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Fukushima: état des lieux, deux ans après la catastrophe nucléaire

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Le 11 mars 2013, à 14h46, les sirènes vont retentir au Japon, à la même minute où le violent séisme de magnitude 9 a frappé la côte nord-est du Japon, il y a deux ans, entraînant un tsunami dévastateur, emportant tout sur son passage.

L’ombre de Tchernobyl continue de planer

La centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, située sur le littoral, n’a pas été épargnée : sous le choc de la vague, qui atteignait 20 mètres de haut par endroits, les systèmes de refroidissement tombent en panne, provoquant une fusion du combustible dans trois réacteurs.

Vingt-cinq ans après la catastrophe de Tchernobyl, le Japon fait face au deuxième plus grave accident nucléaire. Près de 19 000 personnes sont mortes, et un million de maisons ont été détruites. Deux ans plus tard, il y a toujours près de 160 000 personnes déplacées.

La situation au cœur de la centrale de Fukushima

Mercredi 6 mars, les médias étrangers au Japon ont été invités par la Tokyo Electric Power Company (Tepco) à se rendre dans la centrale de Fukushima. Selon les photos publiées par Le Quotidien du Peuple, le taux de radioactivité détecté à proximité du réacteur 4 est de 114 mSv/h, soit environ 1000 fois le taux acceptable pour l’homme en un an.

Selon les données de la compagnie électrique, propriétaire de la centrale, et de l’Autorité nucléaire japonaise, la situation s’est cependant stabilisée dans la centrale.

Deux grands chantiers sont en cours : le premier vise à vider la piscine du réacteur 4, afin de sortir le combustible usé de la cuve, qui ne supporterait pas un deuxième séisme. Le retrait devrait s’achever fin 2014. Le deuxième chantier est celui du réacteur 3 : une structure de protection autour du réacteur est en cours de construction, afin d’éviter les rejets. Le démantèlement total des réacteurs devrait prendre entre 30 et 40 ans.

160 000 personnes déplacées

Avant la catastrophe, ils étaient plus de deux millions d’habitants à vivre dans le département de Fukushima. Depuis l’accident, beaucoup ont dû quitter leurs maisons dévastées. Près de 160 000 personnes ont été déplacées : 100 000 se sont installées ailleurs dans le département, et 60 000 sont parties vivre dans le reste du Japon, selon un rapport rendu public à l’été 2012 par l’Agence de la reconstruction japonaise.

Les individus reconnus comme « évacués » – ceux qui vivaient dans un périmètre de 20 kilomètres autour de la centrale, devenu « zone interdite » ou « zone d’évacuation forcée », ceux qui vivaient dans un périmètre de 20 à 30 kilomètres, considéré comme « zone d’évacuation non obligatoire » ou ceux qui vivaient dans des « hot spots », au-delà du périmètre de 30 kilomètres – reçoivent de Tepco 1000 à 1200 € par mois passé hors de chez eux.

La santé physique et mentale des habitants affectée par la catastrophe

Selon Hiroshi Suzuki, qui dirige une commission consultative pour la reconstruction de la province de Fukushima, « il n’y a pas suffisamment d’attention envers la santé mentale » des habitants. « La situation est très grave. […] Bien qu’ils aient la possibilité de se réunir, ils ne peuvent pas communiquer entre eux à propos des dégâts qu’ils ont subis. C’est donc à nous, les personnes non affectées directement, de leur rendre visite et d’écouter ce qu’ils ont à dire, mais ces efforts ont été très insuffisants », a ajouté M. Suzuki.

Les taux de radioactivité toujours anormalement élevés dans les zones périphériques de la centrale pèsent également sur la santé physique des habitants. Selon un rapport de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), rendu public le 28 février 2013, il existe un risque accru de contracter un cancer pour les personnes résidant autour de la centrale. Dans la première zone la plus contaminée, le risque de cancer de la thyroïde s’élève à 1,25% chez les femmes et les enfants (au lieu de 0,75% normalement).

L’OMS souligne également l’augmentation de 6% du risque de cancer du sein, pour les bébés-filles nées près de la centrale. Pour les bébés-garçons, le risque de leucémie est accru de 7%. Pour l’ONG Greenpeace, « le rapport de l’OMS sous-estime honteusement l’impact des premières radiations de la catastrophe de Fukushima sur les personnes présentes à l’intérieur de la zone d’évacuation d’un rayon de 20 kilomètres et qui n’ont pas été capables de partir rapidement ».

Des réacteurs nucléaires remis en exploitation au Japon ?

Mardi 5 mars, le ministre de l’Industrie japonais, Toshimitsu Motegi, a déclaré qu’il était pour le moment impossible de prévoir le nombre de réacteurs nucléaires qui pourraient être remis en exploitation au Japon avant la fin de l’année. « De nouvelles règles plus sévères seront adoptées en juillet et ensuite débuteront les passages en revue des réacteurs nucléaires », a pour sa part rappelé un porte-parole de l’Autorité de régulation nucléaire.

Pourtant, le président du groupe français Areva, Luc Oursel, avait déclaré la veille qu’il s’attendait au redémarrage de six réacteurs d’ici la fin 2013. Le PDG de Cameco, l’entreprise canadienne d’uranium, a quant à lui estimé que huit réacteurs devraient avoir été remis en service avant la fin de l’année.

Sur les cinquante réacteurs du parc nucléaire japonais, quarante-huit sont à l’arrêt depuis la catastrophe de Fukushima. Le premier ministre conservateur japonais, Shinzo Abe, plaide pour un redémarrage des réacteurs, suivant les nouvelles normes de sûreté, qui devraient être définies en juillet prochain.

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