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Pauvreté et démographie

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Les objections ne manqueront pas, à commencer par le reproche de voir la bouteille en partie vide plutôt qu’en partie pleine et de faire ainsi preuve d’un pessimisme exagéré. À supposer que tous les hommes aient été pauvres au début de notre ère, ce qui ne saurait être le cas du simple fait de le relativité de la pauvreté – comme de la richesse bien entendu –, alors que le nombre de ces pauvres a été multiplié seulement par 4 à 5, celui de la population totale l’a été par 28.

Voici effectivement de quoi dédramatiser l’augmentation du nombre de pauvres. D’autant que le même raisonnement conduit, en supposant qu’il n’y ait eu que des non pauvres au début de notre ère – ce qui ne saurait davantage être le cas que le contraire – le nombre en est passé, par différence, de : 250 millions à 7 milliards – 1.4 milliards = 5.6 milliards, soit une multiplication par 22.4, d’où raison supplémentaire de se réjouir. Mais dans un cas comme dans l’autre, ce qui nous intéresse ici est la pauvreté et sa progression en nombre ; au net de toute relativisation.

Ce qui est important et prioritaire n’est pas de savoir si la civilisation a créé plus de riches que de pauvres mais de savoir quels ont été ses effets sur la pauvreté. Quand bien même il n’existerait qu’une poignée de miséreux sur terre, c’est leur sort qui nous intéresse et non celui des heureux élus qui ont le bonheur d’y échapper. Or l’observation est indiscutable : le nombre de pauvres profonds a augmenté de un milliard et demi en vingt siècles, si nous ne chipotons pas sur quelques dizaines de millions.

Quant à savoir si cette variation a connu des fluctuations ; quels en ont été les pics ou les baisses, il s’agit d’autres aspects de la question. Il suffit de réaliser qu’à un moment donné de l’histoire des hommes – en l’an 2000 – le nombre d’êtres humains atteints de misère profonde est inacceptable, même s’il est communément admis qu’il ne représente que 14% de la population totale de la planète, certains prétendant que la réalité est bien supérieure

La population augmente de nos jours quotidiennement de 220 à 250 000 individus

Face à ce constat, s’il est possible de penser que l’accroissement de la population est porteuse de progrès, il est aussi permis d’imaginer qu’il peut avoir d’autres effets ? Mais n’est-il pas surprenant que personne n’en parle en termes de démographie ? Ne devons-nous pas, tous autant que nous sommes, ouvrir les yeux et en débattre sérieusement si nous voulons véritablement, sincèrement, offrir avec lucidité et pragmatisme quelques chances aux plus malheureux d’entre nous de voir s’améliorer durablement leur sort et surtout celui de leur descendance ?

Apprécier, sans se poser en juge, la mesure dans laquelle leur nombre influence le sort des hommes, tel est le sujet. Car s’il est possible aux individus qui bénéficient d’un confort matériel évident de se livrer avec un certain recul à une telle réflexion, tout se passe dans l’opacité d’une misère aggravée par une démographie galopante pour les autres. Les nantis faisant par ailleurs cette opinion qui dénonce la pauvreté, n’est-il pas utile d’y réfléchir, spécialement à l’époque où la population du globe a franchi le cap des 7 milliards ? Nul doute que ce soit d’autant plus indiqué que cette dénonciation repose sur des critères d’évaluation contestables – et contestés – et qu’elle semble ignorer, quand ce n’est pas nier, le rapport pouvant exister avec l’accroissement du nombre d’êtres humains qu’elle frappe.

Soulevant davantage de questions qu’ayant la prétention d’apporter de réponses, ce qui suit émane d’un profane, selon le terme servant aux experts à désigner ceux qui n’appartiennent pas à leur communauté. Néanmoins curieux de sociologie et interpellé par une misère omniprésente que la démographie entretient sans vergogne au vu et au su de tous, Candide voudrait partager les sentiments que lui inspire le croisement de ces deux disciplines.

Agnostique et apolitique, la simple observation d’une réalité démographique, mise en relation avec les inégalités sociales, laisse à chacun la liberté d’en prendre la part qu’il jugera compatible avec ses propres convictions, aussi bien religieuses que politiques.

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