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Salle de shoot: Marisol Touraine relance une idée controversée

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« J’espère que des expérimentations pourront être annoncées avant la fin de l’année », a déclaré la ministre de la Santé Marisol Touraine sur BFMTV, précisant que plusieurs communes « de droite comme de gauche » seraient « prêtes à s’engager » pour mettre en place ce type de salles.

Selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, « les salles d’injection sont nées pour répondre aux problèmes rencontrés par les usagers de drogues en situation de grande précarité et à fort risque de contamination ou de transmission des maladies infectieuses, en particulier les usagers injecteurs et ceux consommant sur la voie publique ».

Un sujet qui divise

Nombreux sont les rapports qui vantent les mérites de ces salles, qui aideraient à réduire le nombre de morts par overdose ou les risques d’infections. « Dans son rapport de 2010, l’Inserm avait déjà mis en lumière les effets positifs des salles de consommation de drogues », a déclaré Jean-François Corty, de Médecins du monde, au Nouvel Observateur. Selon lui, « il faut insister sur l’urgence sanitaire qu’elles représentent. Nous peinons à maîtriser l’épidémie d’Hépatite C qui frappe 60% des toxicomanes. Sans oublier les risques très élevés d’overdose. »

Mais tout le monde ne partage pas cet avis. Pour le député UMP, Bernard Debré, « si un drogué veut s’arrêter, ça sera une incitation » à continuer. « Si quelqu’un fait une overdose dans la salle de shoot, est-ce que c’est l’État qui est responsable ? » a interrogé le médecin sur BFMTV.

Quant à Camille Bedin, secrétaire nationale de l’UMP, elle préfère la prévention à l’encadrement : « Ouvrir des salles de consommation de drogues, ce n’est pas lutter contre le fléau de la drogue, c’est banaliser l’usage et c’est légaliser la consommation des drogues les plus dures et cela aux frais des contribuables ! » a-t-elle lancé dans un communiqué.

Petit tour des pays qui ont mis en place des salles de shoot

Si ces salles sont encore illégales en France, d’autres pas en Europe ont déjà tenté l’expérimentation. En 2003, six pays avaient adopté ce type de mesure (la Suisse, les Pays-Bas, l’Allemagne et l’Espagne en Europe, mais aussi le Canada et l’Australie). En Europe, en 2003, on comptait 72 salles de consommation dans 39 villes européennes. En 2009, les salles de consommation existaient dans six pays européens (le Luxembourg et la Norvège se sont joints aux pays pionniers), selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies. Cependant, seuls les Pays-Bas et la Suisse assurent une couverture nationale de ces salles.

En Australie, la salle d’injection de King’s Cross a été créée en 2001 à Sidney. Mais elle ne cesse de faire polémique. « En réalité, ces salles entretiennent la dépendance aux drogues au lieu d’aider les gens à s’en débarrasser », tente d’avertir l’australienne ­Joséphine Baxter, vice-présidente de la Fédération mondiale contre les drogues, au Figaro. « Ces endroits créent un effet “pot de miel”, où les dealers se regroupent pour vendre leur drogue aux acheteurs qui entrent ensuite dans la salle d’injection. »

Bilan plutôt mitigé

En Allemagne, une vingtaine de salles de shoot a été mise en place, pour un résultat plutôt mitigé. Certes, le nombre de décès liés à la drogue aurait baissé de 20% l’an dernier par rapport à 2010, cependant, sur la même période, le nombre de nouveaux consommateurs a augmenté de près de 15%.

En Espagne, les décès par overdose ont diminué de 1833 en 1991 à 773 en 2008. Le nombre de nouvelles infections au VIH a aussi baissé chez les clients des salles de shoot de 19,9% en 2004 à 8,2% en 2008, selon le Consortium international sur les politiques des drogues (IDPC). Mais l’Espagne reste le pays qui consomme le plus de cocaïne en Europe avec le Royaume-Uni.

En quelques chiffres : un quart des Européens adultes (15-64 ans) a déjà fumé du cannabis ; 4,1 % de la population européenne a déjà recouru à la cocaïne ; 5,8 % des adultes ont pris de l’ecstasy ; 1,35 million d’Européens connaissent un problème lié à leur consommation de drogues, principalement d’héroïne.

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