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Une exposition Sartre-Beauvoir

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Ces derniers jours, L’Agence de l’ONU pour l’éducation, la science et la culture a organisé plusieurs événements pour fêter les 40 ans de la Convention du Patrimoine Mondial. Entre autres, une exposition « jean Paul Sartre et Simone de Beauvoir dans le dunes de l’Isthme de Courlande ». Projet français, lituanien et russe a présenté 60 photos de très estimé photographe lituanien Antanas Sutkus aujourd’hui agé de 79 ans, dont l’épouse Rima est venue à Paris, assister à vernissage.
 
La deuxième Conseillère de la délégation française à l’Unesco,  Claudine Serre, spécialiste de la carrière des écrivains mondialement connus a expliqué aux invités et délégués de trois états qui ont accompagné le sous directeur pour la Culture, Francesco Bandarin, les circonstances de leur déplacement : »L’objet premier de leur voyage en Lithuanie s’expliquait par la déclaration de Jean-Paul Sartre dans le premier numéro de la revue « Les Temps Modernes », publié en 1945,alors que la France se remettait des blessures de la Deuxième Guerre mondiale.La voici: »L’écrivain est en situation dans son époque.
 

Sartre et Beauvoir ont eu, leur vie durant, soif de voyages

 
Chaque parole a son retentissement, chaque silence aussi ».Cet engagement rejoint les thèmes de paix et de justice, chers à l’Unesco, crée en 1946.Sartre et Beauvoir ont eu, leur vie durant, soif du voyage.Ils voulaient découvrir par eux-mêmes les continents et les peuples, leurs souffrances et leurs espoirs.Lire ne suffisait pas, il fallait voir, sentir, comprendre.Échanger.
 
En 1965, l’un et l’autre ont atteint la célébrité et pris les risques.Sur le plan littéraire, Simone de Beauvoir a déjà publié des essais et plusieurs romans, dont « Les Mandarins », prix Goncourt en 1954.Quelques années auparavant, en 1949, son essai « Le Deuxième Sexe » sur la condition des femmes avait suscité un débat tant national qu’international. La lecture de cet ouvrage avait alors changé la vie de nombreuses femmes de par le monde.Il s’agit,encore aujourd’hui, d’un des ouvrages français le plus traduit.Simone de Beauvoir rendit son manuscrit à l’éditeur au moment où, le 10 décembre 1948, Eleanor Roosevelt faisait enfin adopter à Paris la Déclaration universelle des droits de l’homme, déclaration dans laquelle les femmes furent reconnues comme citoyennes  à part entière.
 
Beauvoir avait aussi publié trois volumes de mémoires, où Sartre occupe une place majeure, chacun vendu à 50 000 exemplaires avant même leur parution.Et c’est dans le quatrième volume « Tout compte fait », paru en 1972, année de la Convention du Patrimoine mondial, qu’elle rend compte de leur voyage aux dunes de l’Isthme de Courlande ».Jean-PaulSartre , venait, pour sa part, de refuser le prix Nobel de littérature l’année précédente.Toute reconnaissance officielle était pour lui incompatible avec la notion de liberté et d’indépendance du philosophe. La publication de « Mots », en 1964, ses souvenirs de jeunesse, avait connu un succès retentissant. »
 
Pendant que les visiteurs regardèrent avec un intérêt et respect incomparable, accompagné par immense curiosité et le sentiment de fierté d’assister a un événement historique et international, madame Serre a répondu a deux questions, pour rendre ce voyage plus compréhensible et proche de notre temps:
 
Djenana Mujadzic : Les conditions politiques du milieux des années 1960 ont-elles influencé la décision des auteurs d’entreprendre ce courageux éloignement de leur vie très citadine ?

Claudine Serre : Dans le climat de la guerre froide, ces deux écrivains essayaient d’être des passeurs entre les hommes et femmes de bonne volonté.Alors que l’histoire était traversé de tragédies-l’assassinat du président des Etats Unis , John Kennedy à Dallas, deux ans auparavant,était dans toutes mémoires-les voici parvenus en Lituanie et sur les dunes.Simone de Beauvoir a raconté-Un matin, nous avons aperçu un étrange spectacle: un homme habillé de toile cirée jaune était entré dans l’eau jusqu’à mi- cuisse,et il marchait en pousant quelque chose devant lui avec un bâton.

C’ était u nfilet qu’il a vidé sur sable…Il cherchait à ramasser de l’ambre. L’ambre transparent dont on fait en USSR de si beaux colliers provient en partie de cette côte. Nous avons vu, à quelque distance de Palanka, une maison où Thomas Mann a séjourné : elle est perchée au-dessus de la mer, en haut d’une falaise et à l’orée d’un bois dans une parfaite solutude ; elle héberge à présent des écrivains.Le site est très beau mais plus belles encore sont, à quelques kilomètres, de hautes dunes blanches, un grand vent soufflait qui nous faisait trébucher tandis que nous les escaladions;nous nous sommes assis au sommet et nous avons contemplé la mer d’un bleu aigu qui baignait les abruptes collines d’un sable étincelant comme la neige ».

Djenana Mujadzic : Quelle image ont-ils laissée à la mémoire du notre temps ?

Claudine Serre : Étrange et fascinant spectacle que ces deux êtres, unis par le lien d’écriture , balayés par les vents.Sartre détestait la chlorophylle, mais il est là question de sable et d’immensité,tandis que Simone de Beauvoir a,sa vie durant, épuisé amis et proches par ses marches de trente kilomètres à un rythme forcené. Certaines de ces photos sont ancrés dans la mémoire collective par leur beauté et leur vérité.

Celle reprise en couverture de « Libération » lors du décès de Sartre en avril 1980 figure parmi les plus symboliques.Pour d’autres, Sartre et Beauvoir sont là, au carrefour du ciel, de la mer et dunes,elles aussi passerelles entre plusieurs peuples.Les voici, ces porteurs de paix pris dans la force des éléments naturels contre lesquels il ne peuvent lutter, deux êtres avides de poursuivre leur chemin de liberté! 

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