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Les Awá, tribu isolée la plus menacée au monde

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Les Awá connaissent intimement la forêt. Chaque vallée, chaque cours d’eau, chaque sentier est inscrit dans leur esprit. Ils savent où trouver le meilleur miel, quels arbres de la forêt vont donner les prochains fruits et quand le gibier pourra être chassé. Pour eux, la forêt est la perfection : ils ne peuvent imaginer qu’on puisse la développer ou l’améliorer.

Les richesses du sous-sol brésilien

« Les étrangers arrivent, c’est comme si notre forêt était en train d’être mangée, » explique Takia Awá. Pour les étrangers, comme pour nous, rester immobile c’est être à la traîne. 
Les frontières reculent constamment sous la pression du front pionnier à la recherche constante de nouvelles terres à exploiter.

Les ressources considérables dont regorge le sous-sol brésilien ont permis un miracle économique. Sept milliards de tonnes de minerai de fer gisent sous la mine de Carajás, à 600 km à l’ouest du territoire awá. Il s’agit de la plus grande mine de fer de la planète. Des trains de plus de 2 km, parmi les plus longs du monde, circulent jour et nuit entre la mine et l’océan Atlantique. Sur leur route, ils ne passent qu’à quelques mètres des forêts où vivent encore les Awá isolés.

Une centaine d’Awá isolés

Les Awá qui vivent sans aucun contact avec le monde extérieur sont l’un des derniers peuples isolés de la planète.

En tant que nomades, ils se déplacent avec leurs enfants et leurs animaux en transportant dans des paniers tressés en feuilles de palmier tout ce dont ils ont besoin, sans oublier les arcs et les flèches, les cordes en liane pour grimper aux arbres et la résine pour s’éclairer.

 

La chasse est l’une des principales activités des Awá

« Si mes enfants ont faim, je vais tout simplement dans la forêt et je leur trouve de la nourriture », dit Peccary Awá. Les femmes encouragent leurs époux à revenir avec du gibier en abondance et les hommes s’exécutent. Les Awá qui vivent encore isolés dans la forêt chassent avec des arcs de 2 mètres de long. Les flèches volent silencieusement jusque dans la canopée, ce qui permet d’en tirer plusieurs avant que le gibier ne soit alerté de la présence des chasseurs.

Des Awá sédentaires ont confisqué le fusil des braconniers et sont devenus des tireurs aguerris. Mais tous les chasseurs conservent un arc et un jeu de flèches au cas où les munitions viendraient à manquer.

Nourriture interdite

Si les ressources de la forêt sont abondantes, tous les animaux n’y sont pas prélevés. Ainsi, le capybara, le plus gros rongeur du monde, ou bien l’aigle harpie sont tabous pour les Awá qui ne consomment pas leur viande. Ils disent que manger une chauve-souris génèrerait des maux de tête. L’oppossum ? Une mauvaise odeur. Le colibri ? Trop petit. D’autres animaux ne sont chassés qu’à certaines périodes de l’année. Les Awá garantissent ainsi la préservation de la biodiversité tout comme leur propre survie.

Les esprits de la forêt

On pourrait imaginer qu’un rite exécuté dans une obscure forêt par une nuit de pleine lune puisse paraître sinistre. Pas pour les Awá, pour qui il marque l’appartenance à la communauté. Lorsqu’ils pénètrent dans le royaume des esprits de la forêt, c’est une affaire familiale. Tandis que les femmes ornent le corps de leurs époux de plumes du vautour royal à l’aide de résine, les jeunes enfants les observent attentivement.

Plus tard, alors que les chants se font de plus en plus intenses et que les hommes se dirigent vers le domaine des esprits, les bébés s’endorment sous le clair de lune. Lors de ces cérémonies, les Awá n’ont recours à aucune drogue : seuls les chants permettent aux hommes d’entrer en état de transe.

La porte vers l’autre monde

Au cours du rite, les hommes quittent la Terre et se dirigent vers l’ iwa, le domaine des esprits de la forêt. Ils y accèdent à travers une porte qui ressemble à un abri de chasseur, la frontière entre deux mondes. Les hommes se pressent autour de la porte avant d’entrer et lorsqu’ils atteignent l’ iwa, ils rejoignent les âmes de leurs ancêtres et les esprits de la forêt. La chasse est toujours bonne dans l’ iwa, puisqu’elle est aussi le domaine des animaux de la forêt. Sont cependant absents les colons ainsi que les chevaux, le bétail et les poules qu’ils ont introduits.

Une tribu menacée

Lorsque la voie de chemin de fer de 900 km a été construite dans les années 1980, les autorités ont décidé de contacter et de sédentariser les Awá dont le territoire était coupé par la voie. Le désastre a suivi sous la forme du paludisme et de la grippe : sur les 91 membres d’une communauté, 25 en étaient morts quatre ans plus tard.

Aujourd’hui, la voie de chemin de fer amène des étrangers qui convoitent les terres et braconnent le gibier sur le territoire de la tribu.

Mais l’invasion des terres awá par les colons ne signifie pas nécessairement la disparition de la tribu. D’autres Indiens du Brésil, comme les Yanomami, ont été victimes d’invasions dévastatrices. Leur situation s’est améliorée lorsque le gouvernement a été contraint de prendre des mesures pour protéger leurs terres.

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