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De ses cousins mexicains, Mitt Romney préfère ne pas parler

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Le père de Mitt Romney est né au Mexique, mais le candidat républicain parle rarement du temps où sa famille était installée là-bas. Il s’avère pourtant que certains membres de sa famille étendue vivent encore au sud de la frontière américaine.

Mitt Romney et ses cinquante cousins de Chihuahua

Les Romney du Mexique se trouvent dans les collines de Casas Grandes (ce qui signifie : « grandes maisons ») à Chihuahua, à 300 kilomètres du Texas.

La ville abrite environ 8000 personnes. Et pas moins de cinquante d’entre eux affirment être liés à celui qui s’est lancé dans une course serrée avec Barack Obama pour être le prochain président américain.

Parmi ces personnes qui lui sont apparentées, beaucoup d’hommes ont des noms anglo-saxons et parlent couramment l’anglais. Ils sont plus grands et ont les cheveux et le teint plus clairs que la plupart de leurs voisins mexicains. Certains affichent même une ressemblance flagrante avec l’ancien gouverneur du Massachusetts.

Les Romney, riches agriculteurs mormons

Ils sont membres de la communauté mormone, dont les racines remontent aux pionniers qui se sont aventurés de l’Arizona à l’Utah dans les années 1800.

Et ils sont loin d’être de simples « campesinos » [paysans]. Ils pratiquent leur culte dans un temple de marbre, dont le somptueux intérieur entièrement garni d’or n’est accessible qu’aux mormons.

Les maisons sont des demeures construites selon les standards mexicains – comprenant trois étages, beaucoup de chambres, et une cour impeccable ornée de fontaines à la française.

Le clan Romney basé au Mexique est constitué de riches agriculteurs. Ils cultivent de vastes champs de poivrons, pêches, poires et pommes. Par le biais d’une ferme coopérative appelée « Paquime », ils exportent des produis de haute qualité aux États-Unis.

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George Romney, du monde des affaires à la politique

« Mon père est issu d’une famille américaine qui vivait au Mexique. Mais il est rentré dans son pays d’origine à l’âge de 5 ou 6 ans », avait déclaré Mitt Romney en espagnol, lors de son passage sur la chaîne Univision au forum « Meet the Candidate », en septembre dernier.

Son père, George Romney, est né le 8 juillet 1907, dans une maison qui existe encore dans la communauté mormone de Colonia Dublan, à Casas Grandes. Lui et ses compagnons mormons sont partis pour les États-Unis avant qu’un soulèvement social ne déchire le Mexique et ne déclenche la révolution mexicaine de 1910.

George Romney a fait une brillante carrière dans les affaires et la politique. Il était à la tête de l’American Motors Company, a été gouverneur du Michigan et membre du cabinet de Richard Nixon, le président qui, en tant que candidat, avait battu George Romney lors des primaires républicaines de 1968. (Son lieu de naissance, hors des États-Unis, avait soulevé quelques questions pour savoir s’il pouvait se présenter comme président, bien qu’il ait été généralement considéré comme éligible).

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Mitt Romney enchaîne les maladresses au sujet de ses origines mexicaines

Mitt Romney, qui a une chance de devenir le premier président mormon, a suscité de vives critiques lorsqu’il a plaisanté en disant qu’il aurait aimé être vraiment mexicain.

Alors qu’il essayait de courtiser une salle pleine de riches donateurs de la campagne républicaine, il avait suggéré que, si son père était né de parents mexicains, « j’aurais une plus grande chance de gagner ».

Ce moment, capturé de manière clandestine sur une vidéo, fut l’une des interventions les plus maladroites de Romney au sujet de ses années au Mexique, sujet qu’il aborde pourtant très peu.

Le Mexique, grand absent de la campagne

En outre, le Mexique, mais aussi l’ensemble de l’Amérique latine, n’ont été que très peu évoqués lors de la campagne de 2012, alors même que la politique étrangère volait le devant de la scène.

Les Romney du Mexique disent que Mitt n’a jamais posé le pied sur la terre mexicaine qui, autrefois, appartenait à son père – un signe de plus, disent certains, de sa totale déconnexion avec le pays.

« Je crois que Mitt Romney n’entretient pas de lien fort avec ses racines, parce que je ne le sens pas », a déclaré Leighton Romney, cousin au second degré de Mitt, et chef de la communauté mormone à  Colonia Juarez. « Il explique effectivement que son père est né au Mexique, mais qu’il a quitté le pays très jeune et était un citoyen américain ».

George Romney, comme le racontent ses cousins, était différent. Steven Romney, qui dit être un autre cousin au second degré du candidat républicain, explique que lorsque George était retourné une fois à Casas Grandes, le gouverneur du Michigan avait reconnu ses cousins mexicains et exprimé son grand amour pour le pays.

Un arrière-grand-père polygame

Quand Miles Park Romney, l’arrière-grand-père de Mitt, est arrivé au Mexique, il était polygame, et avait cinq femmes et trente enfants.

L’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours a officiellement interdit la polygamie en 1904, menaçant d’excommunier les polygames, même si certains groupes sociaux continuent à la pratiquer.

La communauté mormone des Romney mexicains rejette également la polygamie. Robert Whetten, prêtre de l’église qu’ils fréquentent, dit que les hommes de la famille sont tous fidèles à une seule femme, et pourraient être excommuniés en cas d’infidélité.

Les Romney, victimes du crime organisé

Pendant la guerre contre le trafic de drogue menée par le Mexique et les États-Unis, qui s’est intensifiée pendant ces six dernières années, les Romney ont été victimes de crime organisé.

Meredith Romney, le frère de Leighton, a été kidnappé. La famille a payé une rançon pour le faire revenir, ne révélant jamais le montant.

Pour qui voteront les Romney ?

Les cousins de Romney au Mexique ont la double citoyenneté, américaine et mexicaine. Anthony Romney, un autre homme qui prétend être le cousin au second degré de Mitt, a dit qu’il voterait pour Mitt lors de l’élection.

Même s’il ne le connaît pas personnellement, Anthony explique qu’il croit que son cousin est une bonne personne, qui a des principes et du talent.

Mais tous les Romney mexicains ne sont pas convaincus. La position du candidat sur l’immigration – qui inclut la création de conditions pour encourager l’« auto-expulsion » des immigrants illégaux, et la construction d’une « clôture imperméable » à la frontière entre le Mexique et les États-Unis – est un point de friction majeur.

Leighton Romney, chef des mormons de Colonia Juarez, explique que lorsque ses grands-parents sont venus au Mexique fuyant la persécution aux États-Unis parce qu’ils étaient polygames, le Mexique leur a ouvert ses portes.

Pour lui, pousser tous les sans-papiers à coups de pieds hors des États-Unis est inhumain et impossible.

Global Post / Adaptation : Anaïs Lefébure pour JOL Press

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