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La Chine et l’Union européenne: adversaires ou partenaires?

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Aux deux extrémités de l’Eurasie

De l’époque romaine à celle de Guillaume de Rubrouck, envoyé par Saint Louis, suivi par Marco Polo, puis à celle des jésuites envoyés par Louis XIV et de l’ambassadeur britannique McCartney, les habitants de l’Europe, ce « cap de l’Asie » selon la formule du poète Paul Valéry, ont éprouvé quelques difficultés à rencontrer et à reconnaître les Chinois. Difficultés partagées par les Chinois, eux-mêmes longtemps repliés sur leur monde. Question géographique mais, surtout, de différence culturelle. En 1794, Lord McCartney soulignait déjà que « rien ne serait plus trompeur que de juger la Chine selon nos critères européens ».

Partenaires considérables et incontournables

L’Union européenne est devenue le premier partenaire commercial de la Chine. Mais leurs rapports sont obérés par le fait qu’elle est déficitaire, ce qui pose la question des délocalisations, des désindustrialisations, et de la réciprocité. Contrairement aux autres pays européens, notamment à la France, l’Allemagne affiche depuis la crise, structurellement, une balance excédentaire avec la Chine. Selon les chiffres officiels publiés par le Bureau de la douane chinoise, le commerce extérieur entre l’Allemagne et la Chine s’élève à 169 milliards de dollars en 2011 ; les exportations allemandes vers la Chine s’élèvent à 92,72 milliards de dollars et les importations à 76,43 milliards. Plus de 4 000 entreprises allemandes sont implantées en Chine.

Sur le plan technologique, la Chine est intéressée par des « partenariats industriels structurants » : Airbus, Galiléo, ITER, l’ITER est un gigantesque programme de recherche d’une sorte de soleil nucléaire fournissant plus d’énergie qu’il n’en consomme, et dont le chantier est à Cadarache, en Provence cette localisation avait été appuyée par l’UE, la Russie et la Chine, et non par Tokyo, Séoul et Washington.

Trois grands problèmes se font jour : les transferts techniques, l’euro trop fort (sauf pour l’Allemagne) et, enfin, les dettes publiques européennes, occasion pour la Chine de voler au secours des PIGS (Portugal, Irlande, Grèce, Espagne), qui doivent en échange mettre en gage certains de leurs fleurons nationaux, comme le port grec du Pirée… La Chine a en effet les moyens de racheter une partie des dettes des « pays européens du club Méditerranée », selon une expression allemande quelque peu méprisante. De surcroît, aux prises avec les difficultés américaines, la Chine a un intérêt évident à diversifier ses positions de l’autre côté de l’Atlantique. L’Europe absorbait, juste avant la crise, 18 % de ses exportations (contre 22 % pour les États-Unis). Véritablement unie, ou fédérée, l’Europe serait la première puissance économique du monde. Ce ne peut être le cas tant que, à cause de ses divisions, elle ne dispose pas d’une politique commune, alors que le pouvoir fort de Pékin, qui n’est pas entravé par le débat démocratique, peut pratiquer une politique cohérente sur le long terme.

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Le grand livre de la Chine. Histoire et géographie. Civilisation et pensée. Economie et géopolitique, Eyrolles (17 janvier 2013)

Claude Chancel est agrégé d’histoire et spécialiste de géopolitique. Il est déjà l’auteur de plusieurs ouvrages et en particulier de Le monde chinois dans le nouvel espace mondial, PUF, 2008. Libin Liu Le Grix est française d’origine chinoise. Installée en France, elle dirige l’entreprise de conseil France Chine qu’elle a créée après avoir collaboré avec Jacques Marseille.

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