Site icon La Revue Internationale

L’affaire Pistorius révèle l’explosion de la criminalité en Afrique du Sud

[image:1,l]

Quelques mois auparavant, le monde applaudissait Oscar Pistorius, dit « Blade runner », l’athlète doublement amputé dont la détermination l’a poussé jusqu’aux Jeux Olympiques, concourant auprès d’autres athlètes valides grâce à ses lames compensant ses jambes.

Un mobile toujours flou

Puis, le jour de la Saint-Valentin, le drame survint.

Les Sud-Africains se sont réveillés, jeudi 14 février, en apprenant que le sportif le plus célèbre de leur pays était accusé de meurtre après avoir tué sa petit-amie, la mannequin Reeva Steenkamp, la nuit précédente.

Si le mobile n’est pas encore clairement établi, la police a rapidement confirmé avoir retrouvé sur les lieux un pistolet 9mm, enregistré au nom d’Oscar Pistorius qui, lors de récentes interviews, avait déjà parlé de son amour pour les armes à feu, et avait même tweeté une photo de lui visitant un champ de tir.

Les sponsors lâchent l’athlète sud-africain

Oscar Pistorius, 26 ans, a passé la nuit dans la cellule d’une prison de Pretoria et a comparu devant une cour de justice, vendredi 15 février au matin, où il a été officiellement inculpé de meurtre.

Son avocat, Kenny Oldwage, a affirmé auprès de la police que son client était « ému », mais qu’il allait « tenir le coup ».

Pendant ce temps-là, aux quatre coins du monde, les sponsors de « Blade runner » retirent une à une les publicités mettant en scène l’athlète inculpé. C’est le cas de Nike, qui décrivait Oscar Pistorius comme une « balle » tirée.

De nombreuses « disputes familiales » dans la maison d’Oscar Pistorius

Les Sud-Africains semblent désorientés par la tournure que prennent les évènements. Le pays, depuis ces dernières semaines, est en proie à une violence endémique qui a atteint tous les paliers de la société, et qui se traduit notamment par des taux très élevés de violences et d’agressions sexuelles contre les femmes.

« Véritable héros sud-africain, Oscar est aujourd’hui devenu une tragédie sud-africaine, » déclare ainsi Sarah Britten, bloggeuse.

Dans un premier temps, les médias ont rapporté qu’Oscar Pistorius aurait confondu sa petite amie avec un cambrioleur. Des rumeurs indiquaient d’ailleurs qu’il ne s’agissait pas de la première confusion pour l’athlète. La police a tôt fait de démentir ces bruits et une porte-parole de la police nationale, Denise Beukes, a déclaré aux journalistes, depuis le golfe de luxe dans lequel vit Oscar Pistorius, qu’il n’y avait eu aucun signe d’effraction dans la maison et que seules deux personnes étaient là au moment des faits – le résident et la défunte.

Denise Beukes a également ajouté que la police avait déjà dû se rendre à plusieurs reprises dans cette maison pour des plaintes concernant des « dispute familiales ».

L’accès aux armes à feu est trop facile

Adele Kirsten, porte-parole de Gun Free South Africa, une association qui lutte contre le port d’armes, affirme également que les femmes, dans ce pays, doivent faire face à de grandes violences dans leur propre famille, des violences qui peuvent dégénérer en meurtre puisque, la plupart du temps, les femmes sont tuées par des gens qu’elles connaîssaient.

« Une des raisons est avant tout l’accès aux armes, » explique-t-elle. « Si vous regardez Oscar, il est clair qu’il avait un accès facile aux armes à feu. » « Les gens se mettent en colère, les gens se battent, mais si vous avez une arme, cela peut devenir mortel. »

Alors que l’Afrique du Sud exige de strictes vérifications des antécédents avant qu’une arme puisse être achetée, ainsi qu’une surveillance dans les cinq années qui suivent l’achat, les applications de ces règles sont parfois inégales.

L’Afrique du Sud est habituée à la violence

Adele Kirsten espère désormais que la mort de Reeva Steenkamp sera un « moment décisif » pour l’Afrique du Sud, qui conduira ensuite à l’interdiction des armes à poings.

« Mais je ne suis pas sûre, » ajoute-t-elle. « Nous sommes tellement habitués à la violence. Cela arrive tous les jours et tous les meurtres ne reçoivent pas autant de couverture médiatique que pour l’affaire Oscar Pistorius. »

Les taux de violence criminelle ont diminué depuis ces dernières années, mais restent effroyablement élevés par rapport à la moyenne mondiale. La possession d’armes illégales et la possession d’armes enregistrées restent très courantes et les Sud-Africains sont nombreux à acheter leurs propres armes pour se protéger.

Un journaliste écrivait l’année dernière qu’Oscar Pistorius, qui vit pourtant dans une résidence sous haute protection, dormait toujours très près de son revolver, une batte de baseball derrière sa porte et une seconde arme près de sa fenêtre.

Reeva Steenkamp se battait pour le respect des femmes

Les exemples de décès tragiques dus à l’utilisation d’armes à feu, dont un certain nombre impliquant les stars du sport national, sont devenus monnaie courante.

En septembre dernier, l’ancien champion du monde de boxe, le poids lourds Corrie Sanders, a été tué par balle lorsque des voleurs ont pris d’assaut un restaurant situé près de Pretoria et dans lequel le champion s’était rendu avec sa famille. Une fois dans le restaurant, les hommes ont tout simplement tiré sur la foule, au hasard.

La même semaine, un ancien champion olympique était également touché à l’épaule lors du cambriolage de son exploitation agricole familiale, au nord-ouest de Johannesburg.

Quelques heures avant sa mort, Reeva Steenkamp tweetait encore des messages exhortant le monde à se dresser contre la maltraitance des femmes. Elle avait également posté un message concernant Anene Booysen, 17 ans, violée par plusieurs hommes et assassinée dans la ville de Bredasdorp, un évènement qui avait scandalisé le pays.

Global Post / Adaptation Sybille de Larocque – JOL Press

Quitter la version mobile