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D. Schramm: «Peu de familles suivent les traditions du Nouvel an chinois»

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JOL Press : C’est bientôt le Nouvel an chinois. Quelle importance revêt cette fête pour les Chinois ?

Donatien Schramm : C’est LA fête. C’est vraiment la plus importante. Il y a trois autres fêtes importantes pendant l’année : la fête de Qing Ming, au mois d’avril, qui serait l’équivalent de la Toussaint en France, consacrée au nettoyage des tombes ; la fête de Duanwu, qui tombe en général au mois de mai, et le 1er octobre, la fête nationale chinoise qui célèbre l’arrivée de Mao à Pékin (le 10 octobre, ancienne fête nationale, est aussi célébré par certaines personnes).

Il est important de comprendre qu’il n’y a pas nécessairement une visibilité de ces fêtes, qui ne sont pas du tout aussi commerciales que Noël ou Pâques en France. Bien sûr, on connaît le grand défilé du Nouvel an chinois, et la « fête des lanternes », qui a lieu 15 jours après le Nouvel an. Mais ce ne sont pas les seuls aspects de la fête.

JOL Press : Quels sont les plats traditionnels du Nouvel an chinois ?

Donatien Schramm : Il faut savoir que dans la Chine du Nord, la période du Nouvel an (janvier-février) est une période creuse pour l’agriculture, puisque toute la région est sous la neige et la glace. C’est donc la seule période de l’année où l’on peut faire la fête, et l’une des rares occasions de faire bombance. Traditionnellement, on mange beaucoup de viande à ce moment-là, et les plats sont très symboliques.

Par exemple, les raviolis chinois que l’on sert au moment du Nouvel an sont synonymes de richesse, parce qu’ils ont la forme de lingots d’or. Et les nouilles, de longévité, tout simplement parce qu’elles sont longues. Les Chinois mangent aussi beaucoup de poisson, qui symbolise le fait que l’on ne manquera de rien pendant l’année.

JOL Press : Offre-t-on des cadeaux à cette occasion ?

Donatien Schramm : Jamais. Sauf des petites enveloppes rouges que les familles s’échangent au moment des fêtes [le rouge symbolise le bonheur en Chine]. Dans les enveloppes, on glisse de l’argent.

Les parents donnent des sommes plus ou moins importantes aux enfants, de 50 à 100€ parfois. Tout cela dépend de la richesse de la famille, bien sûr.

JOL Press : Les familles rentrent-elles en Chine au moment du Nouvel an ?

Donatien Schramm : Les festivités sont censées durer quinze jours. Mais plus personne n’a le temps aujourd’hui de fêter le Nouvel an pendant deux semaines. L’économie tourne pourtant énormément au ralenti à cette période. En France, certaines familles retournent en Chine pour fêter le Nouvel an avec leurs proches, mais les billets d’avion étant souvent très chers, ils sont parfois obligés de partir plus tôt et rentrer plus tard, ce qui oblige les enfants à manquer l’école.

Aujourd’hui, la diaspora chinoise dans le monde, c’est 60 millions de personnes. Heureusement que tout le monde ne se retrouve pas en Chine à ce moment-là, ça deviendrait ingérable ! Mais les déplacements sont cependant très nombreux et entraînent de grosses difficultés de transport.

JOL Press : Tous les Chinois fêtent-il le Nouvel an ?

Donatien Schramm : Il faut enfin comprendre qu’il y a une vraie différence entre la tradition, et la réalité. Peu de familles suivent vraiment les traditions. Tout le monde ne se sent pas non plus obligé de fêter le Nouvel an. Et ceux qui sont dans la précarité ont encore plus de mal que les autres. Ce n’est donc pas automatique.

Le défilé du Nouvel an, tel qu’on peut le voir à Paris n’intéresse pas obligatoirement tous les Chinois. En fait, c’est souvent les associations qui se mobilisent énormément et viennent grossir les rangs, allant même parfois jusqu’à payer certaines personnes pour qu’elles défilent. Les enfants, ça les embête souvent plus de défiler en costume traditionnel que ça ne leur fait plaisir ! C’est le revers de la médaille.

Propos recueillis par Anaïs Lefébure

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