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Le Parlement européen doit-il rester à Strasbourg?

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C’est un sujet qui divise depuis de nombreuses années les députés du Parlement européen. Faut-il conserver ce fonctionnement bicéphale ou faut-il que les eurodéputés se retrouvent dans un siège unique à Bruxelles ? Pour le gouvernement français, il n’est pas question de remettre en cause la légitimité de Strasbourg. « La pluralité des lieux de travail pour les institutions et les organes européens reflète la diversité de l’Union européenne. Nous y sommes, comme beaucoup d’autres, pleinement attachés », rappelait le ministère des Affaires étrangères en 2011.

Division chez les députés

Le Parlement européen siège à Strasbourg, au sein des bâtiments Louise Weiss et Winston Churchill. S’il n’y a bien qu’un seul siège, il y a néanmoins plusieurs lieux de travail : Strasbourg, Bruxelles et Luxembourg. Ont lieu à Strasbourg les douze sessions plénières de l’année, une par mois sauf en août (aucune) et en septembre (deux), qui actuellement durent chacune trois jours et demi. À Bruxelles se tiennent les commissions parlementaires – la proximité du Conseil permet aux députés d’effectuer un travail important avec ce dernier – mais aussi six « mini-sessions » par an, officiellement appelées sessions plénières additionnelles. Enfin, la ville de Luxembourg a été dotée du Secrétariat général (administration et services de traduction et d’interprétation).

Une situation que certains eurodéputés dénoncent depuis de nombreuses années. En 2006, la Suédoise Cecilia Malmström lançait une pétition sur Internet pour que le Parlement européen soit entièrement transféré à Bruxelles. Selon elle, la maintenance du site de Strasbourg coûterait plus de 200 millions d’euros de frais directs (les bâtiments) et indirects (les transports entre Bruxelles et Strasbourg). Toute l’année, 80 personnes travaillent à Stasbourg, contre 3270 à Bruxelles et 2185 à Luxembourg. Même inoccupés, les 340 000 m² de bâtiments de la capitale alsacienne doivent être entretenus et surveillés.

En 2002, une étude commandée par le secrétaire général du Parlement Julian Priestley avait estimé qu’un seul site parlementaire pourrait faire économiser 22 millions d’euros de salaires, équivalent à 317 postes (chauffeurs, concierges, gestionnaires de locaux et fournitures). Les navettes obligent, chaque mois, plus de 3000 personnes à se déplacer.

Les députés préfèrent Bruxelles à Strasbourg

Mais selon les défenseurs d’un siège unique à Bruxelles, l’enjeu n’est pas uniquement économique, mais aussi écologique : dans un rapport publié la même année, un eurodéputé britannique, Edward McMillan-Scott, expliquait que les navettes entre les deux hémicycles occasionnaient le rejet de 19 000 tonnes de CO2 dans l’atmosphère.

D’après une étude de l’université de Zurich, rendue publique début 2011, 91 % des députés préfèreraient Bruxelles à Strasbourg si un seul site devait être retenu, contre 70 % en 2010. Les dépenses supplémentaires engendrées par les deux sites représenteraient, selon ce sondage, 10 millions d’euros par session plénière soit 120 millions d’euros par an.

Si les députés européens votaient en octobre dernier cinq amendements visant à transférer à Bruxelles le siège du Parlement européen, en décembre la Cour de justice de l’Union européenne affirmait que « les traités imposent au Parlement européen, dont le siège est fixé à Strasbourg, de se réunir en douze périodes de sessions plénières mensuelles par an ». L’affaire n’est donc pas près d’être réglée…

Les Français très attachés à Strasbourg

Dans un amendement au projet de budget 2013, 74 % des députés européens, soit 518 sur 700 votants, ont demandé au Conseil européen de préparer « une feuille de route pour l’instauration d’un siège unique d’ici au 30 juin 2023 ». Il ne serait donc pas surprenant d’entendre François Hollande sur le sujet lors de son intervention, ce mardi 5 février, à l’occasion d’une session plénière du Parlement à Strasbourg.

« À Strasbourg, le Parlement européen marque clairement son indépendance par rapport à la Commission et au Conseil, présentés comme la bureaucratie bruxelloise », plaidait en 2011 l’eurodéputée Catherine Trautmann, ancienne maire de Strasbourg.

« Le débat entre les sièges multiples du Parlement européen n’est pas nouveau et mérite des débats approfondis », soulignait en 2011 aussi Marie-Christine Vergiat, deputée européenne Front de Gauche. « La remise en cause du siège de Strasbourg aurait des conséquences économiques significatives pour la ville de Strasbourg qui a organisé depuis plusieurs décennies une partie de son économie autour de ces sessions. Ces éléments auraient du pouvoir être débattus et pesés publiquement et sérieusement. »

Certains souhaitent même que Strasbourg devienne définitivement le siège unique du Parlement : « Strasbourg doit être désormais non seulement le siège des sessions plénières, mais la ville où se déroule la totalité des travaux parlementaires », a expliqué Alain Marschallik, président de « Strasbourg capitale de l’Europe », mouvement pour le renforcement de la présence du Parlement européen à Strasbourg. « La capitale législative est à Strasbourg », a-t-il ajouté. Un avis partégé par le chef de l’État ?

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