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Stop aux voitures à cheval dans les rues de Bogota

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Dans la capitale colombienne, habitée par 8 millions de personnes, le trafic routier est cauchemardesque. Mais ce n’est pas le réseau qui est en cause.

Le maire de Bogota ne veut plus de voitures à cheval

Les coupables ? Ces voitures à cheval qui cohabitent avec voitures et motos sur les routes de Bogota. Sans rétroviseurs, ni clignotants, ils sont souvent à l’origine d’accidents de la route. Les piétons hurlent alors contre les tas de fumiers qui jonchent les trottoirs et les associations de défense des animaux crient à la protection de ces chevaux maltraités.

Ils seraient à peu près 3000 à envahir quotidiennement les rues de Bogota. Tous les jours, ils parcourent les rues de la ville et ramassent les déchets sur la voie publique : bouteilles, canettes et cartons.

Pour résoudre ce problème, le maire de Bogota, Gustavo Petro, a lancé un grand programme visant à éliminer toutes les voitures à cheval de la ville d’ici à la fin de l’année. Pour cela, la municipalité compte offrir aux conducteurs admissibles un crédit de 12 000$ pour leur permettre d’acquérir un véhicule neuf.

Au service de la ville

« Ces gens ont été utiles à la ville pendant de nombreuses années en ramassant les ordures et en les recyclant et n’ont jamais reçu de contreparties sociales, » déclare Ana Luisa Flechas, secrétaire aux Transports de Bogota. « C’est pourquoi le maire a décidé de faire de ce programme une priorité ».

Jusqu’à ce jour, de nombreux autres plans ont déjà été lancés pour tenter de décourager ces voitures à cheval encombrantes, ils ont tous échoué notamment en raison de la difficulté, pour les conducteurs, de trouver un nouveau travail.

La plupart d’entre eux sont d’anciens ruraux, illettrés, arrivés ici très jeunes. Sans formation ni métier, le recyclage des ordures est devenu leur seule option.

Que faire des conducteurs ?

« Je suis arrivé ici avec ma femme il y a trente ans, » explique Jorge Sanchez, exploitant d’une flotte de cinq voitures à cheval. « Nous sommes venus ici en quête de nouveaux horizons. Mais nous ne savions pas quoi faire, alors nous avons commencé le recyclage. »

En marge de ce problème de circulation routière, qui provoque régulièrement morts et blessés, les défenseurs des animaux commencent également à s’alarmer du traitement de ces chevaux par leurs propriétaires.

Pour Martha Ciro, présidente de l’Association colombienne de défense des animaux, plusieurs problèmes entrent en compte.

Des chevaux maltraités

Les chevaux ne peuvent pas, normalement, tirer plus de 800 kilos sur le dos. Dans les rues de Bogota, les chevaux portent parfois le double, motivés par les coups de fouet récurrents.

L’asphalte est également trop dur pour les sabots d’un cheval, qui peut parfois provoquer des infections lorsque les chevaux n’ont pas de fers. En outre, le régime idéal pour les chevaux est constitué d’un mélange d’herbe et de concentré spécial. Or la plupart des recycleurs nourrissent leurs chevaux à base de carottes seulement, ce qui, selon Martha Ciro, est trop léger pour leur alimentation.

« Ces chevaux sont torturés, » n’hésite-t-elle pas à dire.

Tous ces éléments ont finalement convaincu le maire de la capitale, un ancien guérillero de gauche qui a pris ses fonctions l’an dernier, de mettre en place un projet de 40 millions de dollars qui devrait permettre d’éliminer ces voitures à cheval.

12 000 dollars pour vivre sans chevaux

La première étape du projet a consisté à effectuer un recensement de ces voitures. Pour cela, des puces électroniques ont été fixées sur les animaux afin d’empêcher les tricheurs d’obtenir une aide non justifiée de la ville. Les légitimes propriétaires de chevaux ont eu ensuite la possibilité de réaliser l’échange de leur moyen de locomotion contre un crédit véhicule de 12 000$ ou contre un capital de départ qui leur permette d’ouvrir une petite entreprise.

« C’est un très bon programme pour les chevaux comme pour leurs propriétaires, » estime Martha Ciro, impliquée dans le programme qui permettra de trouver de nouveaux propriétaires aux chevaux. « Cela leur permettra d’améliorer leurs conditions de travail. »

Cette tentative de la mairie sera peut-être la bonne et il semble y avoir aujourd’hui un large soutien du programme parmi les conducteurs de voitures à cheval, dont la plupart nient avoir maltraité leurs montures.

Aspect affectif

Alexander Rozo, né sur une de ces voitures il y a 37 ans après que sa mère a accouché prématurément, sillonne les rues avec un cheval noir nommé Alice. Il gagne environ 30$ par mois, mais estime que ces profits pourront augmenter lorsqu’il pourra se déplacer tout autour de la ville en beaucoup moins de temps.

Reste l’aspect affectif de cette histoire. Alexander Rozo avoue, qu’aujourd’hui, Alice fait comme « partie de la famille » et que celle-ci lui manquera lorsqu’elle sera placée dans sa nouvelle famille d’accueil.

« Ce sera très difficile, » avoue encore Daniel Moya, qui dirige une association de conducteurs de voitures à cheval. « Le jour où nous devrons quitter nos chevaux, nous pleurerons tous. »

Global Post / Adaptation Sybille de Larocque – JOL Press

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