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Mamphela Ramphele, la militante anti-apartheid qui défie l’ANC

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« Construire le pays de nos rêves »

Elle avait assuré ne jamais entrer en politique. C’est pourtant ce que Mamphela Ramphele a fait, lundi 18 février, en annonçant la création d’un parti d’opposition en Afrique du Sud. Baptisé « Agang » – qui signifie « construisons » en langue sotho – ce nouveau parti politique permettra à la militante anti-apartheid de concurrencer le Congrès National africain (ANC), qui a célébré son centième anniversaire l’année dernière.

« Aujourd’hui, j’annonce que je suis en train de travailler avec un groupe de citoyens dans le but de former un parti, une plate-forme politique dont l’objectif sera de raviver l’espoir qu’il est possible de construire le pays de nos rêves », a déclaré Mamphela Ramphele, 65 ans, à Johannesburg.

Contre « la corruption, le népotisme et le favoritisme »

Le Congrès national africain, au pouvoir depuis la fin de l‘apartheid, a déclaré avoir « pris note » de cette déclaration, tout en considérant que le discours de la militante n’apportait rien de nouveau. 

Dans son allocution prononcée devant la Cour constitutionnelle à JohannesburgMamphela Ramphele a estimé que le rêve d’une nation « arc-en-ciel » était en train de s’essoufler sous le pouvoir de l’ANC, dont elle accuse les membres d’être corrompus : « Notre pays est en danger, parce que l’intérêt particulier est devenu le moteur de nombre de [nos dirigeants], qui devraient se concentrer sur le service du public », rapporte le site Jeune Afrique. Pour elle « la corruption, le népotisme et le favoritisme sont devenus la norme de conduite de beaucoup de gens dans le service au public ». 

Une figure du militantisme anti-apartheid

Fille de parents instituteurs, Mamphela Ramphele est née le 28 décembre 1947 près de Pietersburg – aujourd’hui  Polokwane – dans la province du Limpopo en Afrique du Sud. Brillante élève, elle décide d’intégrer la Natal Medical School en 1967 – la seule université qui accueille à l’époque des étudiants noirs sans la permission du gouvernement – pour étudier la médecine.

Elle grandit sous le régime de l’Apartheid et devient une figure du militantisme étudiant en devenant membre du Mouvement de Conscience noire, aux côtés de Steve Biko, l’un des principaux représentants du mouvement avec qui elle aura deux enfants. Assassiné par la police le 12 septembre 1977, Steve Biko aurait été selon elle « aussi engagé » qu’elle s’il avait été encore en vie aujourd’hui. Comme elle, il se serait engagé en « mobilisant les Sud-Africains  pour bâtir ce pays de nos rêves et faire de l’Afrique du Sud, un pays de la modernité et de la démocratie », explique-t-elle au quotidien britannique The Guardian .

Sept ans passés en résidence surveillée

Bannie de 1977 à 1984 dans la ville de Tzaneen, au nord-est du Transvaal, pour son militantisme Mamphela Ramphele poursuivra cependant ses études. Elle obtient un doctorat en anthropologie sociale à l’université du Cap, un diplôme en gestion des entreprises à l’université d’Afrique du Sud, ainsi que des diplômes en hygiène et médecine tropicales et santé publique. En 1986, elle deviendra  responsable d’un programme de recherche de à l’université du Cap puis y sera nommée Recteur en 1991. C’est la première femme noire à accéder à ce poste en Afrique du Sud. 

En 2000, elle est nommée Directrice générale de la Banque mondiale, une fonction dont elle démissionnera quatre ans plus tard. Elle a récemment quitté son poste de présidente de la compagnie minière sud-africaine Gold Fields. Plusieurs casquettes, et un parcours exceptionnel donc. Mais Mamphela Ramphele refuse qu’on la voie comme un « membre de l’élite intouchable »« Je ne fais pas partie de l’élite. Je refuse qu’on me définisse comme cela » indique-t-elle.

Défier le Congrès national africain

En créant un nouveau parti politique  « Agang », elle espère bien rassembler des millions de Sud-Africains déçus par les 19 ans de pouvoir de l’ANC et participer aux élections de 2014 en Afrique du Sud. 

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