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Zlatan Ibrahimovic: s’éclater ou éclater les autres

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Fort de ses bons mots, de ses prouesses sur le terrain et de sa personnalité hors-norme, Zlatan Ibrahimovic est devenu en quelques mois une véritable star du football français. Pour certains observateurs avisés ou pour un public de passionnés toujours désireux de trouver un champion, il n’est pas loin de devenir un mythe. Ou plutôt un phénomène de société comme le définit Jean-louis Gazignaire, ancien reporter au Figaro.

Dans ce livre, le journaliste a choisi de décrypter le parcours extraordinaire de cet enfant des Balkans (par son père et sa mère) élevé en… Suède.

Extraits de Zlatan, le phénomène Ibrahimovic de Jean-Louis Gazignaire (Éditions Jacob-Duvernet)

Pour l’heure, Zlatan a des soucis. Il est vrai que le tout jeune Ibra, « grande gueule » s’il en est, n’a pas choisi le meilleur procédé pour son intégration. Le jour où il arrive aux vestiaires, il lance à ses nouveaux coéquipiers : « Moi c’est Zlatan, mais vous, vous êtes qui, putain ? » On ne fait pas plus habile. Mais, plus grave, le courant ne passe pas avec l’entraîneur Co Adriaanse, qui le laisse sur la touche la plupart du temps.

De plus, il ne s’entend pas – et c’est un euphémisme – avec l’attaquant vedette de l’Ajax, le Néerlandais Rafael Van der Vaart, qui voit en lui plus qu’un rival, une véritable menace pour sa popularité : il est entré au club à l’âge de 10 ans et a grandi sur les terrains sous les vivats et les applaudissements et apprécie modérément cette concurrence venue de l’extérieur. Connaissant le tempérament de feu de Zlatan et son ego qui enfle à mesure des succès, l’affaire se présente mal.

Le premier de ces conflits se résout rapidement, puisque Adriaanse est limogé, et son successeur Ronald Koeman lui donne aussitôt sa chance. Il ne va pas la gâcher : l’Ajax devient champion des Pays-Bas et remporte la Coupe et la Supercoupe dans la même saison. En finale de la Coupe, face au FC Utrecht, alors que les deux équipes sont à égalité deux buts partout, on joue les prolongations, Zlatan, entré seulement à la soixante-dix-huitième minute est bien en jambes.

Confusion dans la surface de réparation d’Utrecht, on renvoie le ballon de la tête une fois, deux fois, trois fois, les défenseurs sont aux abois, d’autres à terre, et Zlatan surgit, saisit la balle au rebond et marque le « but en or » qui donne la Coupe à l’Ajax. C’est l’époque où l’équipe qui marque la première en prolongations décroche la victoire. On appelle ça le but en or. En or, comme Zlatan dont le prénom, vous le savez signifie « or » ou « doré ». Désormais il a sa place de titulaire assurée malgré son jeune âge. Désormais il va s’éclater.

Ou éclater les autres car son naturel bagarreur reprend encore le dessus, par intermittence. C’est ainsi que lors d’un match contre Gröningen, il balance un méchant coup de coude derrière la nuque d’un défenseur. L’homme est K.O., on l’évacue sur une civière. Devant le tollé général, la Fédération décide de voir la vidéo de l’action incriminée. La faute de Zlatan est flagrante et manifestement intentionnelle même si elle a eu lieu dans le feu de l’action. Il écope de cinq matchs de suspension.

À huit millions d’euros le transfert, cela fait un peu désordre. Les dirigeants sont en droit d’espérer amortir leur investissement, et non de regarder leur poule aux oeufs d’or somnoler tandis que les autres jouent au football. La saison de Zlatan sera ainsi souvent émaillée de ces incidents dus à son trop-plein d’ardeur conquérante. Pour la petite histoire, il redonna un coup de coude dès qu’il put rejouer, et l’on évacua encore sa victime sur une civière. Le génie n’excuse pas tout et la réputation de Zlatan Ibrahimovic oscillera toujours entre celle de Magic Zlatan et celle de Graine de Violence. Ce qui ne l’empêchera pas de devenir une star et de déchaîner l’enthousiasme partout où il mettra les crampons.

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Jean-Louis Gazignaire est spécialiste du sport, ancien reporter au Figaro et ancien rédacteur en chef de l’agence Sygma. Il publie Zlatan, le phénomène Ibrahimovic  aux éditions Jacob-Duvernet.

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