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Inde: la pression de l’opinion autour du procès du viol collectif

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Un procès symbolique

Quatre des six hommes accusés d’avoir violé une jeune femme dans un bus à New Delhi, au mois de décembre, sont en train d’être jugés. Ce crime a fait les gros titres dans le monde entier et a provoqué un soulèvement sans précédent dans le pays, forçant le système judiciaire indien à prendre les mesures nécessaires. Parmi les deux autres accusés, l’un âgé de 17 ans, sera jugé au tribunal des mineurs, l’autre, le chauffeur de bus Ram Singh,  chef de file du groupe a été retrouvé pendu dans sa cellule le 11 mars dernier.

La victime, Jyoti Singh Pandey, 23 ans, avait été sauvagement battue, violée, torturée puis laissée pour morte. La jeune femme qui voulait devenir kinésithérapeute est décédée dans un hôpital de Singapour le 28 décembre des suites de ses blessures.

L’Inde durcit les peines pour les violeurs

Le crime, et désormais le procès, a soulevé la question de la violence sexuelle dans la sphère publique en Inde. Le gouvernement indien a approuvé une loi durcissant les peines pour les violeurs en adoptant au mois de marsun loi permettant la peine de mort pour les récidivistes ou pour des viols provoquant la mort de la victime, comme dans le cas de Jyoti Singh Pandey.

A la sortie du tribunal, des hordes de journalistes attendent les réactions des avocats et des familles. Manohar Lal Sharma, l’un des avocats de la défense, s’arrête pour répondre à la presse. Il est connu dans le pays pour ses excès de colère et ses déclarations controversées. Plus tôt cette semaine, il avait claqué la porte de la salle d’audience, furieux contre les autorités qui désiraient amener l’un des accusés – hospitalisé pour des douleurs à la poitrine et au dos – au tribunal afin qu’il puisse être jugé.

« Ils n’ont aucune compassion pour Mukesh »  se plaint l’avocat devant un groupe de journalistes, faisant ainsi référence à Mukesh Singh, le frère du conducteur de bus retrouvé pendu. Comme les parents de Ram Singh, l’avocat ne croit pas au suicide, mais est persuadé qu’il s’agit d’un assassinat.

Procès suspendu

Pour Manohar Lal Sharma, les policiers font à nouveau preuve d’irresponsabilité en essayant de tirer Mukesh de son lit d’hôpital pour l’asseoir dans une salle d’audience. « Ils ont déjà tué une personne », déclare-t-il aux journalistes, « et maintenant ils vont en tuer une autre ».

Vijay Sansanwal, un autre avocat de la défense, ne croit quant à lui pas à l’hypothèse de l’assassinat. « Ram a quitté ses trois enfants et sa femme juste après que l’affaire ait éclaté », déclare-t-il en hochant la tête, comme si cela expliquait tout.

Pour l’instant, le procès a été suspendu en attendant de savoir si Mukesh était en assez bonne santé pour assister à l’audience.

Pendant ce temps, les rumeurs vont bon train concernant l’issue du procès. Parmi le public indien, de nombreux soutiennent que la nouvelle loi du gouvernement pour imposer la peine de mort aux accusés, mais certains craignent que le gouvernement n’aille pas jusqu’au bout.

Une loi qui risque d’affablir le taux de condamnation des violences sexuelles?

Sagolsem Pavel Meitei et Priyanka Singh sont étudiants en études de genre. Tous deux craignent que l’application de la peine de mort ou de la castration, une autre suggestion du public, affaiblisse le taux de condamnation pour les violences sexuelles.

Effectivement, selon Sagolsem Pavel Meitei, beaucoup d’hommes ne pourront plus être jugés coupables, étant donné que la charge de la preuve est beaucoup plus élevée lorsqu’il s’agit d’un procès portant sur une condamnation à la peine capitale. Sagolsem Pavel Meitei parle rapidement et doit s’interrompre plusieurs fois pour rassembler ses pensées au sujet du procès Pandey et sur la question plus large de l’agression sexuelle.

« Ce n’est pas seulement une question de justice pour elle », décalre Pavel. « Il s’agit de changer la façon dont l’agression sexuelle est perçue en Inde ». Mais Priyanka lui coupe la parole : « Cette vision de femme en détresse, si passive et faible … c’est juste pathétique. Cela n’aide en aucune façon. Cela victimise les femmes à nouveau ».

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