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La femme musulmane est-elle «opprimée par l’islam»?

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Parmi les facteurs d’incompréhension dont souffre l’islam, la condition de la femme occupe une place importante. En effet, au nombre des attaques récurrentes contre lui, le débat concernant le statut de la femme musulmane « reste incontestablement le plus suggestif, puisqu’il prétend à lui seul résumer l’essentiel du prêt à penser envers cette religion […]. La femme musulmane est “opprimée par l’islam”: c’est là un des adages les plus fréquemment admis et unanimement répandus à travers le monde »[1].

La question de la femme est un sujet intarissable, souvent instrumentalisé, quasi obsessionnel. C’est une source inépuisable « de quiproquos, de polémiques et d’incompréhension[2] ». Ainsi, aux yeux de certains, l’islam serait la religion qui opprime les femmes ; la femme musulmane vivrait en marge de la société, dans une situation d’infériorité, dominée par l’homme et empêchée d’évoluer. Et que dire des faux proverbes (« Bats ta femme… ») et des blagues stupides répétées à satiété et atteignant le même niveau de médiocrité que les détestables histoires belges ? Pourtant, de telles inepties résument souvent toute la connaissance que l’on a de la question.

Le prisme déformé de cette représentation de la femme musulmane joue un grand rôle dans les polémiques visant à réduire l’islam à des représentations caricaturales pour en faire une sorte d’ennemi mondial. La condition de la femme est donc au centre de critiques d’autant plus acerbes qu’elles se nourrissent de poncifs et de stéréotypes qui sont loin de retranscrire avec exactitude la réalité des sociétés musulmanes, lesquelles sont beaucoup plus complexes que ne laissent supposer les banalités et les raccourcis simplistes qui sont répétés à satiété. (…)

Contrairement à l’idée répandue et aux nombreuses idées toutes faites qui ont cours en Occident, il faut donc répéter que l’islam a donné à la femme un statut qui la respecte et l’honore, tant sur le plan spirituel que sur le plan social. Sur le plan spirituel, il a affirmé l’égalité entre les hommes et les femmes. Sur le plan de la vie en communauté, il a reconnu aux femmes des droits et une protection dûment codifiés, mettant fin à un état d’infériorité. L’islam a permis le passage de la famille patriarcale, dans laquelle la femme n’avait aucun droit, à la famille conjugale, dans laquelle elle est une moitié du couple. Omar, le deuxième calife bien guidé, exposait :

« Avant la venue de l’islam, nous autres n’avions pas de considération pour les femmes. Puis, lorsque vint l’islam et que Dieu Tout-Puissant évoqua leurs droits, nous nous mîmes à comprendre qu’elles avaient des droits sur nous[3]

Par ailleurs, doit être souligné le rôle éminent joué par de nombreuses femmes dès les origines de l’islam puis dans l’épanouissement de la civilisation arabo-musulmane. Il est notable que le premier musulman, c’est-à-dire la première personne à croire en la Révélation transmise par le Prophète Mohammed (Muhammad), a été une femme : Khadija, la première épouse du Prophète. Ensuite, beaucoup d’autres femmes ont été des Compagnons du Prophète qui ont transmis des hadiths ou tenu une place importante durant les premières années de l’islam. Au fil des siècles, des femmes musulmanes se sont illustrées par leur foi, leurs connaissances, leurs actions au service du développement de la société.

Une meilleure compréhension de l’islam et des sociétés musulmanes qui représentent plus d’un milliard et demi d’hommes et de femmes, doit donc inciter à ne pas confondre l’islam avec les excès et les déviations de quelques-uns. Les mauvaises pratiques – voire des risques de retours en arrière dans certains pays – doivent être dénoncées sans relâche. Et cela, au nom et dans l’intérêt même de l’islam. Mais plus que tout, il faut retrouver la vérité du Message islamique, le débarrasser du fatras d’ajouts inutiles et inexacts, réaffirmer son caractère progressiste et sa soif de ce qui est juste, puisque la justice est l’une de ses finalités. Ce petit ouvrage n’a d’autre prétention que celle de réfuter les exagérations et les clichés en constituant un rappel des principes généraux de l’islam pour tout ce qui concerne la femme.

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Zeina et Tibi est présidente déléguée de l’Observatoire d’études géopolitiques de Paris. Chercheur et essayiste, spécialiste des questions relatives au dialogue des civilisations et des sociétés méditerranéennes. Membre d’Euro-Med Women Network du Centre Nord-Sud du Conseil de l’Europe et enseignante au sein du Master international d’études islamiques de l’Université ouverte de Catalogne à Barcelone, codirectrice et chef du bureau de Paris du magazine libanais al Ayam, elle préside l’Association des femmes arabes de la presse et de la communication à Paris.

L’islam et la femme : Rappel pour en finir avec les exagérations et les clichés, Desclée de Brouwer (28 février 2013)

[1] LAMRABET, Asma, « La problématique de la femme musulmane au centre du dialogue des cultures », in L’opinion (Rabat), 30 mars 2007 (reproduit sur le site Oumma.com).

[2] CHÉRIF, Mustapha, Le Prophète et notre temps, Alger: éditions ANEP, 2011.

[3] Rapporté par Boukhari (al Sahih)

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