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La République française n’a-t-elle plus besoin de grands hommes?

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Dans L’histoire de France interditeDimitri Casali explique que l’Histoire est menacée par ses trois plus grands détracteurs. L’Éducation nationale tout d’abord, dans une fuite en avant multiculturaliste qui enterre avec de nouveaux programmes nos principaux héros et la chronologie naturelle, veut faire des élèves des « citoyens du monde » avant d’en faire des citoyens français aimant leur pays. Les groupes communautaires ensuite, qui instrumentalisent l’Histoire à leur profit, d’où la multiplication des lois mémorielles… Les élites intellectuelles et médiatiques enfin, qui s’érigent en ayatollah de la pensée unique.

Aussi déplore-t-il le manque de chronologie dans les manuels scolaires : en 1ère, on étudie la crise de 1929, puis la guerre de 1914. En 3ème, les attentats du 11 septembre précédent le Front populaire de 1936. Seconde surprise, des événements fondamentaux sont évacués, tel le 6 juin 1944. La discréditation de notre passé entretient cette détestation de soi qui sommeille en chaque Français.

Selon lui, il nous manque cette fierté que l’on sent chez les Américains, les Chinois, lesBritanniques, les Espagnols et qui est manifeste dans leurs manuels comme dans leur admiration pour leur héritage. Plus qu’un coup de gueule, ce livre est une déclaration d’amour à l’Histoire de France.

Extraits de « L’histoire de France interdite » de Dimitri Casali (JC Lattès)

Jadis, le temps n’effaçait pas la trace des hommes hors du commun. Or, c’est l’inverse que nous constatons en France aujourd’hui : le temps efface désormais et irrémédiablement le souvenir de nos grands hommes.

Pourquoi, au moment où la fréquentation des musées explose, où les revues, débats radiophoniques, émissions de télévision, jeux vidéo, prouvent le succès de l’histoire de nos grands personnages, pourquoi assiste-t-on, sans rien dire, à leur suppression, voire à leur mise à l’écart ?

Notre société est de plus en plus méfiante à l’égard des grands hommes, et plus encore à l’égard de ceux qui ont prouvé leur forte personnalité, voire leur autorité. Il est certain qu’une société idéale composée de citoyens unis, moraux, éduqués, cultivés n’aurait pas besoin que soit édifiée une histoire unificatrice. Mais la société idéale n’existe pas. Les idées abstraites et les grandes thématiques choisies dans les nouveaux programmes scolaires prennent l’allure d’un enseignement rébarbatif, alors que les mêmes contenus passeraient mieux si on les transmettait à travers des exemples vivants et personnifiés, en évitant les anachronismes et la mythologie, car l’histoire bien enseignée est toujours la meilleure réponse au mythe.

La République a donc plus que jamais besoin des grands hommes, car l’Histoire est plus influente qu’on ne le croit et qu’on le veuille ou non, elle émet des jugements de valeur, institue des règles, des principes ; en un mot, elle est normative.

À l’heure de la mondialisation, nous assistons à une uniformisation de nos modes de vie, de nos histoires et de nos façons de penser. Pour nos dirigeants politiques, il est indispensable que la France s’ouvre aux autres cultures du monde et que l’enseignement de l’Histoire s’adapte aux nouvelles populations immigrées.

L’exemple de Louis XIV est édifiant. Ce n’est pas seulement le Roi-Soleil qui est réduit à la portion congrue, mais aussi l’œuvre considérable de tous les principaux acteurs de son règne : Molière, Vauban, Colbert, La Fontaine, Corneille, madame de Sévigné, La Bruyère, Bossuet, Fénelon, Lully, Le Nôtre, Hardouin Mansart… Certes, il y a déjà bien longtemps que Turenne, le Grand Condé, Jean Bart, DuguayTrouin n’existent plus, et il n’est pas nécessaire de souligner la disparition de Du Guesclin ou Bayard. Le grand Pasteur ou Victor Hugo ne sont plus étudiés en Histoire comme ce fut le cas pendant plus d’un siècle dans les écoles de la République.

Nos enfants vont-ils devenir amnésiques ? Tous ces grands noms qui ont participé à la culture et au rayonnement de la France à l’étranger risquent de disparaître à jamais dans les oubliettes de l’Histoire. Nous ne prônons pas, bien sûr, le retour à une lecture hagiographique, épique ou patriotique des « grands personnages ». Au contraire, il faut présenter aux élèves toute la complexité de ces hommes inscrits dans leur époque.

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