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La condamnation de Jérôme Kerviel va-t-elle être confirmée?

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Le procès en appel de Jérôme Kerviel, qui s’était ouvert le 4 juin, touche donc à sa fin. Le ministère public avait alors requis cinq ans ferme contre le trader, présenté comme un homme qui s’était « servi des failles du système » pour masquer ses prises de positions, jusqu’à 50 milliards d’euros, par des ordres fictifs censés couvrir les risques.

« Si vous deviez le condamner, il faudrait que ce soit à une chose à laquelle il pourrait survivre : ni la perpétuité financière (…) ni quoi que ce soit qui pourrait l’empêcher de retourner voir sa mère », malade, avait plaidé Me David Koubbi, son nouvel avocat, à l’ouverture du procès. Un avocat qui a souvent agacé la présidente Mireille Filippini : « Je ne voudrais pas être méchante, mais les débats nous ont montré que j’en connaissais au moins autant que vous », lui a-t-elle lancé.

Retour sur l’affaire

Jérôme Kerviel était un jeune courtier de 31 ans qui travaillait au département produits dérivés sur action de la Société Générale. En 2008, l’Inspection des risques de la banque relève des anomalies dans les opérations du trader qui prendrait des risques inconsidérés. Si Jérôme Kerviel a fait gagner beaucoup d’argent à la banque (plus d’1,4 milliard en 2007), en quelques jours, il a engagé la Société Générale à hauteur de 50 milliards d’euros, soit une fois et demi le montant des fonds propres de la banque.

Le jeune trader est donc convoqué par la direction et le PDG de la banque, Daniel Bouton, décide de vendre au plus vite le portefeuille de Jérôme Kerviel. Mais cette liquidation des positions du trader a entraîné la chute des actions de la banque sur le marché. Les pertes s’élèvent à 4,9 milliards d’euros. Somme que Jérôme Kerviel a été condamné à reverser à la banque en octobre 2010.

Kerviel, seul coupable dans cette affaire ?

Si en rendant publiques les pertes de la banque, la Société Générale considère le trader comme unique coupable, en juillet 2008, la Commission bancaire infligeait un blâme et une amende de 4 millions d’euros à la banque, en raison des carences de son système de contrôle interne.

Fin janvier 2008, Jérôme Kerviel était mis en examen et placé en détention provisoire pour « faux et usage de faux », « abus de confiance » et « introduction de données frauduleuses dans un système informatique ». Pour le trader, la direction était au courant de ses opérations mais le laissait faire car il leur faisait gagner de l’argent.

Le premier procès s’ouvre en juin 2010 et le 5 octobre, Jérôme Kerviel est condamné à cinq ans de prison, dont trois ans ferme, et à verser 4,9 milliards d’euros de dommages et intérêts. Aussi absurde que cela puisse paraître, la jurisprudence en matière d’abus de confiance impose le remboursement de la totalité du préjudice.

Ouverture du procès en appel

En 2012, avant l’ouverture du procès en appel du trader, son avocat Me David Koubbi avait déposé plainte contre la Société Générale, pour « faux » et « escroquerie » au jugement, et une procédure devant le Conseil supérieur de la magistrature contre le magistrat qui avait présidé le premier procès. La banque avait alors immédiatement répliqué en déposant également une plainte pour dénonciation calomnieuse.

C’était donc un procès sous haute tension qui avait débuté en juin dernier. Mais Jérôme Kerviel avait alors modifié sa défense, se disant victime de « manipulation » de la part de la direction de la banque, n’hésitant pas à se comparer « à un hamster dans une roue ».

Depuis le début du procès en appel, des témoignages d’anciens employés de la Société Générale défendent l’accusé. « Il y a un suivi trader par trader des flux financiers, la banque sait au jour le jour combien chaque trader a gagné », a déclaré l’un d’eux, à Canal+. Si Kerviel est accusé d’avoir dissimulé ses pertes, pour ce témoin, il ne paraît pas pensable que la direction ne soit pas au courant.

« Je ne suis qu’un homme qui a commis des erreurs au sein d’une banque qui les a longtemps admises parce qu’elle en tirait profit », assurait Jérôme Kerviel dans un livre, publié en mai 2010, L’engrenage, Mémoires d’un trader. Verdict ce mercredi 24 octobre.

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