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La grande influence des jésuites en Amérique du Nord

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Dès 1566, des Jésuites débarquent avec des Espagnols sur les côtes de Floride. En 1611, dans ce qui est aujourd’hui l’Etat du Maine, la Compagnie fonde sur l’île des Monts-Déserts, la mission Saint-Sauveur. Mais c’est au Maryland que commence leur épopée en Amérique du nord, dans ce pays donné par le roi Charles Ier à son ministre George Calvert, Lord Baltimore, catholique pour y fonder une société où protestants et catholiques soient sur un pied d’égalité. En cela aidé par quelques jésuites, Andrew White, John Altham, …

Des aventuriers

Mais les Jésuites en sont bientôt chasés par la révolution de Cromwell. Ils partent vers les Grands Lacs. Le père Marquette au Québec et sur le Mississipi : en 1773, il réalise la première descente du Mississipi, de la Prairie-du-Chien au confluent de l’Arkansas. Selon l’historien Hubert Bancroft : à cette époque, « on ne doublait pas un cap, on ne traversait pas une rivière sans qu’un jésuite ne montrât le chemin ». Jean de Brébeuf, qui finira écorché vif par les Iroquois : « La langue huronne sera votre Aristote et votre Saint Thomas, et tout homme habile que vous êtes et bien disant parmi les personnes doctes et capables, il vous faut résoudre d’être assez longtemps muet parmi les barbares ; ce sera beaucoup pour vous quand vous commencerez à bégayer…»

Dix ans plus tard surgit un autre légendaire jésuite, Eusebio Kühn, dit Kino, explorateur, trappeur, négociateur, agronome, astronome, mineur, cartographe, cow-boy, qui sillonna le sud du Far-West un quart de siècle, de la Californie au Colorado, où il introduisit notamment la vigne.<!–jolstore–>

La Compagnie se reforme au Nouveau Monde

Pendant que la Compagnie est proscrite en Europe, elle se reforme au Nouveau Monde sous l’impulsion de John Carroll. Les jésuites voient dans l’Amérique du nord le champ immense adéquat à la reconstitution de leur rêve guarani brisé : recommencer avec les Algonquins et les Cheyennes les réductions. Sous l’influence de Charles Nerinckx, originaire de la région de Louvain et parti évangéliser le Kentucky, on assiste à une flambée de vocations flamandes et wallones dans ce qui n’est pas encore la Belgique. En 1823, Mgr Dubourg de Saint Louis confie aux Jésuites l’évangélisation de l’immense vallée du Missouri.

Le père De Smet, est un jésuite belge, pionnier du Haut-Missouri, escaladeur des Montagnes Rocheuses, évangélisateur des Têtes Plates, des Cœurs d’Alêne, des Nez Percés, des Pieds Noirs et des Gros Ventres, pacificateur des Sioux, avocat permanent des Indiens à Washington, visiteur des Mormons, interlocuteur de Lincoln et de Sitting Bull, entomologiste, botaniste, trappeur, rival de Wyatt Earp« De tous les hommes blancs celui qui s’acquit la plus grande confiance des Indiens », a-t-on dit de lui.

Universalité de l’Église

Pierre Charles, né à Bruxelles le 3 juillet 1883, entra dans la Compagnie de Jésus en 1899. Il poursuivit des études de philosophie à Louvain et Valkenburg. Il enseigna la théologie à Egenhoven de 1914 à sa mort, survenue le 11 février 1954. Cet homme parlant plusieurs langues a enseigné dans le monde entier, à Rome, New-York, Rio de Janeiro, en français, latin, anglais, portugais. Dès 1920, il défendit l’idée d’Églises parfaitement autonomes dans les pays de missions. Cet aspect de sa missiologie – qui semble aller de soi aujourd’hui – n’était pas du tout évident à l’heure où il mena son combat pour une vraie universalité de l’Église. Il avait coutume de dire qu’il n’est pas normal qu’un Japonais doive se convertir deux fois : à la foi chrétienne et à une expression de celle-ci dans les schèmes culturels occidentaux.

Un ardent apôtre, prophète de l’unification du monde, l’égalisation des races, l’émancipation des colonisés, la nécessité de donner à l’Église une pluralité de visages selon les divers espaces culturels. Définit une sorte de « missiologie » devant beaucoup à l’anthropologie, et bannissant toute forme de racisme.

Cet article avait été précédemment publié dans le mensuel La Nef

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