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Les agences de notations, boucs émissaires de la crise de la dette?

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Qui veut la mort des agences de notation ? Pourquoi les a-t-on désignées comme les principales responsables de la crise de la dette européennes ? Accusées de n’avoir pas vu venir l’explosion de la bulle immobilière américaine, on leur reproche aujourd’hui d’avoir aggravé la situation de la zone euro en affolant les marchés.

Mais quel est leur rôle précisément ? Sont-elles coupables de ces crises successives, ou les boucs émissaires que nos dirigeants accusent volontiers ? Le thermomètre est-il responsable de la fièvre ? Et si la crise de la zone euro durait dix ans ? Pour la première fois, Marc Ladreit de Lacharrière prend la parole.

Extraits de « Le droit de noter : Les agences de notation face à la crise », de Marc Ladreit de Lacharrière 

La chasse au bouc émissaire est une pratique coutumière chez les gouvernants quand survient une crise dont ils se savent responsables. En 1929, ce sont les vendeurs à découvert qui ont porté le chapeau. En 1987, les programmes automatiques de vente et d’achat de titres mobiliers furent accusés de tous les maux. En 2007, Nicolas Sarkozy se livre à son tour à ce jeu. Il faut, au plus vite, prendre les agences de notation en otage. L’acte d’accusation est expédié : « Nous devons nous interroger sur le rôle exact que doivent jouer les agences de notation. »

Même Le Monde s’interroge sur les motivations du président de la République. S’il constate le 18 août que Nicolas Sarkozy respecte la tradition des boucs émissaires (« Comme dans toute crise, il faut trouver des boucs émissaires »), il se demande toutefois pourquoi il s’en prend uniquement aux agences de notation : « Les agences ont leur part de responsabilité, mais ne sont pas plus coupables que les banques qui ont prêté n’importe quoi à n’importe qui. » La publication de la lettre de Nicolas Sarkozy à la chancelière allemande ainsi que les diverses déclarations du président de la République sonnent la curée. L’Agence France-Presse (AFP) l’officialise dans une dépêche : « Les agences de notation accusées de tous les maux de la crise financière. » La machine infernale de la désinformation est enclenchée.

Lors des jours qui suivirent, les agences de notation furent vouées aux gémonies politiques et médiatiques. Il fallait frapper le plus fort possible plutôt que frapper juste, attaquer plutôt que réfléchir. Tels les sorciers au Moyen Âge, nous étions haïs sans que personne ou presque sache pourquoi.

Qui connaissait alors vraiment notre rôle ? Qui savait que nous remplissions une fonction essentielle consistant à faciliter le transfert de l’épargne de l’investisseur à l’emprunteur, qu’il soit privé ou public ? Depuis l’ouverture des marchés de capitaux engagée au début du XX e siècle par les États-Unis, nous sommes devenus l’un des rouages essentiels de leur fonctionnement : nous donnons une opinion, transparente, indépendante, sur le risque que prend un créancier lorsqu’il accorde un prêt à un débiteur qu’il ne connaît pas.

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