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La «règle d’or», pomme de discorde en France

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Près de 64% des Français se prononceraient en faveur du « oui » au traité budgétaire européen s’il était soumis à référendum, contre 36 % qui voteraient « non », selon un sondage BVA publié récemment en France par Le Parisien/Aujourd’hui. La « règle d’or », l’un des points centraux du traité, est approuvée par 72 % des personnes interrogées, 25 % s’étant prononcé contre et 3 % étant sans opinion. BVA a néanmoins souligné que, si le « oui » semble devoir l’emporter largement, un scénario analogue à celui du référendum de 2005[1] n’est pas à exclure. De plus, le choix des 45 % des partisans du « oui » pourrait changer. Cette proportion s’élève à 40 % chez les partisans du « non ».

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La situation budgétaire des pays signataires du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance en zone euro (TSCG) doit être « en équilibre ou en excédent », conformément à l’article 3 du traité de discipline budgétaire. C’est la fameuse « règle d’or ». Nicolas Sarkozy, qui avait négocié et signé ce traité le 2 mars 2011, était partisan de l’inscrire dans la Constitution. Lors de la campagne présidentielle, François Hollande, qui n’avait pas estimé nécessaire la révision constitutionnelle pour assurer le respect de la « règle d’or » par la France, s’était engagé à le « renégocier » pour y ajouter un volet consacré à la croissance et à l’emploi. Les Sages du Conseil constitutionnel ont abondé dans ce sens en ayant estimé, dans leur décision rendue le 9 août, que le traité de discipline budgétaire n’était pas contraire à la Constitution. En cas de non-respect de la transposition du TSCG dans le droit national, la Cour de justice européenne, saisie par l’un des États de l’Union, peut infliger des sanctions financières allant jusqu’à 0,1 % du PIB[2].

Les divergences

L’organisation Attac affirme que le nouveau traité européen est dangereux, dans la mesure où la « règle d’or » qu’il inclut imposerait un véritable carcan budgétaire qui concernerait non seulement le budget de l’État mais aussi ceux des collectivités locales et des administrations de la Sécurité sociale. Ainsi est-il économiquement absurde, socialement injuste, intolérable démocratiquement et incompatible avec la transition écologique.

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Le « paquet européen » porté par le gouvernement français, et dont l’examen par le Parlement commence ce mardi 2 octobre à l’Assemblée nationale, inclut le traité européen reprenant la « règle d’or » budgétaire, limitant à moyen terme un déficit structurel[3] à 0,5 % du PIB et une dette publique inférieure à 60 % du PIB, ainsi qu’une loi organique fixant les modalités d’application du pacte. Pour Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du Budget, cela est « nécessaire pour renforcer la parole de la France, affaiblie au cours du précédent quinquennat, en même temps que [l’économie française] s’affaiblissait et que [l’endettement] progressait ».

Le travailleur et l’économie

Il semble bien que, indépendamment de l’amélioration indiscutable de son niveau de vie, l’aliénation du travailleur s’accroît sans cesse, l’angoisse du chômage s’y ajoutant encore. Dans un régime économique quelconque, qu’il soit capitaliste ou socialiste, c’est en effet l’individu qui fait tout. Ainsi, un processus de production réel contient en premier lieu la force subjective des individus, c’est-à-dire le travail vivant. C’est cette force seule qui produit. En second lieu, le processus réel de production comporte l’énergie et les matières premières, qui sont des éléments objectifs dont la force de travail des individus assurera la transformation, grâce aux instruments appropriés. Ce processus de production n’est pas économique, car aucun de ses constituants n’est lui-même un élément économique. Il est plutôt le mécanisme réel de production, dont les constituants ne rentrent dans le circuit économique qu’au moment où les produits doivent être échangés contre d’autres. Leurs valeurs d’échange correspondent à leur forme pure, à savoir aux sommes d’argent. Le processus économique dans son ensemble est donc le double immatériel du développement réel de production, de même que chaque constituant de ce processus économique représente le double immatériel d’un constituant réel du mécanisme réel.

Il revient évidemment aux politiques du troisième millénaire de trouver les méthodes nouvelles nécessaires à la stabilisation contrôlée d’une économie capitaliste, qui resterait sans cela instable par nature. Mais ils doivent aussi faire face à une nouvelle mutation du capitalisme, celle de l’univers techno-économique.

Quelques réponses idoines

Il est stérile de sombrer systématiquement dans le guesdisme[4]. Pour mieux faire face au problème posé par la « règle d’or », il est nécessaire d’examiner la réalité du décor environnant, le cadre capitaliste dans lequel ont été plongé les salariés, qu’ils soient ouvriers ou cadres. Quel rôle ces derniers jouent-ils dans un tel contexte ? Comment se trouvent-ils aliénés ? Comment s’intègrent-ils dans le bouillonnement économique moderne ?

