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Laurence Parisot, une héritière qui ne lâche jamais rien

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Laurence Parisot est présidente du Medef depuis 2005. Première femme élue à la tête du patronat français, sa forte personnalité et sa détermination lui ont permis d’être réélue en 2010 pour un mandat de trois ans qui doit prendre fin le 1er juillet prochain. Mais Laurence Parisot ne veut pas partir. Elle ne peut pas rester ? Les statuts ne le permettent pas ? Et si on changeait les statuts ?

C’est ainsi que le 11 janvier dernier, elle envoyait un e-mail aux quarante-cinq membres du conseil exécutif du Medef pour leur annoncer qu’elle avait saisi le comité statutaire sur l’opportunité d’un second mandat de cinq ans au lieu de trois, et sur celle d’une suppression de la limitation du nombre de mandats et de la limite d’âge. Rien ne semble vouloir l’arrêter.

Issue du monde l’entreprise

Laurence Parisot est née le 31 août 1959 à Luxeuil-les-Bains en Haute-Saône. Elle est fille et petite-fille d’industriels : son grand-père Jacques Parisot et son père ont dirigé le Parisot Groupe, une entreprise de meubles, implantée à Saint-Loup-sur-Semouse (Haute-Saône) et en Roumanie. Ses parents étaient parmi les deux cents familles les plus riches de France et pourtant, elle n’a pas choisi de reprendre l’entreprise familiale mais de suivre son propre chemin.

Diplômée d’une maîtrise en droit et de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris (IEP), Laurence Parisot a commencé sa carrière professionnelle en 1983 en tant qu’assistante du Président du CEVIFOP (Centre d’Etudes de la Vie Politique Française). Elle intègre ensuite l’institut de sondages Louis Harris en 1985, en tant que chargée d’études, et l’année suivante, elle en devient la directrice générale.

Enfin, en 1990, à l’âge de 31 ans, elle prend la direction de l’institut de sondages IFOP (Institut Français d’Opinion Publique), dont elle détient 75 % du capital, après que l’entreprise s’est momentanément trouvée en cessation de paiement. En 2002, à la mort de son père, elle reprendra la présidence d’Optimum, une entreprise de portes de placard située dans le Sud-Ouest. Elle la cédera au fonds de pension luxembourgeois GMS, en 2006.

Une « touche-à-tout »

Membre du conseil d’administration de BNP Paribas depuis 2006, elle est entrée au conseil exécutif du Medef en 2002. Elle siège par ailleurs à plusieurs conseils d’administration de grandes entreprises, comme Michelin ou Euro Disney ou Havas (un groupe mondial français de conseil en communication). A l’époque, elle aime rappeler qu’elle a « un pied dans les services, un pied dans l’industrie ».

« Très ferme mais pas dure », c’est ainsi que la dépeignait Marie-Paule Colback, déléguée du personnel CGT de l’Ifop en 2005. Elle « attend de ses collaborateurs qu’ils travaillent autant qu’elle », c’est-à-dire beaucoup. Mais « c’est quelqu’un qui est très attaché à la paix sociale, avec qui il est possible de négocier », précisait-elle au Nouvel observateur.

A la tête du Medef

En 2005, elle décide de se présenter à la présidence du Medef. Pendant sa campagne, elle plaide pour une limitation des excès de la fiscalité française, une réduction des charges sociales des entreprises et une adaptation du code du travail français à la situation de compétition mondiale qu’entraîne la mondialisation de l’activité économique.

Soutenue par le président sortant Ernest-Antoine Seillière ainsi que par un certain nombre de fédérations professionnelles qui composent l’organisation patronale (la banque, les assurances ou le bâtiment), elle est élue dès le premier tour de scrutin à la majorité absolue des suffrages.

Après s’être fait remarquer avec des déclarations comme « La liberté de penser s’arrête là où commence le code du travail » ou « La vie, la santé, l’amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait-il à cette loi ? », elle apaise le débat en déclarant vouloir prouver que « libéral ne veut pas dire antisocial ». Elle a également déclaré qu’elle voulait que sa présidence soit sous le signe de la lutte contre le chômage et placer « l’entreprise au cœur de la société française » pour en faire « le moteur de l’ascension sociale ».

Pourquoi elle ne veut pas partir

Seule candidate à sa succession en 2010, Laurence Parisot est réélue par l’Assemblée générale du Medef avec 93,85 % des voix. Mais en cette fin de second mandat, nombreux sont ceux qui aimeraient bien la voir partir.

« On ne change pas les règles d’un scrutin quelques mois avant les élections. Une élection est une respiration », explique Pierre Gattaz, président du Groupement des fédérations industrielles (GFI) et candidat à la présidence du Medef, dans un entretien pour La Tribune. « Même si le bilan de Laurence Parisot à la tête du Medef est plutôt bon, elle doit laisser le Medef vivre sans elle. Les présidents de la République, les gouvernements passent, les syndicats changent de tête et pas le Medef, le Mouvement des entreprises de France ? Ce n’est pas sain. C’est inconcevable. »

Pour l’instant, rien n’indique que le conseil exécutif et l’assemblée générale du Medef acceptent les changements de statuts voulus par Laurence Parisot. Selon l’éditorialiste Jean-Marc Sylvestre, son soutien à Nicolas Sarkozy pendant la campagne lui aurait causé du tort : « Laurence Parisot explique que son ambition est de rester à la tête du Medef à cause de la crise financière qui nécessite une réflexion particulière », explique-t-il dans une interview pour Atlantico. « La situation est aujourd’hui compliquée pour elle car elle s’était trop rangée derrière Nicolas Sarkozy et elle a donc une étiquette qui va lui coller à la peau ». Affaire à suivre…

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