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D. Schramm: «Non pas une, mais des communautés chinoises en France»

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JOL Press : Vous avez créé l’association « Chinois de France – Français de Chine ». Pourquoi ?

Donatien Schramm : J’ai créé cette association parce que je m’intéresse particulièrement au monde chinois. Ma femme est d’origine chinoise, donc j’ai voulu comprendre la culture de sa famille, qui est aux antipodes de la nôtre, et comprendre l’immigration chinoise en France. Il s’agissait de partager mes connaissances, permettre aux Chinois qui arrivent en France et qui ne parlent pas la langue de leur donner les outils pour apprendre le français, et comprendre à leur tour la culture française.

JOL Press : Quelles sont les principales difficultés que rencontrent les Chinois lorsqu’ils arrivent en France ?

Donatien Schramm : Les difficultés sont les mêmes pour les Chinois qui arrivent dans toute l’Europe. La première barrière, c’est la langue. La langue française est une langue compliquée à apprendre, mais ils en ont besoin avant tout pour obtenir des papiers. S’ils arrivent en Europe, c’est surtout par priorité de survieCe n’est pas forcément dans le but de découvrir une autre culture, mais vraiment par survie.

Une autre difficulté qu’ils rencontrent, c’est la précarité. Les démarches administratives sont complexes, donc c’est aussi là que nous intervenons, pour les aider à effectuer ces démarches.

JOL Press : Quelles activités et aides proposez-vous ?

Donatien Schramm : Premièrement, l’apprentissage du français. On donne des cours de langue, pour qu’ils puissent obtenir leurs papiers. Mais on ne se contente pas de les préparer au DILF [Diplôme initial de langue française] ou au DELF [Diplôme d’études en langue française]. Le but, pour nous, ce n’est pas de leur apprendre seulement à répondre à quelques questions. On les aide à prendre le métro, à faire les démarches nécessaires auprès des banques, on les emmène dans les musées, on les fait rencontrer des Français

L’association cherche en effet avant tout à les mettre en contact avec le monde français, on a donc mis en place des cours bilingues, pour les Chinois qui veulent apprendre le français, et inversement (environ 150 Chinois viennent dans notre association, et une centaine de Français). Ensuite, on leur propose des activités extérieures, on les emmène au cinéma, dans des vide-greniers, on les fait participer à la vie du quartier.

JOL Press : Quelle vision ont-ils de la France ?

Donatien Schramm : Un pays « romantique ». C’est vraiment le premier adjectif qui leur vient en tête lorsqu’ils évoquent la France. Un certain nombre de Chinois sont venus pour gagner de l’argent, et devenir riches. Ils viennent en France pour réussir socialement. Le quartier de Belleville à Paris est très connu en Chine.

Aubervilliers [en banlieue parisienne] sera bientôt aussi connu que Belleville. Ils savent que les Chinois là-bas ont trouvé leur place, et la mairie d’Aubervilliers a fait de gros efforts pour les accueillir. D’autres quartiers intra-muros comme le 13ème arrondissement, ou extra-muros (La Courneuve, Saint-Ouen…) sont aussi connus par les Chinois qui arrivent en France.

JOL Press : On parle beaucoup de l’entraide communautaire chinoise mais existe-t-il des conflits au sein de la communauté chinoise ?

Donatien Schramm : Bien sûr. Il n’y a pas une communauté chinoise, mais des communautés chinoises. Il y a vraiment des mondes différents, entre les Chinois de Chine, et les Chinois d’Indochine par exemple (Vietnam, Laos…). La Chine, c’est plus de 17 fois la superficie de la France. Vous pouvez vous imaginer les différences qui existent entre les Chinois de telle ou telle région. Il y a des différences d’appréciation, de langage, de culture… Même s’ils ont tous cette fierté d’être chinois.

Et ils ne sont pas tous logés à la même enseigne : il y aura des disparités entre celui qui est en France depuis 30 ans et celui qui vient d’arriver, entre les vieilles et les jeunes générations, etc. Ce n’est pas parce qu’on est chinois que l’on est forcément solidaire.

La solidarité existe, mais surtout avec les proches. Proches parce qu’ils sont membres de la même famille, parce qu’ils viennent du même village, ou parce qu’ils ont aidé untel, ou qu’untel a eu besoin d’eux. Donc cette solidarité existe encore, mais elle ne de déploie pas de la même manière dans tous les milieux.

Propos recueillis par Anaïs Lefébure

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