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Quelle place tient la religion dans l’itinéraire de François Hollande?

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Les dix chapitres de l’enquête de Samuel Pruvot montrent comment François Hollande a su gommer, ou jouer de son héritage chrétien en fonction des circonstances de sa carrière. L’auteur revisite la biographie officielle de François Hollande et observe les contradictions du personnage, son éducation, ses décisions. Il dresse le portrait d’un homme complexe sans tomber dans le réquisitoire facile. Alors que les grandes religions s’invitent dans l’actualité politique française sur le terrain sociétal, ce livre donne un coup de projecteur inédit : quels sont les critères déterminants pour l’actuel Président de la République face aux religions ?

Extraits de François Hollande, Dieu et la République, de Samuel Pruvot (Salvator)

Brive, novembre 2009. À l’école catholique Edmond-Michelet, François Hollande est l’invité d’un débat avec Eric de Labarre, le secrétaire général de l’Enseignement Catholique. Le thème s’impose : Avons-nous encore besoin de l’école catholique ? « À cette époque, François Hollande était à 2 ou 3 % dans les sondages », raconte François David, le chef d’établissement. Il ajoute dubitatif : « Avait-il déjà un plan pour l’Élysée ? »

Selon Valérie Trierweiler, la réponse est oui. Sa compagne situe sa décision à la rentrée 2009 : « Il s’est posé la question à voix haute. Qu’est-ce que tu en penses ? Ce jour-là, je lui ai dit : il n’y a qu’une question à poser : si tu penses que tu es le meilleur, tu y vas, si tu penses qu’il y a quelqu’un de meilleur, tu n’y vas pas ! Et il a répondu : Je suis le meilleur ! » (sur la web baptisée « Radio Hollande », 30 avril 2012).

Ce soir-là, à Brive, le candidat in petto rumine ce projet fou : devenir président de la République. Dans son fief de la Corrèze, Brive se trouve en terre catholique. L’école Edmond-Michelet ne fait pas mystère de son enracinement : les conférences sont organisées en cheville avec les Franciscains. C’est dans cette cité que le très populaire saint Antoine de Padoue fonda son couvent au XIIIe siècle. À l’époque, ce prédicateur de feu convertissait les Cathares à la « vraie religion ». Ce soir, à Edmond-Michelet, l’enjeu est évidemment ailleurs. Il est politique.

On veut prouver de part et d’autre qu’il est possible de transcender certains clivages. Exit les batailles homériques pour ou contre l’école libre. François Hollande a répondu à l’invitation. Serein et prêt au débat, il fait face aux parents d’élèves. François David rapporte une scène cocasse : « C’est le jeune président des élèves qui assurait la présentation de François Hollande. Il s’est adressé à lui en le taquinant sur ses ambitions politiques démesurées : « Je m’adresse, – disait-il avec une pointe d’ironie – à un leader du PS qui sera peut-être le prochain président de la République ! » Le commentaire pouvait sembler un peu vache, mais François Hollande a eu l’air d’apprécier[1] ! »

Ce soir-là, François David a demandé à Denis Tillinac – Corrézien et chiraquien pure souche – d’animer le débat. « Dans mon souvenir : François Hollande était parfaitement en phase avec Eric de Labarre, hormis sur la suppression des IUFM. » Nicolas Sarkozy a en effet promis que les enseignants ne passeront plus par la case des Instituts Universitaires de Formation à partir de 2010. Hormis ce point noir, l’échange est consensuel. Denis Tillinac témoigne : « Ce soir-là, le message de Hollande était simple : je défends la laïcité de l’État mais je prends acte de ce que représente l’Église.»

Le président du Conseil général de Corrèze est adepte du risque zéro, par tempérament et habileté politique. « Hollande était devant un public catho, analyse Denis Tillinac. Son but était de ne surtout pas déplaire. » Pour autant, François Hollande ne s’épanche pas outre mesure. « Hollande a beau être quelqu’un de très sympa, il ne dira rien publiquement en faveur de l’Église. Il sait très bien que ça pourrait heurter les gens du PS. »

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François Hollande, Dieu et la République, Salvator (28 mars 2013)

Samuel Pruvot est diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Paris et du CELSA. Il a débuté sa carrière comme Account manager dans l’agence de relations publique Marston Nicholson. Il est actuellement Rédacteur en chef du service actualités de Famille chrétienne.

[1] Entretien avec l’auteur le 20 septembre 2012.
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