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L’aggravation des violences contre les femmes en Amérique latine

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La violence sexiste persiste malgré les avancées pour le droit des femmes

Pendant huit ans, Dolores a enduré la violence de son mari. La première année, Dolores a demandé de l’aide à la police locale,  puis au procureur de Carthagène, en Colombie. Mais elle s’est heurtée aux accusations et aux blâmes de ces derniers. Elle a essayé plusieurs fois de quitter son mari. A chaque fois, il l’obligeait à revenir à la maison. Elle fut même menacée avec une arme blanche. Après des années de violence, Dolores et ses enfants finirent par à s’échapper pour de bon.

Ces dernières années, l’Amérique latine a fait des progrès en matière de droit des femmes. Cinq pays d’Amérique du Sud sont d’ailleurs dirigés par des femmes. Malgré ces avancées, la région enregistre un nombre élevé de violences contre les femmes. Certains observateurs pensent même que les violences sexistes s’aggravent.

« Les femmes demandent des droits et les hommes deviennent très violents », estime Nadine Gasman, à la tête de UNiT pour mettre fin à la violence contre les femmes en Amérique latine et dans les Caraïbes. Elle estime que ces violences sont de « pire en pire ».

Une femme sur trois dans le monde meurt des suites de violences sexistes. C’est la principale cause de décès chez les femmes âgées de 15 à 44 ans.

Des violences sexuelles plus fréquentes pendant les conflits armés

En raison de nombreuses années de conflit armé en Colombie, la lutte contre la violence sexiste est complexe dans ce pays. Le militarisme a de lourdes conséquences pour la sûreté et la sécurité des femmes. Elles sont souvent victimes d’agressions sexuelles pendant les conflits militaires. En Colombie, les femmes et les filles représentent la moitié des quatre millions de personnes forcées de quitter leurs maisons, les plaçant dans une situation très précaire.

Une étude menée par Profamilia Colombia et USAID a révélé que 48% des femmes déplacées déclarent avoir été victimes de violence domestique, contre 37% des femmes de la population générale. Ce taux élevé chez les femmes déplacées s’explique par la difficulté d’accéder aux services de santé et à la justice.

Un accès difficile aux soins et aux institutions juridiques

Un récent rapport de Human Rights Watch sur la violence sexiste en Colombie rassemble les histoires de 80 femmes déplacées qui ont rencontré des difficultés à obtenir le soutien et l’assistance nécessaire.

Le manque de familiarité avec le système de santé et les institutions juridiques, la crainte de représailles des agresseurs et l’incapacité de payer les services sont les raisons principales qui empêchent certaines femmes et jeunes filles d’accéder à l’aide dont elles ont besoin.

Bien que la Colombie dispose de l’un des cadres juridiques et politiques les plus avancés en Amérique Latine pour faire face à la violence sexiste, beaucoup de lacunes persistent dans sa mise en œuvre, en particulier pour ces femmes et enfants déplacés. « Obtenir des soins médicaux pour la violence [sexuelle] a été difficile», explique une femme déplacée à Bogotà. « Il a fallu que j’attende dix jours pour obtenir de l’aide », poursuit-elle.

Les retards ou le refus de se soigner après une agression sexuelle peuvent avoir de graves conséquences pour les victimes qui ne peuvent donc pas prévenir une grossesse, ni les infections sexuellement transmissibles, dont le VIH.

Les conséquences de ces violences ne se limitent pas qu’aux femmes

Mais les conséquences de ces violences faites aux femmes ne se limitent pas aux femmes elles-mêmes.  « Dans notre étude, nous avons découvert que les effets négatifs de la violence domestique ne sont pas limités aux femmes elles-mêmes, mais peuvent avoir des conséquences sur leurs enfants », affirme l’économiste Jorge Agüero. En utilisant les données sur la violence domestique du Pérou, de la Bolivie, de la Colombie, de Honduras, du Nicaragua, d’Haïti et de la République dominicaine, Jorge Agüero révèle que les enfants dont les mères ont été victimes de violences domestiques ont un poids plus faible, sont de plus petites tailles et sont plus sujets que les autres aux diarrhées.

Une question de droit

« Nous militons pour les droits de ces personnes à risque», explique le Dr Maria Isabel Ramirez Corea, de Profamilia au Nicaragua. « Nous fournissons l’information et les services indispensables. Mais c’est aussi une question de droit – des jeunes, des femmes victimes de violence – de vivre à l’abri de la violence et prendre des bonnes décisions », ajoute-t-elle.

Le droit d’être protégé contre toutes les formes de violence – y compris physique, verbale, psychologique, économique et sexuelle – doit être aujourd’hui la priorité des gouvernements d’Amérique latine pour renforcer leur engagement à protéger ces femmes et ces jeunes filles.

Réunion des dirigeants internationaux en mars

Pour lutter contre ces violences sexistes, les dirigeants internationaux se réuniront en mars lors de la 57e session de la Commission de la condition de la femme (CSW), au siège de l’ONU à New York.

Lors de cette session, les dirigeants élaboreront des politiques concrètes visant à promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes à travers le monde. Le CSW devrait également livrer un document pour guider les politiques et les législations des pays dans le monde entier dans leur lutte pour endiguer la violence sexiste.

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