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Les frites, la Belgique en fait tout un plat, et même plus

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«Cela fait partie de notre histoire, de notre gastronomie, de notre culture au sens le plus large », explique Hugues Henry, expert sur le sujet, au lancement d’un mois entier de célébration de la frite.

Auteur d’un livre magnifiquement illustré sur la culture de la frite, Hugues Henry est le directeur du Musée de la frite à Bruxelles. « C’est bien plus que de la simple nourriture », explique-t-il. « Les frites sont ancrées dans la mentalité belge. Tout le monde a grandit près d’une baraque à frites près de chez lui ».

Les fritkots, tout un symbole de la cuisine belge

La capitale belge honore ses frikots traditionnels – ces camions dans lesquels ont sert des frites chaudes entourées de papier avec de la mayonnaise sont à Bruxelles ce que la pizza est à Naples – après une année de festival gastronomique nommé Brusselicious.

Les touristes qui arriveront à l’aéroport de Bruxelles ou à la gare internationale se verront remettre un cône en carton qu’ils pourront remplir dans les 17 fritkots de la ville pour environ 3 euros.

Qui a vraiment inventé les frites ? 

Pour les gourmands, l’office de tourisme de Bruxelles organise une visite des douze fritkots les plus réputés de la capitale.

Il y aura un vote pour les meilleurs frites – le vainqueur remportera une immense sculpture représentant un cornet de frites. Le 13 décembre, une nuit de débat sur l’histoire des frites aura lieu.

L’événement porte un message clair à l’attention des Américains, qui, comme tout Belge vous le dira, se méprennent quant à l’histoire de la frite.

« Les Français se revendiquent encore et toujours comme les inventeurs de la frite », déplore Martha Meeze, de l’office de tourisme de Bruxelles. « Nous avons la preuve que ce n’est pas le cas », affirme-t-elle.

C’est un débat de longue date. Certains soldats de l’infanterie américaine qui s’étaient fait servir des frites par des belge francophones durant la Première Guerre mondiale sont rentrés chez eux en appelant cela les « frites françaises ». D’autres racontent que c’est Thomas Jefferson qui a rapporté la recette après son passage à l’ambassade américaine à Paris.

Selon les Belges, des documents prouvent que les frites ont été inventées en 1680 par des pêcheurs près de Namur. Pour enrichir leurs maigres repas d’hiver, ils ont mis des morceaux de pomme de terre dans l’huile bouillante.

Les Belges trouvent le terme « frites françaises » doublement irritant car les Français se sont longtemps moqué de l’amour des Belges pour les frites. Cette blague en est un exemple : « pourquoi l’Arabie Saoudite dispose de pétrole et la Belgique de frites ? Car à la création du monde, les Belges ont dû choisir en premier ! »

Même si ces frikots bruxellois font maintenant partie intégrante de l’héritage culturel belge, tel n’a pas toujours été le cas. En effet, les pouvoirs publics ont parfois considéré ces baraques à frites comme désagréables à regarder et présentant des risques sanitaires.

« Nombre d’entre eux ont dû tout bonnement fermer dans les années 1980 », explique Hugues Henry. « Il y avait 10 000 fritkots à travers la Belgique à la fin des années 1970. On en compte aujourd’hui 1600 ».

La friterie Antoine, incontournable à Bruxelles

La Maison Antoine est de celles qui ont survécu. Elle fait des frites depuis 1948 et le New York Times dit d’elle qu’elle sert les « meilleures frites au monde ».

Situé à deux pas du Parlement européen, Antoine a fourni à plusieurs reprises la famille royale. Ses horaires très tardifs en font un lieu d’after-party où se sont déjà produits les Rolling Stones et Johnny Hallyday.

Mais pas besoin d’être une star pour dîner chez Antoine, grâce aux nombreuses formules économiques.

La frite, facteur de cohésion sociale

« Depuis la crise économique, beaucoup de gens ne peuvent plus se permettre de dîner au restaurant », explique le chef cuisinier de chez Antoine, Thierry Willaert. Pour une bouchée de pain, vous pouvez avoir un cornet de délicieuses frites, de la fricadelle et une aile de poulet. C’est un dîner copieux tout à fait abordable ».

Le livre d’Hugues Henry, Carrément Frites, recense le record du monde en la matière. Il est détenu par Chris Verschueren de Kastel, qui vit près de Bruxelles. Il a produit 1500 kilos de frites en 83 heures.

On trouve également dans cet ouvrage des parties sur l’art de la friture dans la musique, le cinéma, et même la mode. La maison bruxelloise Piece Of Chic a d’ailleurs lancé une collection inspirée de la frite, baptisée « Magik Fritkot ».

Les frites ont également un poids politique. C’est un rare symbole d’unité entre les Flamands (néerlandophones) et les Wallons (francophones). Un jeune mouvement a été créé en 2011 contre les divisions linguistiques qui ont paralysé le gouvernement, appelé « La révolution des Frites ».

Le Fritkot Festival aura lieu du 1er novembre au 4 décembre 2012 à Bruxelles et célèbrera ce qui est sans doute une des plus grandes fiertés de tous les Belges.

Global Post/Adaptation : Alexis Mamou pour JOL Press.

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