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TVA sociale: décriée hier, en odeur de sainteté aujourd’hui?

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Il y a six mois, dans les derniers instants du mandat de Nicolas Sarkozy, le gouvernement Fillon proposait de mettre en place une TVA dite sociale, qui visait à augmenter de 2,6 points la taxe sur la valeur ajoutée en échange de baisses de charges pour les entreprises. Adoptée en mars, elle devait entrer en vigueur le 1er octobre 2012, mais dès juillet, François Hollande s’était empressé d’annuler une mesure qu’il considérait « injuste » socialement. « Dès lors que nous l’avons supprimée, nous n’allons pas la rétablir », déclarait alors le ministre de l’Économie Pierre Moscovici.

Baisse des charges patronales et crédit d’impôts

Seulement, il semblerait que ces considérations ne soient plus d’actualité. Dans son rapport remis au Premier ministre ce lundi 5 novembre, Louis Gallois préconise en effet une baisse annuelle de 20 milliards d’euros de charges patronales pour relancer la compétitivité. Or Jean-Marc Ayrault ne souhaite pas baisser directement ces charges mais plutôt mettre en place un crédit d’impôt sur les sociétés (IS) de 20 milliards d’euros.

Ce crédit s’applique sur l’impôt sur les sociétés et est calculé en proportion de la masse salariale des entreprises hors salaires supérieurs à 2,5 fois le Smic. Il s’agit de réduire le coût du travail sur les salaires les plus bas. Les entreprises pourront en bénéficier seulement en 2014. L’État remboursera alors les charges des entreprises à hauteur de 10 milliards, le reste sera payé par les ménages, via une hausse de la TVA.

Un retour de la TVA sociale ?

« Quelle déception que les annonces de Jean-Marc Ayrault ! Je souscrivais totalement aux mesures du rapport Gallois qui proposait un dispositif à la fois simple et puissant sur le plan économique. Je découvre avec la proposition Ayrault un projet extrêmement technocratique, très complexe pour les entreprises et pas à la hauteur des attentes », a déclaré Jean-François Copé à la presse dans les couloirs de l’Assemblée nationale.

« La déception est d’autant plus grande que l’on voit l’incapacité du gouvernement socialiste à faire un projet pour la compétitivité : au lieu de baisser les charges patronales, on fait un crédit d’impôt pour les entreprises pour dans deux ans, un tour de passe-passe qui risque en plus de servir de variable d’ajustement quand il va falloir faire des économies budgétaires », a lancé le secrétaire général de l’UMP, avant d’ajouter : « Il vaut mieux sourire en constatant que François Hollande a fait campagne auprès des Français en disant qu’il n’augmenterait absolument pas la TVA, eh bien il augmente la TVA, mais ne baisse pas les charges patronales ! »

Une annonce qui fait bondir la gauche de la gauche

En effet, le 3 janvier dernier, sur France 2, le candidat socialiste, en pleine campagne, expliquait : « Je ne veux pas que les Français soient affligés de trois ou quatre points de TVA. Cela ne protègera pas des importations extérieures et cela aura des conséquences graves sur la croissance ». Il faut croire qu’il a changé d’avis…

Un retournement de situation que n’a pas hésité à dénoncer Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti de gauche : « Je trouve cela lamentable parce que c’est la poursuite de la même politique qui ne fonctionne pas », a-t-il déclaré sur TV5Monde. « C’est un choc qui est fait où on transfère sur le dos de la masse des travailleurs contribuables ce qui ne sera pas acquitté par l’entreprise au moment de la production de la richesse », a-t-il ajouté.

Quant à Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, il dénonce « un coup de massue contre le pouvoir d’achat ». « Un choc oui, mais un choc avant tout pour celles et ceux qui, six mois après la défaite de Nicolas Sarkozy jour pour jour, attendaient autre chose que cette nouvelle cure d’austérité », a-t-il déclaré dans un communiqué. « Au contraire, le PCF préconise la baisse des charges financières d’intérêts et des dividendes qui étouffent le système productif français », a-t-il ajouté.

La majorité se défend

Mais la majorité tient à souligner les différences entre les mesures du gouvernement et la TVA sociale de Nicolas Sarkozy. Invité de Public Sénat mercredi 7 novembre, le ministre du Travail Michel Sapin a défendu le pacte de compétitivité du gouvernement, assurant qu’il n’aurait « aucun effet récessif sur la consommation des ménages » en 2013. La hausse est en effet prévue pour janvier 2014.

Pour le ministre, la TVA sociale qui devait prendre effet au 1er octobre avait un caractère criminel : « Il y avait quelque chose de criminel pour l’économie française à ponctionner 12 milliards d’euros en octobre quand on voit l’état de la situation avec une croissance zéro, avec une consommation faible », a-t-il déclaré, espérant qu’en 2014, la situation se sera nettement améliorée pour le pouvoir d’achat des ménages.

Il a par ailleurs affirmé qu’il n’y aura pas de hausse « massive et généralisée » de la TVA. Il est en effet prévu par le gouvernement que le taux à 5,5% pour les produits de première nécessité passera à 5%, soit un manque à gagner de 800  millions d’euros par an pour l’État. En revanche, le taux intermédiaire de 7% passera à 10%, soit 3,8  milliards d’euros de recettes par an, et la majorité des biens et des prestations de services verra le taux de 19,6% relevé à 20% pour une recette de 3,3  milliards d’euros par an.

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