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Le Comité d’éthique défavorable aux assistants sexuels pour les handicapés

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Dans la suite de la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, de nombreuses associations demandaient une réglementation complémentaire et adaptée concernant les fréquentes carences de leur vie affective et sexuelle des personnes touchées par le handicap. Certaines d’entre elles souhaitaient même que la réglementation permette la mise en place de services d’accompagnement sexuel comme il en existe en Allemagne, aux Pays Bas, en Suisse, et au Danemark.

C’est dans ce contexte que Roselyne Bachelot, alors ministre des Solidarités et de la cohésion sociale, avait saisi le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) afin qu’il donne son avis sur le sujet.

Arguments du CCNE

Le CCNE n’aura finalement pas répondu favorablement à la demande des associations. Pour le Comité, il était tout d’abord important de rappeler que dans la sexualité la « relation interpersonnelle » était « plus souvent désirée que la sensation sexuelle en elle-même ». Et de préciser : « On ne saurait parler de sexualité sans souligner l’importance des liens affectifs et de la relation amoureuse. »

Puis, le Comité consultatif national d’éthique a expliqué les problèmes que pourrait entraîner l’assistance érotique aux caresses : « D’une part, les bénéficiaires sont des personnes vulnérables et susceptibles d’un transfert affectif envers l’assistant sexuel », souligne-t-il. D’autre part, rien ne peut assurer que ce dernier ne va pas lui-même se rendre vulnérable « par une trop grande implication personnelle dans son service ».

C’est pourquoi le CCNE considère qu’ « il n’est pas possible de faire de l’aide sexuelle une situation professionnelle comme les autres en raison du principe de non utilisation marchande du corps humain ». De plus, « il semble difficile d’admettre que l’aide sexuelle relève d’un droit » qui serait « assuré comme une obligation de la part de la société et qu’elle dépende d’autres initiatives qu’individuelles ».

Assistance sexuelle ou prostitution ?

Pour le CCNE, l’aide sexuelle peut être assimilée à de la prostitution, « sauf à en faire une activité non rémunérée », estime le Comité d’EthiqueEn France, servir d’intermédiaire entre une personne qui se prostitue et une autre qui a recours à ses services relève du proxénétisme. Or, « si une chose est interdite pour tout le monde, pour des raisons éthiques, il semble difficile d’envisager qu’elle soit autorisée dans le cadre d’initiatives individuelles et seulement au profit de certaines personnes », précise le CCNE.

L’assistance sexuelle consiste en des massages, des caresses érotiques, voire des rapports sexuels effectués pour des personnes handicapées qui en font la demande. Dans les pays où elle est reconnue en tant qu‘activité professionnelle, elle est rémunérée et fait l’objet d’une véritable formation. En Suisse par exemple, c’est l’association Sexualité et handicaps pluriels (SEHP) qui s’en charge.

Un film a relancé le débat

Et pourtant, un film venait de relancer le débat, « The Sessions ». Inspiré de la vie de Mark O’Brien, le film raconte l’histoire d’un homme, journaliste et poète, paralysé à cause de la polio, et qui souhaite goûter aux plaisirs de l’amour. Ben Lewin met en scène John Hawkes dans la peau de cette personne handicapée qui va faire la rencontre de Cheryl Cohen (Helen Hunt), une thérapeute « sexuelle » qui va lui permettre de découvrir des choses qui jusqu’ici lui paraissaient inaccessibles et inconnues.

Véritable sujet de société, la sexualité des personnes en situation de handicap ne cesse de déchaîner les passions. Dans un livre, Sexualité et handicaps : Entre tout et rien…, Catherine Agthe Diserens, sexo-pédagogue, considère quant à elle que la sexualité est un droit auquel toute personne doit pouvoir avoir accès : « L’accès à la sexualité est un droit universel. Si la personne ne peut y accéder elle-même, nous nous devons de la soutenir dans ce sens comme nous le faisons pour toutes les autres dimensions de sa vie », explique-t-elle.

Et d’ajouter : « Il faut arrêter de réduire la personne handicapée à son handicap, il est temps de lui redonner aussi l’identité masculine ou féminine. Le handicap n’est pas un troisième sexe ! »

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