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«Être contre le mariage homosexuel, c’est être homophobe»

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Dans le cadre de la manifestation organisée ce samedi 17 novembre contre la légalisation du mariage homosexuelJOL Press a tenu à interroger différents acteurs du débat : Frigide Barjot, porte-parole de la « Manif pour tous », à la tête du collectif « Pour l’Humanité Durable », Louis-Georges Tin, président du Comité IDAHO (Journée internationale contre l’homophobie), Vincent Autin, président de l’association Lesbian and Gay, et Xavier Bongibault, porte-parole de la « Manif pour tous », à la tête de l’association Plus Gay sans mariage.

En quoi le projet de loi du « mariage pour tous » est-il important ?

Louis-Georges Tin : C’est un projet de loi important pour les personnes concernées mais aussi pour tout notre pays qui soutient la valeur d’égalité inscrite dans la Constitution.

Qu’est-ce que cette loi va changer dans les faits ?

Louis-Georges Tin : Cette loi changerait deux choses. Tout d’abord, pour les personnes concernées, beaucoup de choses vont évoluer sur le plan de la fiscalité, du patrimoine et de la filiation. Ensuite, cette loi va changer l’ordre symbolique actuel qui prône l’inégalité. Nous sommes dans un pays qui a mis en place une homophobie d’État : être homosexuel n’est plus un crime, mais un homosexuel n’a pas accès au droit fondamental du mariage. La contradiction est évidente.

Il fut un temps où les Noirs et les Blancs ne pouvaient pas se marier. Etait-ce du racisme ? Je le crois. En Allemagne, à une certaine époque, un juif ne pouvait pas épouser un non juif. Etait-ce de l’antisémitisme ? Je le crois. Il y a des pays, encore aujourd’hui, où les femmes ne peuvent pas se marier librement. Est-ce du sexisme ? Je le crois. En France, les homosexuels ne peuvent pas se marier. Est-ce de l’homophobie ? Je le crois. À l’origine de tous ces états de fait, il n’y a qu’une chose : le refus de l’égalité.

Et qu’en est-il de la filiation ?

Louis-Georges Tin : Un homosexuel n’est pas une personne stérile. L’adoption n’est pas un problème, c’est la filiation qui importe. Les enfants des couples homosexuels ont certes été conçus par des hétérosexuels, mais ce n’est pas eux qui les élèvent. 

Il y a différentes sortes de familles homosexuelles : les familles recomposées, les familles adoptives (qui ne représentent que 10%) et les familles qui mettent en place une coparentalité – souvent deux couples qui se mettent ensemble pour avoir des enfants. Des centaines de milliers de familles vivent comme ça en France. Par le mariage, ces familles ne demandent pas des enfants, mais la reconnaissance de cette filiation par la loi. La loi permet la sécurisation des enfants et non le contraire. Si une personne homosexuelle qui avait les droits sur son enfant meure, sa compagne ou son compagnon n’aura aucun droit sur l’enfant.

En remplaçant dans le code civil le mot « homme », « femme », « père » et « mère » par « époux » et « parents », ne va-t-on pas nier l’identité d’un homme et d’une femme dans la loi en général ?

Louis-Georges Tin : Le code civil et le code pénal ne seront modifiés que pour les articles sur le mariage. Une femme violée aux yeux de la loi restera une femme violée. Nos cartes d’identité ne vont pas changer, en tout cas je ne crois pas qu’il y ait de raison que ça change.

Qu’est-ce que cette loi va changer pour l’enfant ?

Louis-Georges Tin : Cette loi va offrir un contexte sécurisé pour l’enfant. La compagne ou le compagnon pourra désormais emmener son enfant à l’hôpital, pourra venir le chercher à l’école, pourra plus facilement partir en voyage avec lui. Plus de 1000 enquêtes ont été menées auprès de familles homoparentales et elles aboutissent toutes au même résultat : il n’y a pas de différence entre un enfant qui a été élevé par un couple homosexuel ou hétérosexuel.

Pour s’en convaincre, il faut aller voir soi-même comment ça se passe dans ces familles. Les enfants élevés par des couples homosexuels ne sont ni détraqués ni pervers. La loi du mariage pour tous les protègera car elle leur donnera un cadre juridique.

Que pensez-vous de la manifestation organisée par les opposants au mariage homosexuel ?

Louis-Georges Tin : À l’époque des débats sur le Pacs, on entendait que la civilisation était en faillite, que les fondements de la société allaient s’écrouler… On attend toujours ! Je regrette simplement qu’on défende la famille dans un climat de haine. Être contre le mariage homosexuel, c’est être homophobe.

Comment expliquer alors que des homosexuels soient contre le mariage gay ?

Louis-Georges Tin : Peut-être sont-ils victimes d’homophobie intériorisée

Propos recueillis par Marine Tertrais pour JOL Press

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