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Secret des milliardaires chinois: la permanente course au profit

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En 2011, la Chine comptait officiellement 146 milliardaires en dollars. Jet privés, yachts, vignes dans le Bordelais, ils ne cachent pas leurs yuans et goûtent au bling bling sans complexes. À la tête du géant des boissons Wahaha ou de Baidu, le Google chinois, ces patrons ont bâti des empires en quelques années. Élevés à l’économie de marché, ils sont plus jeunes que leurs homologues occidentaux, et bon nombre sont souvent des femmes. Originaires des villes mais surtout des champs, self made men sans le sou pour la plupart, ces « nouveaux ultra-riches » nous racontent leur histoire et leurs parcours souvent mouvementés.

Extraits de Chine – Les nouveaux milliardaires rouges, de Laure de Charette et Marion Zipfel (Archipel)

Lancé sur la voie des réformes, le pays a d’immenses besoins. Les entrepreneurs se lancent alors dans une course au profit tous azimuts, saisissant toutes les opportunités à portée de main. Biens de consommation, industrie de détail, services : tous les secteurs sont concernés.

Conséquence de cet élan de réformes et de modernisation, l’urbanisation des villes se fait à marche forcée. L’immobilier devient l’un des secteurs les plus efficaces pour s’enrichir en Chine, comme l’illustre la réussite flamboyante de Zhang Xin et de son mari. En quinze ans, cette jeune femme est devenue milliardaire grâce à la pierre.

À la différence de nombreux milliardaires chinois, Zhang Xin n’est pas une autodidacte. À quatorze ans, elle est ouvrière dans une usine textile de Hong Kong. À vingt ans, elle obtient une bourse pour partir étudier en Grande-Bretagne et décroche un master en économie du développement de la prestigieuse université de Cambridge.

Elle commence sa carrière professionnelle chez Goldman Sachs, à Wall Street. Très vite, elle comprend que son avenir se dessine en Chine, alors en plein boom économique. En 1994, elle s’installe à Pékin, où elle rencontre Pan Shiyi, jeune promoteur immobilier originaire d’une famille pauvre du Gansu, province de l’Ouest du pays. Elle l’épouse quelques mois plus tard et, en 1995, ils fondent Soho, qui deviendra l’un des plus gros promoteurs privés de Chine.

Pékin devient leur terrain de jeu privilégié. Lancé en 1998, leur premier projet, Soho New Town, sort de terre en 2001. Dans le prolongement de l’avenue Chang An, qui traverse la ville d’est en ouest, un ensemble de tours résolument modernes pour les standards de l’époque rencontre un vif succès auprès des petites entreprises en quête d’espaces de bureaux et d’appartements. Les projets se multiplient, toujours plus grands, aux lignes toujours plus futuristes, faisant appel à des architectes du monde entier, tels le Britannique Zaha Hadid ou le Japonais Kengo Kuma. En 2007, l’introduction en bourse permet au couple prodige de lever 1,9 milliard de dollars…

La recette de leur succès : surfer sur le besoin de logements, disposer de bonnes connexions pour obtenir les terrains et construire vite et bon marché.

— À Pékin, la tendance est de s’orienter vers des choses audacieuses et de grande envergure, explique Zhang Xin, citée par le magazine Forbes. Les Pékinois ont grandi avec des avenues à huit voies, des grands immeubles. Ils aiment le gigantisme. L’aéroport est le plus grand, leur stade est le plus grand. Tout doit être grand, très grand, alors qu’à Shanghai, les gens sont plus attentifs aux détails, aux matériaux, et ne se dirigent pas nécessairement vers ce qu’il y a de plus grand.

Justement, les ambitions des deux époux ne s’arrêtent pas à Pékin. Soho a également jeté son dévolu sur Shanghai, avec pas moins de onze projets d’une valeur totale estimée à 25,5 milliards de yuans, soit environ 3 milliards d’euros. Forts de leur succès, ils se retrouvent régulièrement distingués. Pan Shiyi a été élu en 2011 « personne la plus influente du secteur immobilier en Chine » par le site Sina.com ; Zhang Xin apparaît régulièrement dans les classements des femmes d’affaires les plus puissantes de Fortune, Forbes, ou encore du Financial Times.

Aujourd’hui, à quarante-cinq ans, celle qui incarne le nouveau rêve chinois, qui a fait fortune grâce aux aspirations de la nouvelle classe moyenne à devenir propriétaire, ne jure pourtant plus que par la religion. Elle s’est convertie au Baha, la plus récente des religions révélées, qui prône une forme d’humanisme. Désespérée des « ravages du matérialisme » à outrance, elle dit espérer que la foi permettra à la Chine de renouer avec le développement spirituel.

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Chine – Les nouveaux milliardaires rougesArchipel (13 février 2013)

Laure de Charette est correspondante du Nouvel Économiste à Singapour depuis 2010. Elle a notamment travaillé au service France du quotidien 20 Minutes. Elle est l’auteur de Gotha City, enquête sur le pouvoir discret des aristos (Ed. du Moment, 2009) et le coauteur du Guide des Bécébranchés (L’Archipel, 2009).

Marion Zipfel, diplômée en politique chinoise de la Chinese University of Hong Kong, vit à Singapour et collabore notamment à L’Expansion, ainsi qu’à plusieurs magazines spécialisés sur la Chine. Elle a co-animé l’émission Chine Hebdo sur BFM Radio. Avec Chenva Tieu, elle a mis sur pied SinoSphère, le premier magazine du PAF consacré à la Chine et diffusé sur France Ô.

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