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Francophonie: portraits de deux femmes engagées

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Pour la première fois, un forum mondial pour la francophonie s’est ouvert mercredi 20 mars au musée du Quai Branly à Paris, à l’occasion de la célébration de la Journée de la francophonie. Environ 400 participantes venues de tout l’espace francophone ont apporté leurs témoignages, des idées et des propositions pour lutter contre la régression des droits des femmesParmi elles, Michel-Ange Dagrain, étudiante en Haïti et Eve Bazaiba Masudi, Présidente de la commission socioculturelle à l’Assemblée nationale en République Démocratique du Congo. JOL Press les a rencontrées. 

La « bataille intellectuelle » de Michel-Ange Dagrain, étudiante en Haïti

[image:2,s] L’été dernier, Michel-Ange, 23 ans, étudiante en troisième année à l’Ecole supérieure d’infotronique, a été victime de discrimination. « J’ai fait une demande de stage dans une entreprise en Haïti. Lorsque le responsable a eu mon CV sous les yeux, et qu’il a vu que j’avais des connaissances en programmation et en web design, il m’a demandé si je savais me servir de Word pour écrire un texte ». Sur ce, Michel-Ange, lauréate de sa promotion, lui explique qu’elle sait non seulement se servir de Word, mais qu’elle veut être assistante programmeur et qu’elle désire mettre sa connaissance au service de cette entreprise. Mais l’employeur hésite : « Une femme en programmation… Pour ne pas avoir de mauvaise surprise, tu vas plutôt t’occuper de la rédaction de texte et de lettres », rétorque-t-il.

Choquée, Michel-Ange rentre chez elle et se dit qu’elle ne cherchera plus de travail. Désormais elle mettra toute son énergie pour créer sa propre entreprise après les études. « Une entreprise créée par une femme et pour des femmes », dit-elle fièrement. La jeune femme s’envole d’ailleurs en Estonie dans quelques jours, pour assister à un forum sur l’entreprenariat afin d’apprendre le nécessaire pour la bonne marche de son entreprise.

Très active dans son pays, Michel-Ange Dagrain a réuni un groupe de cinq autres jeunes filles de son école, avec qui elle a entamé un travail de sensibilisation auprès des jeunes dans les établissements scolaires. « Ce qui m’intéresse le plus c’est la bataille intellectuelle », explique-t-elle. « Nous nous rendons dans les écoles secondaires, de filles uniquement, et présentons notre travail pour montrer que les femmes sont capables de s’affirmer dans le monde de la technologie ».

Pour cela, l’étudiante a mis en place une « campagne d’alphabétisation technologique » : « on montre aux filles comment se servir de la technologie, et qu’il n’y a rien de magique là-dedans ! ».

Comme Michel-Ange, il existe en Haïti d’autres groupes de femmes militantes dans le domaine de la technologie qui se mobilisent pour encourager les autres femmes à s’affirmer.  C’est grâce au travail de ces activistes que davantage de jeunes filles se lancent dans le domaine de la science. Pour Michel-Ange« la technologie comme l’informatique, n’est pas un domaine réservé uniquement aux hommes. Les filles aussi peuvent faire des choses extraordinaires ».

Eve Bazaiba Masudi, députée nationale en RDC

[image:3,s] Eve Bazaiba Masudi attendait le Forum avec impatience. Après avoir été sénatrice pendant cinq ans, elle préside aujourd’hui la commission socioculturelle à l’Assemblée nationale en République Démocratique du Congo. Parallèlement, elle est aussi consultante sur la question des droits humains et préside la Ligue des femmes congolaises pour les élections, une organisation qui regroupe les femmes politiques de différences tendances. « Je les forme et je me bats pour accroître la participation politique des femmes dans les instances de prise de décision », explique-t-elle.  « Je suis convaincue qu’une femme qui entre politique sera changée par la politique. Mais si plusieurs femmes entrent en politique, c’est elles qui transformeront la politique et l’intérêt général ».

Du point de vue de la loi, les femmes et les hommes sont égaux en droit en RDC. « Le Congo a adopté plusieurs conventions internationales relatifs aux droits humains, au droit spécifique de la femme, des enfants et d’autres catégories vulnérables ». Cependant, le pays conserve le code de la famille limitant la capacité juridique de la femme mariée. Pour Eve Bazaiba Masudi, il faut « une réforme en profondeur du droit congolais ». Une réforme qui implique « l’abrogation des lois discriminatoires à l’égard de la femme et en contradiction avec ces conventions internationales ».

En RDC, la femme a ses capacités juridiques limitées.« Elle est  adjointe par l’article 448 du code de la famille qui exige une autorisation maritale pour prendre un engagement, signer un contrat…C’est une aberration ! » s’exclame-t-elle. « Une femme doit travailler comme trois, quatre, cinq personnes, elle doit exceller pour qu’on l’accepte, alors que pour un homme c’est naturel… »

Pour la députée, le droit des femmes passe par l’éducation, l’un des thèmes majeurs du forum : « Eduquer une femme, c’est éduquer toute une nation ». Mais comment avoir accès à une éducation de qualité dans un pays en proie à un conflit armé comme la RDC, lorsque les gens sont sans cesse obliger de bouger ? « Les anciennes écoles sont devenues des casernes de militaires » constate-t-elle. « En RDC, il est aujourd’hui pratiquement impossible d’avoir accès à l’école primaire ».  

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