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Système de santé moribond: les ONG, l’ultime recours des Grecs

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Une situation sanitaire préoccupante

Le secteur de la santé est particulièrement touché par la crise en Grèce. Les coupes budgétaires drastiques de l’État et l’augmentation du chômage dégradent la situation sanitaire du pays. Des milliers de personnes n’ont plus accès aux services médicaux : 40% de la population grecque n’aurait plus d’assurance maladie aujourd’hui.

Les plus pauvres renoncent donc à se soigner ou se tournent vers les services médicaux proposés par l’ONG Médecins du monde, qui se concentre depuis plusieurs années sur le cas préoccupant de la Grèce.

La clinique d’Athènes par exemple, centre médical destiné au départ aux migrants et aux demandeurs d’asiles, accueille aujourd’hui des Grecs qui n’ont souvent plus d’autres alternatives pour se faire faire soigner. 

JOL Press : Depuis quand le centre de soins de Médecins du monde existe-t-il à Athènes ? Dans quel contexte a-t-il été ouvert ?

Christina Samartzi : Le centre médical a été ouvert en 1997. Au départ, le but de cette polyclinique était d’offrir des soins médicaux primaires aux immigrants, réfugiés et demandeurs d’asile. Mais les choses ont changé depuis quinze ans… Depuis la crise, de nombreux Grecs viennent se faire soigner dans les centres. 

JOL Press : En Grèce, l’hôpital public a subit des coupes budgétaires drastiques. Est-ce que la santé est devenue un luxe aujourd’hui dans le pays ?

Christina Samartzi : Le système de santé subit effectivement de plein fouet les effets de la crise. Les personnes sans couverture maladie sont les premières victimes  de cette situation. Les Grecs ont de plus en plus de mal à se procurer des médicaments ou à payer le forfait de cinq euros pour chaque consultation à l’hôpital public. 

JOL Press : Quel est le profil des personnes qui viennent dans le centre de soins de Médecin du monde à Athènes?

Christina Samartzi : Le centre médical accueille environ 70%  d’immigrants et réfugiés et 30% de Grecs. Ce sont généralement des personnes âgées sans assurance médicale ou sans accès aux services médicaux. Nous recevons également de nombreuses mères, qui viennent faire vacciner leurs enfants, des personnes qui ont fait faillite et sont désormais au chômage.

JOL Press : Combien de personnes recevez-vous chaque année ? Constatez-vous une augmentation des visites dans vos polycliniques ?

Christina Samartzi : Chaque année, les centre médicaux de Médecins du monde basés en Grèce reçoivent 30 000 personnes.  Mais depuis le début de l’année 2011, nous constatons une augmentation importante de la population grecque dans ces centres.  

JOL Press : De quelles pathologies souffrent les Grecs ? 

Christina Samartzi : La majorité des patients souffrent de maladies chroniques, comme le diabète. Nous accueillons également des enfants qui doivent se faire vacciner, ou des patients qui viennent pour se procurer des médicaments. Nous assistons aussi à une hausse des maladies psychlogiques. De plus en plus de patients souffrent de dépressions et viennent dans les polycliniques pour consulter un psychologue ou un psychiatre. Depuis la crise, nous observons une dégradation inquiétante de la santé mentale des Grecs.  

JOL Press : On assiste à un autre problème en Grèce aujourd’hui : le manque de médicaments. Quelle en est la cause ? Comment faites-vous face à cette pénurie ?

Christina Samartzi : C’est un problème très sérieux, en effet. Les pharmacies ne disposent pas de tous les médicaments nécessaires. Comme les entreprises pharmaceutiques ne sont plus payées par l’État, elles ne fournissent plus les médicaments aux pharmacies. Elles préfèrent exporter dans des pays où elles feront de plus grosses marges.

En ce qui concerne Médecins du monde, certaines entreprises pharmaceutiques nous font des donations de médicaments. De nombreux Grecs se mobilisent également en apportant des médicaments qu’ils n’utilisent plus.  C’est très émouvant. Au mois de mai dernier, nous avons par exemple organisé un concert. Comme ticket d’entrée, les gens devaient présenter un paquet de médicaments ou des produits alimentaires, comme du lait, du riz, ou encore des pâtes. Cet évènement a eu beaucoup de succès.

JOL Press : Dans quel état d’esprit sont les Grecs qui viennent dans les polycliniques ? Ont-ils encore espoir que la situation s’améliore ?

Christina Samartzi : Les Grecs qui viennent chez nous sont désespérés. Ils doivent non seulement affronter des difficultés économiques mais également médicales. La situation se dégrade de jour en jour ; beaucoup pensent qu’ il n’y a plus d’espoir ici. 

JOL Press : En quoi la crise a changé les modes d’action de Médecins du monde ?

Christina Samartzi : La crise nous a effectivement obligés à changer nos modes actions. L’ONG Médecins du monde a toujours eu des programmes en Grèce mais agissait essentiellement dans les pays d’Afrique. Depuis la crise, nous avons été contraints de concentrer nos efforts en Grèce qui rencontre de grandes difficultés sanitaires. Nous devons être présents ici !

Médecins du monde a multiplié ses actions et ses programmes médicaux à travers le pays. Depuis un an, nous lançons régulièrement des campagnes de distribution de nourriture aux familles dans le besoin. L’ONG propose également un nouveau programme d’aide médicale et psychologique pour les personnes âgées et les sans-abris.

Propos recueillis par Louise Michel D. pour JOL Press

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