D’aucuns savent que l’envol incontrôlé de la Bourse alimente la spéculation qui intoxique périodiquement les places financières, et qui finit par avoir des répercussions néfastes sur la monnaie et l’inflation. Cela permettra d’éviter un krach. De plus, l’expansion boursière ne correspond pas à une expansion économique réelle. Pour maîtriser la surchauffe dans ce domaine, il faudra que les sociétés qui achètent puisent d’abord dans leurs propres réserves sans emprunter. Cela empêchera l’intervention des banques d’accélérer la fièvre spéculative. Enfin, des mesures de couvertures obligatoires partielles sur les marchés à terme et les marchés de produits dérivés devront compléter la panoplie de lutte contre la spéculation.

Il est évident que le cycle de l’activité économique sur le long terme, lors de ses graves oscillations, traverse après une période de croissance quatre phases successives : la récession, la crise, la reprise puis la croissance à nouveau. Il faudra à tout prix réorganiser l’économie. Ainsi revient-il à l’État français de mettre en place des contre-feux. Encore faut-il qu’il ait conscience de l’acuité du phénomène d’oscillation pouvant engendrer, après une période de croissance qui peut être longue, les récessions et les crises. Il faut qu’il puisse avoir conscience de sa lourde responsabilité en élaborant une politique fiscale qui, désormais, doit être coordonnée avec celle des autres États de l’Union européenne. Car c’est à l’État d’impulser le recyclage dans l’économie du capital accumulé pour éviter l’hyperconcentration des richesses.

Il faudra, pour maintenir la croissance moyenne en Europe, que la croissance monétaire moyenne de 3 à 6 % soit contrôlée par la Banque centrale. La BCE et la Banque de France devront accentuer la croissance monétaire, en cas de récession à l’échelle européenne, et la réduire au moment des périodes fastes. Car, contrairement aux thèses monétaires de Milton Friedman, la masse monétaire devra varier à l’initiative de la Banque centrale pour corriger les incohérences intrinsèques du système capitaliste.

L’euro devra devenir la seconde monnaie, pourquoi pas la première, sur le plan mondial et jouer un rôle capital avec tout le poids du continent européen, de l’Atlantique aux frontières de la CEI orientale et du grand Nord au Maghreb. Ces réformes aboutiraient aussi à une réduction de la disparité des richesses, d’une classe sociale à l’autre, en limitant – entre autres mesures – le plafond de la richesse individuelle. On aboutirait ainsi à un capitalisme populaire basé sur une démocratie financière et industrielle au sein des entreprises, dans laquelle les salariés actionnaires participeraient à la gestion. La productivité resterait dans ces conditions élevée, le taux de croissance également, les travailleurs devenant partiellement propriétaires de leur entreprise et ayant conscience de tenir en main leur destin. On peut ainsi atteindre, en quelques dizaines d’années, la démocratie économique et sociale que poursuivent les socialistes depuis plus de deux siècles. Tel doit être leur objectif pour le troisième millénaire.

De toute évidence, la crise en cours est due au dysfonctionnement du techno-capitalisme qui a rendu la société moderne ingérable et ingouvernable. À moins que l’intelligence humaine parvienne à triompher d’une telle évolution et à rendre aux humains leur rôle dans la production, il revient aux tenants du progrès, entre autres aux socialistes du XXIe siècle, d’y parvenir.

Documentation

Les réformes audacieuses pour sortir la France de la crise ;

La synergie franco-européenne face à la crise ;

La mission « historique » des socialistes ;

La réforme du système monétaire international.



[1] Qui avait rejeté le traité de Lisbonne.

[2] Lors de la dernière refonte du pacte de stabilité et de croissance, en 2011, les sanctions pour cause de déficit persistant ont été renforcées. Elles sont donc sont devenues plus automatiques pour les seuls pays de la zone euro. Quand un État présente une situation de déficit excessif, le Conseil peut lui infliger des amendes d’un montant maximal de 0,5 % du PIB.

[3] La France avait, fin 2011, un déficit public de 5,2 % du PIB – dont 3,9 % de déficit structurel. Cette année, sa dette devrait dépasser 90 %. Le gouvernement s’est engagé auprès de Bruxelles à ramener le déficit à 4,5 % du PIB en 2012, 3 % en 2013 et 0 % en 2017.

[4] Que les sciences économiques actuelles ne traitent à aucun moment de l’analyse de Marx et qu’elles soient très en retrait de ce dernier, cela peut se comprendre. Mais ceux qui avaient inventé le socialisme scientifique, ou l’avaient appliqué – Jules Guesde, Karl Kautsky, Gheorghi V. Plekhanov, Joseph V. Staline, etc. –, et tous les autres, avaient méconnu les principes marxistes élémentaires. Ils avaient ensuite tenu les premières œuvres de Marx sous le boisseau, en ayant évité de les éditer pendant cinquante années (1883-1933). Il s’est agi, à travers cette réticence, d’une véritable escroquerie  morale de la doctrine du marxisme, dit orthodoxe, dont le dogmatisme n’était en rien réellement marxiste.

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