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Les états d’âme de Christian Eckert, rapporteur général du budget

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« Député « normal » issu de ma circonscription ouvrière, je découvre avec surprise le poids des lobbies, la multiplicité des lieux de décision, le rôle de la presse, le jeu complexe des ministres et de leurs cabinets, les relations entre le Parlement, les ministères, Matignon et l’Élysée » : c’est l’aveu quelque peu surprenant que livre Christian Eckert, le député socialiste de Meurthe-et-Moselle, Aubryste durant les primaires citoyennes, et nouveau rapporteur général du budget, dans un billet de blog introspectif, mis en ligne mardi 16 octobre, juste avant le début de l’examen en première lecture de la loi de finances pour 2013 à l’Assemblée nationale.

Le rapporteur du budget face à la pression des lobbys

Le poste qu’il occupe à l’Assemblée nationale est un poste clé : tous les amendements fiscaux passent par lui, tous les lobbys le sollicitent – il reçoit des dizaines de sollicitations par jour. Parmi ceux qu’il a reçus, il cite – dans le Journal du Dimanche du 7 octobre – la Fédération des banques, le Medef, Orangina, France Télévisions, Réseau Ferré de France… qui rêvent eux aussi d’infléchir le projet de loi en leur faveur. À chacun, cet ancien professeur agrégé de maths a rappelé les fondamentaux : « Il y a peu de marges de manœuvre compte tenu de la situation budgétaire du pays. »

Le coup de gueule du parlementaire

« Pourtant rôdé par trente ans de vie politique, ayant exercé des fonctions variées, tantôt majoritaire et tantôt opposant, tantôt membre voire chef d’exécutifs et tantôt simple membre d’assemblées locales régionales ou nationales, je pensais connaître les vertus comme les travers de notre organisation démocratique censée empêcher tant le dangereux exercice solitaire du pouvoir que l’immobilisme engendré par trop de « réunionnite » et de démocratie foisonnante », ajoute-t-il.

Pour finir, le rapporteur général du budget à l’Assemblée demande à l’Élysée et au gouvernement de « laisser au travail législatif le temps nécessaire à la décision sereine », et fait valoir son droit à la « différence d’appréciation ».

L’épisode des « Pigeons » a laissé des traces

Ce qu’il perçoit comme un recul du gouvernement face aux dirigeants des start-up l’a mis en rage : « Des jeunes patrons habiles en communication et ayant des carnets d’adresses bien fournis ont réussi à se faire passer comme des pauvres victimes », a-t-il écrit dans son blog début octobre.

Moquant ces « pigeons » plaignant « la mort de l’esprit d’entreprise et la négation des risques des investisseurs », Christian Eckert en avait dénoncé l’argumentaire sur son blog : « Quitte à faire du Zola version moderne, n’oublions pas que les salariés laissent leur santé, voire leur vie au travail… », avait-il tranché.

Ses amendements obligent régulièrement le gouvernement à du rétropédalage

Ses états d’âme se sont exprimés dès le mois de juillet lors du débat sur la refiscalisation des heures supplémentaires. Christian Eckert avait déposé un amendement prônant une refiscalisation rétroactive – à compter du 1er juillet 2012 – alors que le gouvernement n’envisageait qu’une mise en œuvre à compter du 1er septembre. Le ministre des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies, avait été contraint à monter au créneau et à lever le malentendu.

Idem… lorsqu’il s’oppose, en prélude de la discussion budgétaire, à une redevance audiovisuelle sur les résidences secondaires.

Le coup d’éclat : les œuvres d’art et l’ISF

Christian Eckert était sans illusion quant à l’adoption de son amendement sur la prise en compte des œuvres d’art d’un montant supérieur à 50.000 euros dans le calcul de l’impôt sur la fortune (ISF). C’est un serpent de mer de la vie politique française, depuis 1982, qui refait surface régulièrement – et transcende les courants politiques.

Le gouvernement était divisé, l’amendement a été voté en commission de finances… et les lobbys se sont « déchainés »… Artistes, galeries, musées, maisons d’enchères, antiquaires : les milieux de l’art étaient vent debout depuis une semaine. Mardi 16 octobre, les présidents des sept plus grands établissements culturels publics français – dont le Louvre, Orsay et le Centre Pompidou – avaient rendu publique une lettre dénonçant les risques d’une telle mesure. Leur initiative faisait écho à la prise de position des sept maires socialistes de grandes villes, inquiets pour le rayonnement culturel de leurs cités et de la France en général.

Christian Eckert a dû reculer. Difficile apprentissage que celui de rapporteur général du budget…

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