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Le made in France est-il «trop cher»?

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La crise est finie : le titre de l’essai d’Axel de Tarlé est volontairement provocateur : en effet, en 2013, la France risque la récession et devrait atteindre les 11 % de chômage, selon l’OFCE. Néanmoins, le diagnostic de la crise est maintenant bien établi. Et, comme on dit en mathématiques, un problème bien posé est à moitié résolu. Nos usines ferment. Nous ne sommes plus compétitifs. Jusqu’à présent, nous avons pu maintenir notre niveau de vie par l’endettement. Mais c’est fini. Nous sommes au bout du système. Il nous faut changer de logiciel. Tout le monde en convient.

Extraits de La crise est finie d’Axel de Tarlé (Le Cherche-midi)

Qu’est-ce qui fait qu’on achète tel article plutôt que tel autre ? C’est que le produit affiche un bon rapport qualité/prix. Et donc, pour vendre, il faut soit augmenter la qualité, soit baisser les prix. Les Allemands ont joué sur les deux tableaux. Radical ! Ils sont devenus les premiers exportateurs du monde. Tout le monde connaît la réputation du made in Germany. Dans l’automobile, c’est redoutable. Mais, en plus, les Allemands ont allégé les charges qui pèsent sur le travail. Gerhard Schröder a divisé par deux la durée des indemnités chômage, réduites à un an, contre deux ans en France. Résultat, en Allemagne, les cotisations chômage sont de 3 %, contre 6,4 % en France. Quand elle est arrivée au pouvoir, en 2005, Angela Merkel a poursuivi sur la même voie en instaurant la TVA sociale. Elle a baissé les charges que paient les entreprises et, en contrepartie, a relevé la TVA. On favorise les producteurs au détriment des consommateurs.

Au final, les cotisations patronales sur le travail ne représentent plus que 23 % du salaire brut en Allemagne, contre 41 % en France. C’est énorme. Cela veut dire que, sur un salaire de 1 000 euros, un patron allemand va payer 230 euros de charges, et un patron français 410 euros ! L’entrepreneur français part évidemment avec un gros handicap de coût du travail.

Certes, il existe des allégements de charges sur les bas salaires en France. Mais, dans l’industrie, on a souvent des ouvriers qualifiés payés deux ou trois Smic. Cela implique beaucoup de charges. Chez Peugeot-Citroën, on explique que, pour fabriquer exactement la même voiture en France et en Allemagne, il y a 400 euros de charges à payer, en plus, en France. Or, 400 euros, sur une voiture vendue 10 000 euros, c’est la marge bénéficiaire du constructeur. Résultat, si Peugeot-Citroën veut être compétitif face à Volkswagen, il doit renoncer à sa marge, vendre à prix coûtant. C’est ce qui explique que la marge des entreprises françaises soit tombée à son plus bas niveau depuis 1986, à seulement 28 %, à comparer avec 40 % en Allemagne.

Et là, le cercle vicieux commence. Quand une entreprise ne gagne plus assez d’argent, elle se met en mode « survie ». Elle réduit ses coûts, taille dans le budget recherche et développement et n’investit plus. L’engrenage commence. Sans innovation, le made in France perd en qualité, mais reste toujours aussi cher. C’est le début de la fin.

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Axel de Tarlé chronique l’économie sur Europe 1 et au JDD et présente « C à dire » sur France 5. Il a déjà publié le Petit Manuel éconoclaste pour comprendre et survivre à la crise (JC Lattès, 2009).

La crise est finie, Le Cherche-midi (14 mars 2013)

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