissement de Paris.

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