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Le changement climatique a-t-il encouragé les printemps arabes?

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Parmi les grands acteurs des Printemps arabes, un responsable majeur est peu souvent évoqué, et pourtant, il aurait joué un rôle crucial dans le cours des révolutions qui ont secoué les pays du Maghreb et du Moyen-Orient ces deux dernières années.

Le changement climatique attise les tensions

Le changement climatique. Pour Anne-Marie Slaughter, chercheur à l’université de Princeton, la donnée climatique doit être prise en compte pour analyser les révolutions arabes. Dans un ouvrage paru au début du mois, The Arab Spring and Climate Change, Anne-Marie Slaughter analyse, pour asseoir sa théorie, le concept de « stress ».

Un « facteur de stress » explique-t-elle, est un « changement soudain dans l’environnement qui, en interagissant avec un profil psychologique complexe, peut conduire une personne normalement calme à devenir violente. »

Si le stress ne peut pas être considéré comme la seule constante dans l’analyse d’un crime, il devient inévitablement un facteur parmi d’autres variables qui peuvent expliquer une catastrophe.

The Arab Spring and Climate Change ne prétend pas expliquer que le changement climatique a été la cause de la récente vague de violence des révolutions arabes, mais l’interaction de ces changements de température, de la hausse du prix de la nourriture (particulièrement du blé) et de la situation politique, est un facteur de stress caché qui a contribué à alimenter les révolutions et, aujourd’hui, ce même facteur, selon Anne-Marie Slaughter, rendra également très difficile la consolidation des révolutions en démocraties stables.

Les grands importateurs de blé sont tous dans le monde arabe

Dans un billet publié par The New York Times, Thomas L. Friedman analyse cet essai et rapporte les conclusions similaires du géographe Troy Sternberg, de l’université d’Oxford.

« Ce dernier a démontré comment, en 2010-2011, alors que les pays arabes se soulevaient, la Chine assistait à un des hivers les plus secs du siècle, alors qu’en même temps, des vagues de chaleur record s’abattaient sur de grands producteurs de blé (Ukraine, Russie, Canada et Australie) laissant de très mauvaises récoltes sur leurs passages et contribuant à une hausse historique des prix pour les pays importateurs de blé, dont la plupart se trouvent dans le monde arabe, » écrit Thomas Friedman pour The New York Times.

« Seule une petite fraction, de 6% à 18%, de la production annuelle de blé mondiale a été commercialisé à l’extérieur des frontières, » explique Troy Sternberg, repris par le quotidien new-yorkais, «  de sorte que la baisse de l’offre mondiale contribue à une forte hausse du prix du blé, impactant gravement des pays comme l’Egypte, le plus grand importateur de blé dans le monde. »

Le prix du blé révolte les Égyptiens

« Les chiffres parlent d’eux-mêmes, » indique Thomas Friedman. « Le pain fournit un tiers de l’apport calorique des Egyptiens, un pays où 38% du revenu est consacré à l’alimentation. »

« Le doublement des cours mondiaux du blé a significativement affecté l’approvisionnement alimentaire du pays. » Les prix alimentaires ont atteint leur sommet en mars 2011, peu de temps après la chute du président Moubarak.

« Considérez ceci, » écrit Thomas Friedman. « Les neuf plus grands importateurs de blé sont au Moyen-Orient, sept d’entre eux ont été victimes de protestations civiles mortelles en 2011. »

« Tout est lié, » reprend encore Thomas Friedman des propos de Troy Sternberg. « La sécheresse chinoise et les feux de brousse russes ont conduit à une pénurie de blé qui a elle-même suscité un prix plus élevé du pain qui a alimenté les manifestations de la place Tahrir. »

Et la boucle était bouclée.

> Lire le billet complet de Thomas L. Friedman sur le New York Times

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